Catalogne : cul-de-sac ?

86b5df60192914789de4ea3e9bd3d12e

Il faut tirer des leçons de l'échec catalan

Les Catalans voteront aujourd’hui.


Les élections visent officiellement à élire un parlement duquel devra émerger un gouvernement. Mais la campagne, comme on pouvait s’y attendre, s’est avérée un prolongement de la campagne référendaire de l’automne.


« Surréaliste » n’est pas un mot assez fort pour qualifier cette campagne. « Ubuesque » ?



Jamais vu


Les chefs des deux principaux partis souverainistes sont, l’un, M. Junqueras, en prison, et l’autre, M. Puigdemont, réfugié en Belgique, sachant qu’il serait arrêté s’il s’avisait de poser un orteil en territoire espagnol.


Imaginez une campagne électorale québécoise où M. Lisée serait en France, s’adressant aux siens via les médias électroniques, et M. Nadeau-Dubois, lui, serait en taule, verrait ses discours être lus par d’autres et serait symbolisé par une chaise vide lors des assemblées publiques.


Le chef du gouvernement central, Mariano Rajoy, laisse entendre qu’il lèverait la tutelle des institutions catalanes si les élections produisent le vainqueur qu’il souhaite, mais que rien ne serait garanti si les souverainistes étaient reportés au pouvoir.


La « démocratie » espagnole en est là.


L’Union européenne, elle, fait la morale à la Pologne et à la Hongrie, mais détourne le regard de l’Espagne.


Rien ne va plus dans la famille souverainiste. Du fond de son cachot, M. Junqueras dit à M. Puigdemont que lui ne s’est pas enfui à l’étranger dès que cela s’est mis à chauffer.


M. Puigdemont répond qu’il peut mieux poursuivre le combat de l’étranger que d’une cellule.


Fait cocasse, les férus d’histoire noteront que c’est le même reproche que l’on fit jadis à Louis-Joseph Papineau : s’être enfui dès que sa tête fut mise à prix.


Déjà confuse cet automne, la feuille de route des souverainistes l’est encore plus maintenant : on écarte désormais la rupture unilatérale, mais on parle de manière sibylline de « construire la république catalane ».


Les sondages ne permettent guère de prédire un vainqueur. On risque fort d’avoir un parlement sans parti majoritaire, et donc de pénibles tractations pour constituer une coalition gouvernementale inévitablement fragile.


Et celui qui gouvernera aura, dès le départ, la quasi-moitié de la population catalane contre lui.


Leçons


La Catalogne n’est pas le Québec, mais il y a assez de ressemblances pour que ce qui se passe là-bas soit plein d’enseignements pour les souverainistes d’ici.


Certains reprochent au PQ et à M. Lisée le report du référendum et leur supposée tiédeur souverainiste.


Ils refusent de voir les effets inévitablement démobilisants de deux défaites référendaires auprès d’un électorat qui n’a pas leur ardeur militante.


Le cas catalan montre qu’il ne faut pas confondre détermination et précipitation, qu’il ne faut compter que sur soi-même, et qu’il ne faut jamais sous-estimer la brutalité d’un État central prêt à tout ou presque pour ne pas se laisser démembrer.