Vendredi, le 6 mars dernier, en soirée, dans sa magistrale Salle Ludger-Duvernay de leur souveraine Maison du même nom, devant plus d’une centaine d’invités triés sur le volet dont plusieurs en effet de notoriété certaine et après 12 longues années sans n’avoir pu l’attribuer jusqu’ici, la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, en tant qu’hôte, remettait ainsi son prestigieux Prix, celui en mémoire de Maurice-Richard, ce roi et ce dieu béni, à l’un des siens, à l’un des nôtres, à Monsieur Robert Sirois.
Récompense créée en 1979 en l’honneur, on l’aura imaginé, du fameux Maurice Richard, non seulement l’étoile des Canadiens de Montréal, mais ce Glorieux qu’il fut par ses 50 buts en 50 parties régulières, ou mieux, par plus de 600 buts en carrière, record immémorial, mais bien plus encore, celui qui aura été consacré de son vivant l’idole des Canadiens-français, l’âme des habitants du pays depuis les regrettables évènements du Forum de mars 1955, dont il aura été malgré lui l’instigateur par son attitude téméraire, source vive à toute fin utile selon maints historiens, de ce qui fut ni plus ni moins le prélude angulaire de la Révolution tranquille.
Un Prix d’ores et déjà encensé par quelques illustres vétérans dont Mario Lemieux, Bruni Surin et Serge Savard, voté enfin à l’unanimité par un comité de sélection de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, salué à l’Assemblée nationale par le député Sylvain Pagé, magnifié ce soir-là entre autres par l’éloquente allocution de Monsieur Bernard Landry devant cette famille émue des Richard, ce prix a donc été dignement rendu à Monsieur Robert Sirois, récipiendaire remarquable, non seulement mémorable par son excellence sportive, mais par sa contribution avérée et indéniable à l’élan de toute une nation de langue française d’Amérique du Nord, celle d’un peuple qui se remémore et honore ses audacieux, comme il a consacré Richard en demi-dieu, soit ces géants qui, par leurs témérités entre autres, ont su surpasser les grands, les plus ambitieux des nôtres.
Résumons les faits. Dès les années 70, notre homme joue plusieurs saisons dans la Ligue Nationale de Hockey, d’abord avec les Flyers de Philadelphie, puis avec les Capitals de Washington qu’il représentera d’ailleurs au Match des Étoiles. Marquante carrière en somme, mais malencontreusement écourtée par une blessure au dos, Sirois assume aussitôt différentes fonctions, dont celles d'Agent de joueurs et d'Administrateur délégué par l'Association des Anciens de la Ligue Nationale, et sans oublier qu’il fut d’autant dans les années 90 copropriétaire et président des Roadrunners de la Ligue Internationale de Roller-Hockey.
Auteur entre autres du livre « Le Québec mis en échec » qui dénonce l’évidente iniquité réservée aux joueurs francophones de nationalité québécoise dans la LNH, il est aussi directeur général de la Fondation Équipe-Québec dont la mission est précisément de « Favoriser, encourager, promouvoir et défendre les intérêts de notre élite sportive québécoise sur la scène internationale ». Qui plus est, pour contrer l’absence éhontée de Québécois sur les équipes de Team Canada, y voire une sélection discriminatoire, Sirois est de plus l’initiateur de la déterminante Pétition à l’Assemblée nationale d’une Équipe-Québec dans chacune de nos disciplines sportives. Voilà pourquoi il est le lauréat du Prix Maurice-Richard. Que vous dire de plus pourtant ? Qu’il est effectivement un géant !
Bio-Vidéo de Robert Sirois :
http://ssjb.com/robert-bob-sirois-prix-maurice-richard-2015/
« Go ! Bob ! Go ! »
« Allocution d’André Matteau en l’honneur de Robert Sirois - 6 mars 2015 »
Pour arriver jusqu’à notre Bob, je me devrai alors ce soir de passer d’abord par la bande.
J’ignore si vous le saviez, mais Bob et moi, avons une émission de radio qui est diffusée tous les mercredis soirs, de 19h à 21h, à Radio Info Cité, une émission à lignes ouvertes de 2 heures qui se nomme « Du Sport ? Parlons-en ! avec Bob Sirois et André Matteau. »
Je ne suis surtout pas un spécialiste du sport. Mais Bob, lui, l’est et depuis des lustres. Moi, c’est l’histoire, la mémoire, la langue, l’héritage d’un peuple, qui plus est même, c’est l’âme humaine qui m’importe. Eh, bien, c’est justement de la sienne dont je vous parlerai en quelques mots ce soir. Mais avant tout, faisons-y d’abord un peu d’Histoire !
Vous connaissez sans doute bien l’expression « Go ! Habs ! Go ! » que l’on hurle à corps et à cris à chaque match du Canadien à Montréal pour les encourager ainsi à persévérer, à poursuivre, puis à vaincre l’adversaire! Yes, Sir ! « Go ! Habs ! Go ! », puis on est si fier de son appartenance à la meute rugissante ! Eh bien, Bob Sirois, lui, déteste ce cri de ralliement au plus haut point. Savez-vous vraiment pourquoi? Parce que c’est anglais, penserez-vous ? En fait, et sachez-le, parce qu’il n’y a pas plus moqueur, plus réducteur.
