Alliance du M5S avec le centre gauche : le plus dur reste à faire

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Une alliance bancale entre deux adversaires politiques

Selon les résultats publiés ce mardi 3 septembre en début de soirée et certifiés par un notaire, 79,3% des 80.000 sympathisants du Mouvement 5 étoiles (M5S) qui se sont exprimés sur la plateforme Rousseau, l’outil de démocratie directe géré par la société de conseil stratégique de Davide Casaleggio, fils de l’un des deux fondateurs du M5S, ont approuvé l’accord avec le Parti démocrate. Le noyau dur des sympathisants, qui représentaient 20% des votants, a en revanche rejeté le projet. « C’est un véritable plébiscite, nous devons être orgueilleux du fait que le monde entier a attendu le vote des 80.000 Italiens qui se sont exprimés sur une plateforme unique au monde, nous entrons à présent dans la dernière ligne droite, ce ne sera pas un gouvernement de gauche ou de droite mais un gouvernement qui fera les choses justes », a réagi Luigi Di Maio, chef politique du Mouvement. La dernière ligne droite, cela veut dire peaufiner la liste des ministres et affiner le programme, pour le moment plutôt touffu et assez confus, compte tenu des divergences au sein du nouveau duo.


Ce vote était très attendu, la naissance de la nouvelle majorité avec à la clef un nouveau gouvernement, dépendant du résultat. Car le chef politique du M5S mais aussi les têtes d’affiche avaient été clairs : si les sympathisants rejettent l’accord, il faudra passer au plan B, c’est-à-dire des élections anticipées. Une solution dont personne ne voulait entendre parler, à commencer par le M5S en chute libre dans les sondages. Au final, le danger d’un retour aux urnes a été écarté mais tout le monde a dû payer le prix fort pour arriver à un tel résultat. A commencer par Beppe Grillo, le comique et fondateur du Mouvement qui a littéralement mangé son chapeau à la veille du vote pour convaincre ses ouailles de dire oui. Car après avoir critiqué les démocrates avec une grande virulence pendant des années en les accusant de tous les maux et de tous les péchés, le trublion a publié un post intitulé : « Je suis fatigué ».


Dans ce message vidéo, Beppe Grillo parlait de compromis inévitables, de grands défis, de moment historiquement important, d’occasion unique. C’était faire fort, mais convaincre les militants d’entériner l’accord avec les ennemis d’hier et peut-être de demain, valait bien un sacrifice verbal. Craignant lui aussi un verdict négatif, Giuseppe Conte s’était également adressé aux militants à quelques heures de l’ouverture de la plateforme Rousseau aux votants. « Ne doutez plus, nous sommes face à une magnifique opportunité, nous avons de grandes idées et nous changerons notre pays que nous engagerons dans la voie de la modernité en gommant les inégalités », a déclaré Giuseppe Conte dans un message vidéo adressé au peuple des 5 étoiles.


Dans les prochaines heures, le président du Conseil désigné rencontrera à nouveau le chef de l’Etat, Sergio Mattarella, pour lui communiquer la liste de ses ministres. Aux dernières nouvelles, les deux postes de vice-président du Conseil seront abolis et remplacés par deux fauteuils réservés aux deux chefs des deux délégations politiques qui s’apprêtent à prendre les commandes du paquebot Italie. Un tour de passe-passe pour calmer le 5 étoiles Luigi Di Maio qui réclamait cette fonction pour conserver sa visibilité et un peu de pouvoir alors que son rôle à la tête du mouvement est remis en question. Au chapitre du programme encore pas mal dans le flou, 26 points devront être réglés. Comme la question brûlante de l’immigration, les démocrates voulant détricoter les décrets approuvés par le gouvernement précédent.


Ou encore celle du budget 2020, basé sur l’idée d’une relance économique mais sans remettre en question l’équilibre des finances publiques. L’objectif est de ne pas augmenter la TVA, une solution qui pend au nez des Italiens et que l’Italie présente ponctuellement à la Commission européenne comme une forme de garantie des règles budgétaires communautaires. Or le budget 2020 devant inclure 23 milliards d’euros de recettes nouvelles et la croissance étant au point mort, le relèvement de la TVA est évoqué depuis des mois comme quasiment inévitable. Au chapitre social, le nouveau duo envisage de réduire le coût de l’emploi pour relancer le marché en déprime, d’introduire un salaire minimum et d’investir sur les jeunes générations qui fuient l’Italie. La protection de l’environnement fait aussi partie des grands points avec la mise en place d’une palette d’outils importants pour engager le pays dans la voie de la transition écologique. Sacré programme !