Vers une langue commune

Un rhodésien, comme on en connaît par ici...

La proéminence du français est une anomalie disgracieuse [honteuse], soutient le sociologue Christie Davies. Nous devons travailler à supprimer cette langue aristocratique et obsolète, sinon nous ne réussirons au rêve de créer les États Unis d’Europe.
Si l’Europe doit devenir une fédération unie il est encore plus important d’avoir une seule langue commune que d’avoir une seule monnaie commune. Dans la Communauté Européenne, il y a plus de 20 langues différentes parlées au niveau des états-nations. Si elles servent toutes, les institutions européennes deviendront une Tour de Babel et nous serons écrasés en conséquence.
Vingt langues, cela signifie trois cent quatre-vingt traductions et autant de traducteurs pour tous les discours et tous les documents. Une langue commune est aussi nécessaire pour le Droit, qu’une monnaie pour le commerce et c’est le Droit qui établit la structure pour le commerce. De plus, la langue d’un pays est plus reliée à une défense bornée de l’identité nationale qu’à sa monnaie.
Il faut faire quelque chose pour réduire le nombre de langues en Europe. Trois langues c’est habituellement le plus qu’on peut s’attendre qu’une personne puisse apprendre, et il apparaît évident que ces trois langues sont l’anglais, l’espagnol et l’allemand. L’anglais est la seule langue vraiment mondiale et c’est une des langues nationales de pays influents tels l’Inde, les USA et l’Australie. Si un Japonais veut parler à un Javanais, ou un Israélien parler à un Norvégien, ils le feront en anglais. L’espagnol est la langue de d’une grande partie de l’Amérique latine et d’une proportion croissante des citoyens des USA. En fait, selon la tendance démographique actuelle, l’espagnol remplacera éventuellement la langue de Thomas Jefferson et de Jesse Jackson. L’allemand est la langue première de près de cent millions d’Européens et la langue seconde de nombre d’autres. La puissance de l’armée allemande, le pouvoir d’achat des touristes allemands et l’intraduisibilité de leurs noms abstraits ont mis les Allemands au cœur de l’Europe et de ce que c’est que d’être Européen.
Notre tâche la plus importante est d’éradiquer la langue française. C’est une anomalie disgracieuse qu’au vingt-et-unième siècle, que la langue française soit perçue comme une langue mondiale. En fait, c’était déjà une anomalie à l’époque de la Ligue des Nations. De nos jours, la langue française est peu parlée hors de la France. Il y a plus de gens sur terre qui parlent le portugais que le français. En Indochine, l’anglais est plus parlée que la langue des vaincus de Dien Bien Phu. La langue de Vichy s’efface en Syrie, tout comme celle de Georges Bidault en Algérie. À bien y penser, quel intérêt y a-t-il pour quelqu’un au Zaïre ou au Rouanda de parler le belgo-français cassé de Poirot. Le français est restreint à quelques poussières de sable du Sahara où les verges galloises ont autrefois aiguisé leurs griffes. La langue française a été vaincue à Fachoda.
Autrefois le français était la langue d’oppresseurs aristocratiques et des dirigeants de l’Europe de l’Europe orientale qui s’en servaient pour se distancer de leurs propres serfs et paysans. La langue française a depuis longtemps été remplacée par l’anglais et l’allemand, les langues de la science, de la technique, du commerce, en un mot de la modernité. Presque tous les journaux scientifiques et techniques sont publiés en anglais ; même aucun scientiste français veut que ses dernières recherches dorment dans l’obscurité de la langue française.
Même la faible continuation de l’usage du français en Grande Bretagne est un anachronisme snobinard. Sa seule fonction est de permettre à ses usagers de commander un repas dans un restaurant de luxe ; dans les restaurants italiens et chinois, fréquentés par la plèbe, le menu est traduit en anglais. Il est possible de voyages partout sur la planète hors la France et le Québec et il y aura toujours quelqu’un qui parle non seulement anglais, mais un excellent anglais, avec lequel on puisse parler. Il n’y a qu’en France où on se voit faire des efforts avec les sons grossiers d’une langue qui est un croisement entre Donald Duck et un ordinateur Apple obsolète qui vous a piégé dans une manœuvre illégale. Quand les français vous répondent, vous ne pouvez rien comprendre de ce qu’ils disent parce qu’ils baragouinent. C’est l’orwellien doubleplusgoodfrog-speaker [ intraduisible : super-franchouillard ? ] en action. Nous avons laissé notre voisin maladroit nous obliger à apprendre le français. En fait, ils ont banni tous les mots anglais de leur langue et aucune publicité en anglais est permise en France. Même les vieilles femmes françaises qui ont acquis un peu d’anglais commercial lorsque nos armées étaient là refusent maintenant de le parler.
C’est clairement une situation qui doit être inversée si des Etats-Unis d’Europe doivent être créés. Avec le temps, les peuples d’Europe vont éliminer la langue française tout comme la Politique agricole française commune. Mais, comme nous sommes le pays qui avons la langue mondiale, il nous incombe de montrer le chemin et de s’éloigner du français.
On devrait immédiatement cesser d’enseigner le français dans les écoles en vue d’élargir la zone sans langue française en Europe. Les Suédois ne parlent pas français, les Tchèques ne parlent pas français et les espagnols délaissent le français. Pourquoi se déranger pour le français. On devrait plutôt encourager les autres langues de France, le breton, le corse, l’alsacien, le basque et le flamand au dépends du français. Nous aurions alors un corpus de personnes qui pourraient ostensiblement utiliser ces langues pour humilier les monolingues français. Cela pourrait saper le monopole putatif et le statut et la réputation de la langue française dans son territoire domestique.
Ceux parmi nous qui parlent français devraient refuser de s’en servir en évitant de visiter la France et en insistant pour utiliser l’anglais, l’allemand et l’espagnol quand on leur parle français. Il faut surtout éviter de reconnaître la moindre connaissance de cette langue. Si par désespoir vous êtes obligés de parler français, alors ayez la décence de le mal parler. Un bon accent français est un signe de licence chez une femme et de féminisation chez l’homme. On doit la survie de notre pays a des gens qui nommaient Ypres « Wipers ». Essuyons le plancher avec les français. [ Ypres the floor with the French.  ] Ce serait sot de notre part de d’essayer d’éliminer de notre langue les mots français et les mots d’origine française, car notre langue nous vient de nombreuses sources, mais en riposte au boycott de l’anglais, nous devrions symboliquement éliminer certains mots de notre usage quotidien. Ce serait approprié s’il s’agissait de mots en rapport avec l’alimentation. Nous n’avons aucun besoin des mots café, restaurant, menu, coq au vin. Pourquoi pas « eatery ». « posh ». « foodlist » « sex in a transit ».
De tels sentiments et actions pourraient paraître chauvins mais ils pourraient être appliqués dialectiquement au service de l’unité européenne à laquelle la France est le plus grand obstacle. Si nous attisons les passions nationalistes pour éradiquer le Français, ce n’est pas nous sommes certains que l’anglais s’imposera comme la langue des Etats-Unis d’Europe. Nous savons que l’allemand ou l’espagnol pourraient être la langue qui survit. Demain, nous parlerons peut-être le castellan ou l’allemand. Mais aujourd’hui nous devons nous occuper du français.
Christie Davies est diplômé de Cambridge et professeur émérite, University of Reading.

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Christie Davies. Towards a Common Language, Varsity, No 701, p. 9; October 9, 2009
(varsity.co.uk).
Traduction par François Gauthier


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