Parce que le CH du logo, au cœur même du chandail du Canadien, ne signifie surtout pas « Canadian Habitants », comme le prétend pourtant une légende anglo persistante, mais bien « Club de Hochey Canadiens » et tous ces mots, en français dans le texte ! Parce que les Canadiens de Montréal n’était historiquement composé d’abord que de Canadiens, à l’époque pourtant pas si lointaine où le nom de Canadiens ne signifiait que celui des parlants français, que celui des habitants du pays, que de ceux qui l’avait créé ! « Go ! Habs ! Go ! » était donc le cri de ralliement des anglophones condescandants, railleurs et ironiques sur nous, ces colons, ces habitants, ces frenchies, ces gens du pays. « Go ! Habs ! Go ! » Dites-moi donc, et le bleuglerez-vous encore et encore, ce slogan ?
Vous croyez que je m’éloigne de Bob, l’honoré de ce soir? Non, non, je m’en approche !
Mais le « Go » du « Go ! Habs ! Go ! », lui, parlons-en donc de ce « Go ». Car il n’est pas du tout anglo, ce Go ! Mais ne cherchez surtout pas sur l’Internet de la pensée unique : « Go » est gaélique! Dans cette langue fort ancienne et malheureusement oubliée, la consonne « G » signifiait partir vite, se sauver, s’exiler précipitamment, comme dans « GOLF » qui signifie littéralement par le G : partir vite; par le L : aller loin ; et par son F : avec force ! Comme pour le mot ‘But’ en viel anglais : « GOAL ». Comme dans le nom du pays la ‘GAULE’, qui était le pays de ces exilés venus de loin. On a d’ailleurs gardé en français cette vieille expression « Tout de go » qui signifie: ‘tout de suite, partir vite’. « GO » était donc gaélique, puis français au 4e siècle, enfin anglais au 11e siécle, lorsque, après la victoire sur l’Angleterre de Guillaume de Normandie, dit l’illustre Conquérant, nos chers Anglos n’y parlait plus que la langue de l’envahisseur normand, soit le français.
Alors, si les mots « Go » et « Habs » sont d’origine française, s’ils relatent notre histoire, notre mémoire et notre victoire à venir; s’ils rappellent notre conscience, notre souffrance et notre délivrance à prédire; s’il convient de dire qu’ils sont aussi le miroir des habitants d’un terroir peinant sous le joug d’un fou conquérant, qu’ils sont le reflet de nos familles, de nos pères et mères, de nos frères et sœurs, celui en fait d’une fratrie, celui d’une patrie, d’un peuple entier, celui d’une Nation vibrante des plus rayonnantes, d’une race à couleur de chair et de sang, soit d’une race d’anciens et nouveaux arrivants unie plus que jamais par les liens du cœur avec cette terre et ses peuples autochtones, alors, je vous dirai qu’avec toutes ces immenses personnes qui auront construit ce pays, aux noms de tous ces vainqueurs qui ont d’abord conquis nos cœurs, j’ajouterai le nom de Monsieur Robert Bob Sirois, à la trop courte liste de nos rois, ceux qui sont victorieux, lui qui aura su de son vivant, par cette force de combattant, de ce guerrier, ce gagnant, triomphant, ouvrir et conquérir le cœur de tout un pays, pour le porter seul à bon port, à coup de chaleur et sueur, à coup de peurs et pleurs, à bout de bras, à coup de poing, comme l’aura alors fait notre Maurice Richard, l’un de ces glorieux, lui qui nous a guidé, par sa foi en soi, autant par ses silences que par chacun de ses exploits, sous les émois, les ovations de ses pairs et ce, vers le Temple de la Renommée des Nations de la Terre.
Voilà d’autant pour ce grand homme qu’est Bob, lui, notre ami, le compagnon de route, le frère d'armes, ce joueur allier comme à l'associé somme toute, à la vie et à la mort, le meneur au-delà des chants de larmes et des douleurs au ventre, jusqu'à l’avènement de la victoire ultime, la vraie, la sublime, l’innée, celle née de la paix, celle en fait, de liberté.
Pour ça, Bob, non seulement je hurlerai « Go ! Bob! Go ! », mais mieux, je t’applaudirai !
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
4 commentaires
Archives de Vigile Répondre
12 avril 2015C'est claire qu'il est temps de refaire l'éducation des jeunes et de rappeler à toux les lois et privilèges si durement acquis.
Heureusement au primaires tous les cours se de textes qui rappelle l'histoire du québec.
Archives de Vigile Répondre
11 avril 2015Mes meilleures félicitations à M. Robert Sirois pour son attribution du prix Maurice Richard!
André Gignac 11/4/15
Archives de Vigile Répondre
11 avril 2015Monsieur Matteau
Rappelez-vous de la belle mais courte période des Nordiques à Québec. Nous pouvions être fiers de ce club et nous pouvions nous identifier plus facilement à ses joueurs qui étaient presque tous Québécois. Comme le dit si bien M.Allinger dans son commentaire; le milieu sportif est très important pour la construction de l'identité. Comment les Québécois font-ils, aujourd'hui, pour s'identifier au club de hockey "Canadian" de Montréal avec seulement deux Québécois qui en font partie? Ça frise le racisme!
André Gignac 11/4/15
Archives de Vigile Répondre
7 avril 2015Bravo André pour ce texte.
Les indépendantistes ne comprennent pas l'importance du sport pour la construction d'une identité forte et d'un pays.
Trop d'entres-eux regardent le sport avec mépris en le percevant comme du «pain et des jeux» pour le petit peuple.
Il reste deux pans important de la société à investir pour réussir l'indépendance, soient le monde des affaires et le milieu sportif. PKP l'a compris.
Le jour où le Québec aura ses propres équipes, le pays sera à nos portes.
Stefan