À un an du référendum en Écosse - Quelle comparaison avec le Québec?

À suivre de près

Dans exactement un an jour pour jour, les Écossais seront appelés à se prononcer, par voie de référendum, sur l’avenir politique de leur nation. La question référendaire qui leur sera posée le 18 septembre 2014 devrait, selon toute vraisemblance, être la suivante: «L’Écosse devrait-elle devenir un pays indépendant?» («Should Scotland be an independent country?»). À un an de la tenue de ce référendum, quel appui les Écossais semblent-ils vouloir donner à cette option? Et comment les Québécois se comporteraient-ils face à une question référendaire similaire? Pour étudier cette question, nous avons entrepris, avec deux autres collègues de l’Université d’Édimbourg, un projet comparatif de l’opinion des Écossais et des Québécois face à leur question nationale, par le biais de l’administration d’un questionnaire de sondage identique dans les deux nations, au même moment. Ces deux sondages ont été menés il y a un an, en septembre 2012, auprès d’échantillons représentatifs de 1500 individus environ. Nous avons demandé aux répondants écossais et québécois quelle serait leur intention de vote dans un référendum qui leur demanderait s’ils veulent que l’Écosse (le Québec) devienne un pays indépendant. La réponse des Écossais à cette question, pratiquement identique à celle qui leur sera posée dans un an, paraît sans équivoque: 62% nous ont indiqué avoir l’intention de voter NON dans un tel référendum. Ce niveau d’appui, mesuré il y a un an dans notre enquête, semble se confirmer dans la plupart des sondages médiatiques les plus récents, qui indiquent un appui actuel au NON se situant à l’intérieur d’une fourchette allant de 58 à 66% (enquêtes TNS BMRB, YouGov et Angus Reid d’août 2013). Bref, en un an, l’appui à l’indépendance de l’Écosse est demeuré stable, juste sous la barre des 40%. Au même moment où nous sondions les Écossais quant à leur indépendance politique, qu’ont répondu les individus de notre échantillon québécois à cette même question? Selon notre enquête, 60% des Québécois voteraient NON à une question référendaire du type de celle qui sera posée aux Écossais dans un an. C’est donc dire que malgré les différences politiques, économiques, institutionnelles et culturelles qui distinguent le Québec de l’Écosse, ces deux populations affichent présentement un niveau de soutien à l’option indépendantiste qui est très similaire: environ quatre individus sur dix y seraient favorables. L’exemple de la campagne référendaire québécoise de 1995 montre qu’il est possible pour le camp du OUI de combler un tel déficit dans l’opinion publique le temps des quelques semaines que dure une campagne. Et il reste encore une année complète avant le référendum de septembre 2014. Ceci étant dit, les enquêtes d’opinion, incluant la nôtre, suggèrent qu’à l’heure actuelle le vent paraît être légèrement de face pour les indépendantistes écossais. Que veulent les Écossais et les Québécois? Le débat sur la question nationale en Écosse a beaucoup tourné ces dernières années autour de la notion de «devolution max». L’option «devo max» vise à créer un rapport de force suffisamment grand dans la population pour permettre au parlement écossais de rapatrier un maximum de pouvoirs auprès du gouvernement central de Londres. Il s’agit là de l’option politique que le premier ministre de l’Écosse, Alex Salmond, a sérieusement envisagé, pendant un temps, de soumettre à la population au moment du référendum, par exemple par le biais d’une question à trois options. Il est fort possible, en effet, que l’idée d’avoir plus de pouvoirs obtienne davantage l’adhésion des Écossais, et des Québécois, que celle de devenir un pays indépendant. Nous avons posé la question à nos répondants. Environ 67% des Écossais appuieraient l’option «devo max» si la question référendaire portait uniquement sur cette idée. Ce niveau d’appui est identique à celui que nous observons chez les Québécois lorsqu’on leur demande s’ils voteraient en faveur de l’idée que «l’Assemblée nationale du Québec ait beaucoup plus de pouvoirs» (OUI à 67%). Avec une question référendaire à trois options, où les électeurs devraient choisir entre le statu quo, plus de pouvoirs ou l’indépendance, les résultats obtenus dans nos deux enquêtes sont tout aussi clairs: 27% seulement appuieraient l’option de l’indépendance, la même proportion en Écosse qu’au Québec. Environ 40% des Québécois opteraient plutôt pour plus de pouvoirs, tandis que 33% se satisferaient du statu quo. Les résultats sont un peu plus serrés en Écosse, où 36% appuieraient l’option «devo max» et 37% opteraient pour le statu quo. Et s’ils devaient, dans un référendum, choisir seulement entre plus de pouvoirs ou l’indépendance, 67% des Écossais et 69% des Québécois appuieraient la première option plutôt que la deuxième. Bref, les résultats comparatifs de notre enquête d’opinion sont clairs: malgré leurs différences, l’Écosse et le Québec constituent des nations qui aspirent toutes les deux à une plus grande autonomie sans nécessairement souhaiter devenir indépendantes. Mis devant les mêmes choix référendaires, les Écossais et les Québécois paraissent réagir de manière remarquablement similaire. La période de douze mois qui nous sépare du référendum sur l’indépendance de l’Écosse peut paraître bien longue pour y aller d’un pronostic. On a souvent dit, avec raison d’ailleurs, que quelques mois représentent une éternité en politique. Malgré tout, au vu des tendances de l’opinion publique en Écosse au cours des dernières décennies, il semble bien que la victoire des indépendantistes le 18 septembre 2014 paraît, pour le moment du moins, plutôt improbable.



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