Aller au-delà de la sémantique et passer au vrai travail

Les mots, toujours les mots

Tribune libre

Dans son opinion intitulée « Indépendance : le sens et la vérité d’un mot » publiée dans Le Devoir du 10 avril, M. Jocelyn Coulon, directeur exécutif de l’Idée fédérale, y va d’une attaque en règle contre ceux qui se montrent timides sur l’utilisation du mot
« indépendance », écorchant au passage Jean-Martin Aussant :
« Ainsi, l’ex-député péquiste Jean-Martin Aussant a créé un parti “ souverainiste ”, mais il n’utilise pas le mot “ indépendance ”. »
Le 11 avril, toujours dans Le Devoir, le chef d’Option nationale réplique à M. Coulon dans un article portant le titre « Le choix d’un mot – Souveraineté ou indépendance? » : « Pour ma part, j’ai toujours trouvé inutile de perdre de l’énergie à s’entredéchirer sur le choix du mot à utiliser, d’autant plus que ça semble assez futile du point de vue d’un indécis qui se demande si le projet lui-même est fondé ou pas… Mais le choix du mot appartient bel et bien à chacun. Qu’on me dise être indépendantiste ou souverainiste, je saurai qu’on veut la même chose que moi. Si on me dit être fédéraliste, provincialiste ou monarchiste, je saurai alors qu’il reste des gens à convaincre, que nous ne serons jamais si bien servis que par nous-mêmes et qu’il est grand temps que nous y voyions, bien au-delà de la sémantique. Au travail.»
Ce n’est pas d’hier qu’une telle saga sur le choix du mot à utiliser pour désigner notre allégeance fait couler beaucoup d’encre. À cet effet, JMA pointe l’ancien premier ministre du Canada, Jean Chrétien qui « prenait grand soin d’utiliser le mot séparatiste. Étrangement, je n’ai pas vu M. Coulon le critiquer à cet égard et lui reprocher de ne pas avoir parlé d’indépendance. Sans doute M. Chrétien trouvait-il que la connotation quelque peu négative et péjorative du mot séparatiste, surtout dans sa bouche, pouvait donner mauvaise image à ceux qui veulent simplement faire en sorte que le Québec possède la capacité de choisir son propre destin ».
À toutes fins pratiques, il me semble que ce sempiternel débat a assez duré et qu’il est temps d’aller au-delà de la sémantique et de passer au vrai travail, à savoir, comme l’exprime si justement JMA, de «convaincre les Québécois des avantages pour le Québec d’être un pays qui contrôle tous ses leviers décisionnels ».
Les mots, toujours les mots
Décidément, par les temps qui courent, les Québécois semblent se complaire à participer à une guéguerre de mots. En effet, après toute la saga qui a entouré le débat sur les notions de souveraineté et d’indépendance au cours des derniers jours sur la scène provinciale, c’est maintenant au tour de la scène municipale de Montréal de faire la manchette en voulant changer le nom de Fondation du maire par Fondation Montréal inc.
Selon Nicolas Boileau, « Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément »…Il appert que les Québécois éprouvent beaucoup de difficultés à trouver les mots qui énoncent clairement ce qu’ils conçoivent et, par le fait même, à découvrir aisément les mots pour le dire !
Henri Marineau
Québec

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Henri Marineau2093 articles

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Né dans le quartier Limoilou de Québec en 1947, Henri Marineau fait ses études classiques à l’Externat Classique Saint-Jean-Eudes entre 1959 et 1968. Il s’inscrit par la suite en linguistique à l’Université Laval où il obtient son baccalauréat et son diplôme de l’École Normale Supérieure en 1972. Cette année-là, il entre au Collège des Jésuites de Québec à titre de professeur de français et participe activement à la mise sur pied du Collège Saint-Charles-Garnier en 1984. Depuis lors, en plus de ses charges d’enseignement, M. Marineau occupe divers postes de responsabilités au sein de l’équipe du Collège Saint-Charles-Garnier entre autres, ceux de responsables des élèves, de directeur des services pédagogiques et de directeur général. Après une carrière de trente-et-un ans dans le monde de l’éducation, M. Marineau prend sa retraite en juin 2003. À partir de ce moment-là, il arpente la route des écritures qui le conduira sur des chemins aussi variés que la biographie, le roman, la satire, le théâtre, le conte, la poésie et la chronique. Pour en connaître davantage sur ses écrits, vous pouvez consulter son site personnel au www.henrimarineau.com





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3 commentaires

  • Serge Charbonneau Répondre

    12 avril 2013

    Je considère que tous ces articles que vous avez relevés avec pertinence, M. Marineau, démontrent clairement que l'on nous occupe sur des points finalement assez ridicules de la sémantique.
    Imaginez, des articles qui se succèdent sur ce choix de termes pour décrire finalement ce que veulent touts ceux qui emploient l'un ou l'autre de ces termes, c'est-à-dire proclamer le Pays.
    Ces textes servant à attiser les chicanes de mots sont une stratégie puérile et paradoxalement efficace.
    Je partage totalement votre opinion, M. Marineau: «ce sempiternel débat a assez duré et qu’il est temps d’aller au-delà de la sémantique et de passer au vrai travail, à savoir, comme l’exprime si justement JMA, de « convaincre les Québécois des avantages pour le Québec d’être un pays qui contrôle tous ses leviers décisionnels ».
    Je crois que les seules réponses valables pour répondre à ces grands discours de sémantiques sont de les ridiculiser parce qu'ils sont évidemment ridicules.
    Par l'humour nous pouvons faire d'une pierre deux coups soit: 1- démontrer le ridicule du faux "débat" (sic) et 2- conscientiser nos concitoyens à cette volonté de Pays que véhiculent tous ces mots différents parlant de la même idée.

