Une "démocratie" à huis-clos..

Tribune libre

En huis-clos ou en terrain ennemi..

Au début il y eut une manifestation monstre dont le pacifisme fut acclamé à travers le monde ou presque, c'est à dire partout, sauf ici.. Les éloges pleuvaient et tous s'entendaient pour dire "Quel bel exemple de manifestation pacifique!". Et partout le "monstre" et la manifestation furent sacré chefs-d’œuvre, modèles et exemples à suivre. Partout, sauf ici en parti.

Ensuite, il y eut les abus: les casseurs à la solde de l’État Charest, le refus opiniâtre et obstiné de transiger et de s’assoir à la table de la démocratie, les faux fuyants facétieux, les mauvais jeux de mots, des grands journaux et des médias de masses outrés, vendus à la cause d'une démocratie malade, infiltrée, des matins mâtinés de Martineau (le king des enfants rois), des tentatives de divisions, une campagne de salissage, le bonnet d'âne à toute une classe, une génération brillante, courageuse, tenace. Ensuite il y eut un coup de théâtre, un piège à con, un semblant de négociations avec trois solitudes et un fantôme, la ratification d'un brouillard, une hausse au lieu d'une baisse, la démission du fantôme, un ministre des finances au bord des larmes parce que toujours en crise, le durcissement des taons des balles en caoutchouc, la disparitions de nos repères et pépères politiques, une loi matraque, la pertes d'oeils, de dents et de droits et libertés, l'apparition de nouveaux droits dont celui de respirer du poivre de Cayenne et des gaz lacrymogènes les yeux grands ouverts, la déconfiture d'une certaine trame sociale suivi d'une désagrégation exponentielle de chaudrons, de casseroles, de cuillères et de tympans.

Aujourd'hui, presque tous les québécois manifestent dans la rue; les autres travaillent pendant qu'ils en ont encore la chance ou étudient chez-eux entre deux manif, deux guerres de session, de cessation, de cassation ou de sécession, on ne le sait plus... D'autres sont devant leur télé, leur ordinateur ou prennent soins de leur enfants et donnent l'exemple à L'État Charest. Tous n'ont pas le temps de manifester mais ils manifestent et contribuent à leur façon.

Pour dire que le conflit qui oppose les étudiants aux confédérés néo-libéraux n’en est pas un uniquement contre la hausse des frais de scolarité mais une opposition contre quelque chose de beaucoup plus grave et pervers. Avec le temps on ne s'en rend même plus compte. On l'oubli, cela devient une habitude, un mode de gouvernance, un mode de vie. Les questions qui reviennent sont "Ils se battent contre qui et contre quoi au juste les manifestants?, le système?, la démocratie?, la corruption?.." Ou encore "Qu’est ce qu’ils veulent, des élections?, du cash?, du travail?, se faire justice?" Ou ben: "Aie!, dites moé pas qui veulent encore la séparation!?, la liberté ou pire, la gratuité!?!...".

Je vais vous le dire carré, pour une sortie de crise , ce qui est exigé en premier, c'est un changement radical dans la manière de nous gouverner et surtout de nous tenir informé. On ne dirige pas un pays ou un peuple comme on conduit un sous-marin ou"un chaud bizness". Ça prend plus que deux mains sur le volant, une moitié de cerveau et un agenda écrit en huis-clos. Ça va au-delà de l'image. Et l'image libérale vous savez... Et on ne brasse pas des affaires loin de la conscience, de l'intelligence et de la vigilance du peuple québécois. Désolé!, "Strikes three you're out!" c'est fini ces temps-là!. Désormais, mesdames et messieurs les élus populistes rien ne sera plus, politiquement et démocratiquement, pareil. Maintenant que le peuple est branché et que la génération 3.0 est arrivée, le temps des cachoteries tire à sa fin..

