«Bric-à-brac idéologique de gauche» - Le Bloc québécois essuie un tir ami

Des ténors souverainistes condamnent les propos de l'ancien ministre péquiste Jacques Brassard

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Élection fédérale 2008 - le BQ en campagne

La sortie de l'ancien ministre péquiste Jacques Brassard contre le Bloc québécois a fait sursauter les bonzes souverainistes, dont l'ancien premier ministre Bernard Landry, qui condamne la «dérive à droite» de son ancien ministre. Pendant que Gilles Duceppe tentait de minimiser ce «tir ami», le Parti québécois défendait son allié à Ottawa.
Les figures du mouvement souverainiste se sont porté à la défense du Bloc québécois et de Gilles Duceppe hier. Bernard Landry, Jacques Léonard et François Gendron ont tous rejeté les arguments de l'ancien ministre péquiste Jacques Brassard.

Dans une lettre publiée hier dans Le Quotidien et La Presse, M. Brassard a durement attaqué le Bloc québécois et ce qu'il qualifie de «bric-à-brac idéologique de la gauche». Selon lui, le Bloc ne parle pas assez de souveraineté et s'est replié sur des positions qui ne conviennent plus aux citoyens de plusieurs régions de la province. Il reproche à Gilles Duceppe son opposition à la guerre en Afghanistan et son appui au registre des armes à feu, entre autres. «Le Bloc devient principalement un parti de gauche et accessoirement un parti souverainiste. Tout un chambardement! [...] Le Bloc devient ainsi le jumeau du NPD, cet archaïque parti socialiste canadien», peut-on lire. Jacques Brassard reproche au Bloc québécois de faire du protocole de Kyoto un «texte sacré».
En entrevue avec Le Devoir hier, l'ancien premier ministre Bernard Landry a dit ne pas être surpris des propos de son ancien ministre, «qui a toujours été à droite». Il rappelle que le politicien du Saguenay devenu chroniqueur a appuyé la guerre en Irak et les deux élections de George W. Bush à la Maison-Blanche. Mais il estime que M. Brassard dépasse les bornes. «Je ne reconnais plus le Jacques Brassard que j'ai connu. Il y a une dérive à droite», dit-il.
Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, s'est défendu hier de ne plus être représentatif du paysage politique au Québec. Il a rejeté les comparaisons entre le Bloc et le NPD, soutenant qu'il y a un «océan» qui sépare les deux partis sur des questions comme la centralisation des pouvoirs et le libre-échange.
Gilles Duceppe estime que Jacques Brassard fait fausse route lorsqu'il avance que le Bloc défend une idéologie gauchiste -- notamment sur le contrôle des armes à feu -- qui rebute bien des électeurs en région. Pour le leader souverainiste, il n'y a pas de débat sur la question des armes à feu au Québec puisque l'Assemblée nationale s'est prononcée unanimement en faveur du maintien du registre fédéral. Même chose au sujet du protocole de Kyoto, qui a reçu l'appui de tous les partis politiques au Québec, a-t-il fait remarquer. «Le Bloc défend les consensus du Québec à Ottawa.»
«Si vous me demandez si je suis content qu'il pense cela, bien sûr que je ne suis pas content», a dit M. Duceppe sur les ondes d'une radio locale des Cantons-de-l'Est, ajoutant que M. Brassard «a droit à son opinion».
Le chef bloquiste s'est défendu d'avoir mis au rancart la souveraineté, mais a convenu du même souffle que «le fruit n'est pas mûr» pour une reprise du débat sur la question nationale au Québec.
Aussi essentiel qu'au début
Dans une lettre ouvert publiée aujourd'hui en page A9, le vice-président du Bloc québécois, Jacques Léonard, réplique lui aussi à son ancien collègue de l'Assemblée nationale. «Tu affirmes que notre défense des intérêts du Québec n'est qu'une formule vaporeuse et globalisante. Le même jour, on apprend que le premier ministre de l'Ontario aimerait bien, lui aussi, disposer d'un "Bloc ontarien virtuel" pour défendre les intérêts de l'Ontario. Mario Dumont, lui, énonce cinq priorités face au gouvernement fédéral, et toutes sont défendues par le Bloc québécois à Ottawa. Considères-tu aussi Mario Dumont comme un politicien de gauche?», écrit-il.
La chef péquiste Pauline Marois étant hospitalisée, c'est le leader parlementaire du Parti québécois, François Gendron, qui a défendu son allié à Ottawa hier. «Le danger du scrutin qui vient, c'est l'élection d'un gouvernement conservateur qui pourrait s'appuyer sur une Chambre des communes muselée et qui lui obéirait aveuglément. Voilà pourquoi la présence du Bloc à Ottawa n'a jamais été aussi indispensable», a soutenu M. Gendron.
Bernard Landry en pense autant. Selon lui, le Bloc québécois est utile à Ottawa, ne serait-ce que d'un point de vue démocratique. «La pertinence du Bloc est aussi solide qu'au début. Il y a une grande proportion de Québécois qui sont en faveur de la souveraineté. S'il n'y a pas de Bloc, ils vont faire quoi? Voter pour des gens qui sont totalement opposés à leur vision du Québec et du Canada? Moi, je paye 50 % de mes impôts à Ottawa, et quand je vote, je ne veux pas voter pour un fédéraliste!»
Selon lui, le Bloc québécois n'a pas à faire de compromis à Ottawa, ce qui le rend plus fort. «Les autres partis à Ottawa doivent avoir une vision pancanadienne et faire toutes sortes de compromis. Dans le cas du Québec, il y a des caractéristiques qui doivent être défendues, comme la réhabilitation des jeunes délinquants ou le déséquilibre fiscal. Est-ce que le scandale des commandites aurait fait autant de vagues sans le Bloc? On a besoin d'eux.»
Ce n'est pas l'avis du Parti conservateur, qui a profité de la controverse hier pour attaquer le Bloc sur son bilan. L'ex-sénateur Michael Fortier a affirmé que le Bloc avait maintenant fait près de 1000 promesses depuis qu'il est à Ottawa, sans grand résultat.
Jacques Parizeau a refusé de commenter, lui qui partait pour l'Europe hier. Rappelons qu'un sondage Léger Marketing-Le Devoir-The Globe and Mail paru samedi dernier montrait que 58 % des Québécois estiment que le Bloc est encore utile à Ottawa.
Le Devoir


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