André Drouin poursuit le débat sur les accommodements

André Drouin et les accommodements raisonnables

Bernard Thompson et André Drouin alors qu'ils étaient sur la même longueur d'onde au sujet du débat sur les accommodements raisonnables. Photo: Archives

Paule Vermot-Desroches - Le Nouvelliste (Hérouxville) André Drouin persiste et signe! Le dépôt du projet de loi 16 par la ministre Yolande James, voulant que la fonction publique tienne compte des demandes particulières formulées par les immigrants quand ils traitent avec l'État, notamment en matière religieuse, l'a une nouvelle fois fait bondir de son siège.
L'ancien conseiller municipal d'Hérouxville à l'origine du «code de vie» a profité de la relance du débat pour publier un nouveau texte comportant 98 énoncés issus de demandes d'accommodements religieux ayant été faits au Canada dans les dernières années.
Mais contrairement à ce que plusieurs croient encore, ce n'est plus au nom de la municipalité d'Hérouxville que M. Drouin agit, pas plus qu'à titre de conseiller municipal. André Drouin ne sollicite pas d'autre mandat à l'élection du 1er novembre prochain, en partie à cause de la restriction que le rôle d'élu pouvait en bout de ligne lui imposer.
«Je n'ai plus les mains liées. J'avais songé à me présenter à la mairie, mais si j'avais été élu, j'aurais été restreint dans mes capacités à porter ce débat. Le multiculturalisme ne se débattra pas à Hérouxville. Je ne veux donc plus suivre la ligne d'un parti ou d'une municipalité, c'est la ligne du peuple qui m'intéresse», mentionne André Drouin.
Bien qu'il avoue que ce texte n'a certainement pas été rédigé en une nuit, André Drouin a profité des nombreuses prises de position publiques, notamment de la CSN, la FTQ et le Conseil du statut de la femme sur le projet de loi 16, pour mener cette «suite logique au code de vie» sur la place publique.
Parmi les énoncés, on retrouve de nombreuses constatations sur l'égalité des hommes et des femmes et l'acceptation de la société canadienne à ce que les deux sexes soient traités de façon égalitaire tant dans la vie privée que sur la place publique. Mais André Drouin s'inspire aussi d'autres constats, allant jusqu'à rappeler qu'au Canada «il est interdit de déterrer les cadavres pour festoyer avec», «on ne brûle pas les morts sur la place publique», «pour mieux communiquer les gens se regardent dans les yeux» et «la nourriture servie dans nos hôpitaux, nos écoles et aux prisonniers ne répond pas nécessairement aux critères des divinités».
Ce texte, intitulé [«Dans mon pays» et publié sur la tribune libre du site vigile.net->22480], a généré en date d'hier près de 2000 lectures. Chaque point, insiste M. Drouin, a été rédigé à la suite de demandes enregistrées au Canada pour ce genre d'accommodement religieux. «Ils n'ont pas tous été accordés, mais en grande majorité, ils l'ont été. Seulement, le simple fait que des groupes osent demander de tels accommodements est incroyable», lance-t-il.
André Drouin espère maintenant que la reprise récente du débat sur les accommodements religieux permettra une «vraie prise de conscience» de la part des gouvernements qui, selon lui, ont «tellement peur de dire non».
Jugement remis en question
Hérouxville semble définitivement avoir tourné la page sur le débat entourant les accommodements religieux, du moins à l'échelle municipale. C'est ce qu'on comprend en discutant avec les trois candidats qui briguent la mairie en vue de l'élection du 1er novembre.
À commencer par Bernard Thompson, qui avait témoigné en compagnie d'André Drouin lors de la Commission Bouchard-Taylor sur les accommodements raisonnables. M. Thompson, qui avait publié un livre à la suite de la saga qui avait éclaté dans la municipalité en janvier 2007, se détache aujourd'hui complètement de ce débat, mais semble aussi se détacher de celui qui fut son acolyte pendant cette croisade médiatique qui a touché le village.
«Le moins que l'on puisse dire est que M. Drouin ne manque pas d'imagination, sauf qu'il devrait comprendre que c'est un débat terminé pour les gens d'Hérouxville. Pour plusieurs, les exemples rapportés par M. Drouin font preuve d'un esprit mégalomane exceptionnel, parfois proche du délire ou d'un manque de jugement réel, ce qui ne peut que pousser ses lecteurs à l'incrédulité. Autrement dit, à tant étirer la sauce depuis 2007, elle a perdu de sa saveur», a déclaré Bernard Thompson.
Ce dernier ne cache pas que les relations entre les deux hommes sont rompues depuis plusieurs mois déjà et qu'il faut y voir une divergence d'opinion quant au format que doit prendre le débat sur les accommodements religieux. «J'aurais aimé que le débat prenne une autre tournure, qu'on parle d'immigration, d'identité et de langue. Mais avec de telles déclarations, on revient au début de 2007 et personne ne va au fond des choses», lance M. Thompson.
Ainsi, s'il est élu à la mairie, M. Thompson dit qu'il sera «toujours prêt à travailler avec ceux et celles que la population aura choisis le premier novembre, mais je veux que tous sachent dès aujourd'hui que je n'accepterai pas de débattre de la question des accommodements raisonnables au conseil municipal, et ce, par respect pour les gens d'Hérouxville, ceux-là mêmes qui ne partagent pas nécessairement la vision de celui qui conseille depuis trois semaines René Rocheleau, candidat à la mairie, le très coloré André Drouin. Soyons clair: Hérouxville a besoin d'un peu d'air frais», ajoute-t-il.
L'homme d'affaires René Rocheleau ne se cache pas d'être conseillé par André Drouin, qu'il présente comme un ami personnel de longue date. Cependant, il ne compte pas non plus mener ce genre de débat s'il est élu à la mairie. «Mes pensées vont dans le sens de ce qui a été écrit à l'époque, en janvier 2007. Par contre, je ne suis pas pour que la municipalité poursuive le débat et entraîne des fonds publics là-dedans, alors que la discussion doit se tenir à un niveau national. Ce n'est plus notre rôle de le faire», affirme M. Rocheleau. Ce dernier soutient toutefois que le débat doit se tenir au Québec et au Canada pour éviter que la société continue de s'embarquer dans des «accommodements déraisonnables».
Pour sa part, la candidate Alice Dionne était conseillère municipale en janvier 2007 et avait voté en faveur de l'adoption du code de vie, un choix qu'elle ne regrette pas, mais duquel elle préfère se détacher aujourd'hui.
«On a accepté de l'endosser et je crois que ça a eu du bon, car nous avons permis aux gens de s'exprimer sur un sujet sur lequel personne n'osait se prononcer seul. Il y avait un malaise et ça nous a permis d'en parler», lance-t-elle.
Cependant, si elle devait accéder à la mairie, Alice Dionne ne se relancerait pas dans une telle aventure. «Je me détache de ça. Ce n'est pas le rôle d'une municipalité de tenir un tel débat. Je préfère concentrer mes énergies à la bonne gestion de la municipalité, c'est ce qui est important», confie-t-elle.


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