BCIA - Zones d'ombre

L'affaire Delorme-Normandeau


Quelle lecture faut-il faire du très attendu témoignage du directeur du Service de police de la Ville de Montréal, Yvan Delorme, hier, devant la Commission de la sécurité publique de la Ville, au sujet du curieux processus d'octroi de contrats de surveillance de son quartier général à la firme privée BCIA, maintenant en faillite?
Celle de l'administration Tremblay qui, par la bouche du président de la Commission, Claude Trudel, se désole des lourdeurs administratives qui font qu'on a du mal à faire signer des contrats? Celle de l'opposition qui s'étonne de la grande familiarité entre les entreprises de sécurité privées et les services de police, qui conduit à un tel laxisme qu'on en néglige de vérifier à qui on a affaire? C'est à cette lecture que nous adhérons.
La chronologie récitée par le directeur Delorme, au début de son témoignage, était foisonnante de détails. Mais elle donnait surtout l'impression d'un grand amateurisme de la Ville en matière d'appels d'offres et de cessions de contrats, ce qui expliquerait que, depuis son entrée au SPVM en 2006, BCIA a pu oeuvrer pendant des mois sur la seule base d'une entente verbale, puis de multiples contrats de gré à gré, sans l'aval du comité exécutif de la Ville. Cet amateurisme est toutefois bien curieux quand on sait qu'il n'avait fallu que deux mois et demi en 2003 pour lancer un appel d'offres, trouver une agence privée et faire approuver ce choix par le comité exécutif.
En fait, ce qui agace derrière cette «comédie d'erreurs», comme l'a qualifiée Louise Harel, c'est qu'on y retrouve le fil qui depuis quelque temps au Québec relie encore et toujours les mêmes acteurs, et dont la Commission d'hier n'avait pas mandat de parler.
De qui BCIA louait-il ses locaux lavallois avant de déménager à Montréal à la fin de 2007? De Tony Accurso. À qui BCIA a-t-il gratuitement offert un service de surveillance de sa résidence? À Frank Zampino, ancien président du comité exécutif de la Ville de Montréal, et qui fut invité sur le bateau de M. Accurso.
De qui le président de BClA, Luigi Coretti, était-il si proche qu'il lui avait fourni une carte de crédit pour se procurer de l'essence? De l'ex-ministre Tony Tomassi, grand argentier des libéraux, qui en a perdu son poste. À qui M. Coretti a-t-il réclamé un permis de port d'armes auquel il n'avait pas droit? Au ministre Jacques Dupuis. Avec l'aide de qui BCIA, toute petite entreprise de sécurité, avait-elle décidé de prendre de l'expansion? Grâce aux controversés FIER, créés par les libéraux. À quelles activités de financement a participé M. Goretti à l'aide, allègue-t-on, de prête-noms? À celles du PLQ et d'Union Montréal.
Qui M. Delorme a-t-il côtoyé avant son entrée en fonction? Luigi Coretti. Qui a appuyé la candidature de M. Delorme, sur qui nul ne pariait, comme chef de police? Frank Zampino. Qui a recommandé BCIA pour surveiller le quartier général de la police? Le chef Delorme. Et qui se vantait, en 2007, d'être une des rares agences privées à recevoir de la formation du SPVM? BCIA.
On pourrait continuer longtemps, et tout cela est troublant. Surtout quand en plus le chef de police mis en cause démissionne sans que nul ne l'ait prévu, et qu'il fut impossible hier, en commission, de poser ne serait-ce qu'une question sur ce départ prématuré. Il y a trop de zones d'ombre pour ne pas être préoccupés...


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé

-->