Catalogne: et maintenant quoi?

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«Cette crise s’installera dans la durée et va probablement s’aggraver»

On me demande beaucoup ce qui va se passer en Catalogne.


C’est totalement imprévisible. Voici tout de même quelques pistes.


La brutalité policière a permis aux souverainistes catalans de remporter la bataille de l’opinion publique en Catalogne et dans le monde.


Mais dans le reste du pays, le chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, qui sait exactement quel est son électorat, n’a pas perdu un vote. Il y a un marché pour le Catalogne-bashing.


Options


Que peut faire le gouvernement de M. Puigdemont pour transformer cette nouvelle conjoncture en gains politiques durables ?


Commençons par la déclaration unilatérale d’indépendance prévue à l’origine.


Un vote en ce sens, mais dont l’entrée en vigueur effective serait reportée à un moment ultérieur non précisé ? Au-delà du symbole, cela ne changerait rien de concret à terme.


Une déclaration unilatérale suivie de gestes de rupture immédiats ?


Un taux de participation de 42 % et un vote tenu dans de telles circonstances, même si c’est Madrid qui maniait la matraque, ne sont pas une base suffisante. Personne ne reconnaîtrait ce nouvel État.


Pire, une déclaration unilatérale donnerait à Madrid le prétexte rêvé pour appliquer l’article 155 de la Constitution — ou pire encore ? — et mettre sous tutelle les institutions catalanes.


Ce serait une version soft de ce que la Catalogne a connu sous Franco : fini son gouvernement, fini son parlement.


M. Puigdemont subit toutefois la pression de ses alliés de la CUP qui veulent une déclaration unilatérale quoiqu’il arrive.


Le président catalan, qui n’a pas hésité hier soir à sermonner le roi, a demandé une médiation à l’Union européenne. Il sait parfaitement qu’elle ne viendra pas.


Les autres pays, dont beaucoup ont des minorités nationales, craignent une contagion. On condamne hypocritement la violence, mais on soutient l’Espagne.


Derrière ses allures de chérubin, Emmanuel Macron, le Justin européen, est aussi cynique que les autres.


Les grèves générales ? Elles s’épuiseront rapidement.


Des négociations constitutionnelles ? Sûrement pas à court terme.


En théorie, on sait ce qui conviendrait à une majorité de Catalans : des pouvoirs supplémentaires, un nouvel arrangement fiscal, la reconnaissance qu’ils sont une nation.


Madrid sait toutefois que d’autres régions arriveront avec leurs revendications.


Entre Rajoy et Puigdemont, la haine mutuelle rend tout dialogue impossible. Les dirigeants catalans seront maintenant amenés devant les tribunaux.


Durée


Le possible talon d’Achille de Mariano Rajoy, c’est qu’il est minoritaire au parlement.


Barcelone pourrait tendre des perches aux socialistes du PSOE, aux gens de Podemos, favorables à un référendum négocié, et aux Basques du PNV, qui ont leurs propres aspirations autonomistes.


M. Puigdemont pourrait réclamer, comme le journal La Vanguardia le propose, la création d’une commission indépendante d’experts pour ramener un peu de sérénité.


Mais soyons réalistes : il n’y a aucune avenue évidente. Cette crise s’installera dans la durée et va probablement s’aggraver.