    La dialectique et la sémantique jouent un rôle important dans la manipulation des opinions et dans l'inculcation d'émotions artificielles ou virtuelles.
    Nous vivons dans un monde où l'on manipule les mots pour manipuler les esprits. Il n'y a qu'à voir les mots que nos élus hypocrites emploient pour nous endormir et nous faire oublier leurs actes répréhensibles ou leur inaction.
    Il n'y a qu'à voir ce journalisme de mots. Combien de nouvelles totalement orientées sur le discours et qui oublient délibérément les faits de la réalité !
    Nous vivons dans un monde qui nous manipule l'esprit et le sentiment afin de nous rendre inoffensifs, amorphes et même pires en nous faisant consentir aux atrocités et à l'exploitation. Consentir aussi à demeurer dominé (l'effet larbin : https://www.youtube.com/watch?v=HH5fVD-1_I4 ).
    Serge Charbonneau
    Québec

  • Archives de Vigile Répondre

    12 avril 2013

    Moi au dela des mots indépendance ou souveraineté, je crois qu'on a oublié le plus important : une stratégie soutenue de communication de l'idée. On se fait planter dans les médias car nous n'avons aucun contre poids même si nous avons les meilleures idées. Nous n'avons aucun contrôle d'aucun média national d'importance.
    Tant que nous allons éviter de parler de cela et de trouver une solution, les plus beaux programmes, les plus belles envolées oratoires resteront des phrases qu'on écrira en haut du site de Vigile pour nous rappeler la nostalgie d'une époque révolue.
    Parizeau l'a dit: "on a perdu à cause de l'argent et du vote ethnique." Si on avait eu l'argent le vote ethnique aurait voté du bon bord.
    Ça prend de l'argent pour mettre en place une stratégie de communication efficace. En fait ça prend une stratégie de financement pour la promotion de l'idée. Les adversaires ont bien compris cela. A tous les jours à la télé, je vois des messages du gouvernement canadien avec le mot Canada et la feuille d'érable. A un moment donné, à force de répétitions ça commence à porter fruits. Que fait Marois? Elle fait la promotion contre l'homophobie. Je n'ai rien contre mais comment cela peut-il être plus prioritaire que l'article 1 de ce parti?
    En fait ça ne sert à rien de financer le PQ si celui -ci ne fait pas la promotion de l'indépendance. On serait mieux de créer un fond d'investissement nous tous ensemble qui verrait à investir dans des medias de communication afin d'avoir un mot à dire sur la ligne éditoriale de ces radio, journaux ou télévisions.
    Parizeau et Landry ont la stature et l'expérience nécessaire pour mettre en place un tel fond d'investissement. Pourquoi ne s'attaque-t-on pas à la source du problème?
    A Québec, les fédéralistes ont réussi en 20 ans a transformé la mentalité des gens et à les faire voter contre leurs intérêts car n'est-ce pas à Québec qu'on retrouve la plus grande partie des ministères du gouvernement qui donne du pain à des milliers de citoyens de la ville de Québec?
    Comment se fait-il qu'ils appuient plutôt les institutions fédérales et qu'ils ne cherchent pas à augmenter leur nombre ? Le rapatriement de certains pouvoirs du fédéral au Québec ferait augmenter le nombre de fonctionnaires pour gérer ces pouvoirs à Québec. C'est un non sens qui ne s'explique que par une propagande constante du fédéralisme par les radio poubelles de Québec.
    Donc l'arme qui nous manque c'est la communication à grande échelle. Attaquons-nous à ce problème, après on parlera du contenu. On ne part pas à la guerre avec des tire-pois.

  • Jean-Claude Pomerleau Répondre

    12 avril 2013

    De l'importance d'adopter un langage statutaire.
    De quoi s'agit-il. Notre projet à pour objectif de changer le statut du Québec, de province à État souverain. C'est en ces termes que l'on peut se faire comprendre par tous les États souverains à l'international.
    L’indépendance désigne le moment de rupture d'un cadre constitutionnel. La souveraineté le statut permanent de l'État. (ex : les États-Unis déclare leur indépendance en 1776, ils seront reconnus souverains en 1783, suite à la victoire de Yorktown, 1781) ; le Québec a déclarer son indépendance en 1837-38, et n'est toujours pas souverain.). La leçon est simple. il ne suffit pas de prendre une décision, il faut surtout la rendre effective sur son territoire. Et à cet égard, seul un rapport de force favorable, mène au changement de statut d'un État.
    Dans le contexte actuel,dans le mouvement souverainiste, le terme indépendance désigne l'intensité d'une conviction. Et dans plusieurs cas, pas l'intelligence politique qui vient avec.
    Si nous voulons changer de statut, tenons nous-en au langage statutaire, le seul langage que les autres États souverains parlent entre eux.
    JCPomerleau