COMMISSION CHARBONNEAU

Accurso incrimine Duchesneau et Bibeau

L’entrepreneur affirme avoir donné 250 000$ à l’ex-député de la CAQ

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Dons au PLQ : évidemment, Couillard affirme ne pas être au courant…

Tony Accurso a ouvert (un peu) son jeu, vendredi à la commission Charbonneau, en mettant en cause l’ex-député caquiste Jacques Duchesneau et l’argentier libéral Marc Bibeau dans le financement politique illégal.

Après avoir surfé sur la plupart des questions sans compromettre ses précieux contacts toute la semaine, l’entrepreneur a éclaboussé d’abord Jacques Duchesneau, qui a fait carrière sur une image d’incorruptible.

À la suite de sa défaite contre Pierre Bourque, lors des élections montréalaises de 1998, Jacques Duchesneau et son parti étaient lourdement endettés. Selon le témoignage de Tony Accurso, l’ex-chef de la police de Montréal lui a demandé son aide pour rembourser une hypothèque sur sa résidence.

« Si tu m’aides, je vais me replacer les pieds quelque part. Je vais m’en souvenir et je vais te retourner l’ascenseur », aurait dit Jacques Duchesneau à l’entrepreneur.

M. Accurso a fait un chèque au nom de la compagnie d’un tiers (un certain Richard) qui aurait servi d’intermédiaire à Jacques Duchesneau.

Tony Accurso n’a pas de preuves matérielles pour corroborer ses affirmations. Il suggère à la commission d’enquêter sur les remboursements d’hypothèques résidentielles faits par Jacques Duchesneau, dans la période concomitante au paiement des 250 000 $.

M. Accurso nie qu’il cherche à se venger de Jacques Duchesneau, qui a produit un rapport dévastateur sur la corruption lorsqu’il dirigeait l’Unité anticollusion au ministère des Transports. L’ex-député caquiste avait déclaré à la commission que trois ministres libéraux, non identifiés, avaient séjourné sur le Touch. « C’était des menteries pures et nettes », a dit M. Accurso.

À la demande de Bibeau

M. Accurso, visiblement plus détendu vendredi, a par la suite confirmé le rôle prépondérant de Marc Bibeau dans le financement sectoriel au Parti libéral du Québec (PLQ).

Le grand argentier libéral sollicitait directement Tony Accurso pour obtenir des dons de 25 000 $ à 30 000 $ par année. Des dons faits en violation de la Loi électorale.

De 1998 à 2009, les employés et les personnes liées à M. Accurso ont acheminé des contributions de 556 080 $ au PLQ. Les employés étaient « systématiquement » remboursés par l’entrepreneur, ce qui contrevient à la Loi électorale, interdisant l’usage de prête-noms.

« Dans ces années-là, on n’appelait pas ça des prête-noms, c’est un nouveau langage, ça »,a dit M. Accurso en rigolant.

Un coursier livrait les chèques, de 3000 $ chacun (dans une enveloppe portant le logo de l’une des compagnies de M. Accurso), directement au bureau de Marc Bibeau.

Tony Accurso n’a jamais discuté avec M. Bibeau des méthodes qu’il utilisait pour répondre à ses demandes. Selon lui, il est difficile d’ignorer la réalité. « Il n’y a personne qui va donner un chèque de 3000 $ par conviction, estime-t-il. C’est sûr que les gars étaient remboursés. »

À La Malbaie, où se tenait vendredi le caucus libéral, Philippe Couillard a affirmé qu’il n’était pas au courant que le Parti libéral détenait un dossier de financement au nom de Tony Accurso. Le chef libéral a donné l’assurance que le PLQ, comme dans le passé, remboursera toute contribution illégale si le Directeur général des élections l’exige. « Mais il faut que les choses soient avérées et établies », a-t-il dit.

Charest revanchard

Marc Bibeau exerçait par ailleurs une grande influence sur l’ancien premier ministre, Jean Charest. C’est lui qui a invité Tony Accurso à se joindre à lui et au futur premier ministre, « comme ça », pour un souper au restaurant, à une date inconnue.

Selon le témoin, Jean Charest voulait comprendre la structure de la FTQ et en apprendre davantage sur la personnalité de son président, Henri Massé, qui a occupé la fonction de 1998 à 2007.

Quoi qu’il en soit, Tony Accurso a minimisé l’importance de ses liens avec Jean Charest. « Je ne peux pas dire que je connais Jean Charest. Il n’est pas dans ma liste de contacts », a-t-il dit.

Sur des conversations d’écoute électronique, Tony Accurso décrit Jean Charest comme un homme revanchard. « Charest est très rancunier. Si tu l’attaques, il va se souvenir de toi et il va barrer ton bureau », dit M. Accurso à son ami Michel Arsenault.

Le témoin a précisé le fond de sa pensée. Les élus, toutes familles politiques confondues, peuvent « barrer » des contrats publics une entreprise si le coeur leur en dit.

Selon Tony Accurso, le monde des affaires a intérêt à « marcher droit ». S’il répondait aux demandes des partis, principalement le PLQ, ce n’était pas tant pour obtenir des contrats, mais pour ne pas en perdre. Son père, aussi entrepreneur, lui avait inculqué des leçons d’une grande sagesse en lui disant : « Ne demande pas à un politicien de t’aider. Demande-lui de ne pas te nuire. »

De 1998 à 2011, les entreprises et les personnes liées à Tony Accurso ont acheminé un total de 748 090 $ aux partis provinciaux (556 080 $ au PLQ, 154 185 $ au PQ et 37 825 $ à l’ADQ). C’est le coût de ses primes d’assurance, en quelque sorte. « On ne donne pas pour en obtenir [des contrats], on donne pour ne pas être exclu », a dit Tony Accurso.

Son témoignage reprendra lundi.


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