Le peuple québécois se réveille, il est au courant de ce qui se trame dans les coulisses. Le conflit nous aura appris une chose crucial sur cette façon de faire qui consiste littéralement à kidnapper des leaders, qu'ils soient étudiants ou autres, pour négocier avec eux à huis-clos. Mais la voilà votre maudite sortie de crise!, elle est là, sous vos yeux!. Parce que négocier à huis-clos ce n'est pas la bonne méthode, la bonne manière et ce n'est pas bon pour l'image. Charest le savait, il aura beau dire "je suis déçu" on y croit pas on y croit plus! Son plan est mort avec la vieille méthode de faire les choses. Une méthode qui n'inspirent pas vraiment confiances, qui s'apparentent plus au coup monté qu'à un véritable revirement de situation ou une quelconque sortie de crise. Cette fausse tentative de négociation ça sent le désespoir, le sauvetage de l'image qui prend le bord. Ça sent le Grand Prix de Montréal et le festivals juste pour rire à plein nez. Ça sent le masque à gaz, la temporisation et la malhonnêteté. À moins que ce ne soit un petit air estival de jazz, avant la rumba des arrestations ou la samba des privatisations toutes azimuts voir le carnaval des Mardis-Gras d'un capitalisme tout nu dans rue...

Admettons qu'à l'heure des communications instantanées le "huis-clos" c'est la manière antidémocratique par excellence de nous présenter les choses. C'est simple, ce que les gens demandent, c'est juste une démocratie saine de coeur, saine d'âme et d'esprit. Des représentants du peuple qui se cachent pour transiger ou débattre ou brasser des affaires n'est pas représentatif du peuple ou de la démocratie mais plutôt des ombres qui minent cette dernière. Et l'État Charest-Desmarais et leurs équipes d'élus-minés au Plan-Nord auront beau se targuer d’être les seuls et uniques représentants de cette "démocratie", ils auront beau se féliciter de s'être enfin assis à la table des négociations avec les représentant étudiants, ils ne pourront pas non plus, d'un autre côté, nier le fait qu'avant de s’y assoir ils ont surtout distribué: faux fuyants, menaces, campagne de média-mensonge, coups de matraques, loi spéciale et pour clore le tout, le coup du huis-clos, du secret des dieux, des polichinelles qui ont quelque chose à cacher.

Parce que le problème au fond, il est là, dans cette façon de faire. La vaste majorité du peuple et des étudiants n'ont rien vu et rien entendu de ce qui s'est transigé à huis-clos et le peuple veut voir, entendre et comprendre. Parce que, ce qui se dit et ce qui se trame dans notre dos et en notre nom concerne le peuple. Vous voulez que le peuple s'intéresse à la politique et quand il s'y intéresse vous transigez à huis-clos, vous vous cachez! Et ce n'est pas cette petite tentative de négociation - si belle ou profitable ou louable soit-elle - qui va sortir le Québec d'une quelconque crise. Ni la déconfiture de l'État Charest aux prochaines élections d'ailleurs!

En cette heure critique, je me dis pourquoi cacher à la nation québécoise des négociations qui la concerne? C'est aberrant ce manque de vision et de transparence surtout à l'heure des technologies nouvelles. Quand on pense que quelques caméras et quelques micros auraient suffit à nous tenir informer de la nature des transactions et des propos et à apaiser les doutes et les soupçons voir à rendre presque tout le monde heureux, je me dis qu'on est pas sorti du bois, ni de la crise d'ailleurs. Cette "rencontre" ce n'était tout de même pas un sommet du G-8!

Comme tant d'autres, moi, tout ce que je souhaite, tout ce que je demande à un quelconque gouvernement, c'est d’être transparent et ouvert aux revendications du peuple. Après tout, le boss c'est la démocratie et vu que la démocratie c'est le peuple et que le peuple est dans la rue, le boss en ce moment c'est la rue. Mais la rue intelligente et déterminé dans son pacifisme.

Une sortie de crise c'est pas la lune!. C'est juste une question d'honnêteté et d'intégrité. Parce que toute démocratie digne de ce nom exige à l'égard des peuples qu'elle représente une transparence totale sinon, c'est simple, ce n'est plus de la démocratie. Si demain l'ile de Montréal et le Grand Prix commencent à s'enfoncer dans les eaux du fleuve Saint-Laurent je veux le savoir tout de suite, maintenant!. Pas après le festival juste pour rire!. Mais non, comme d’habitude, on nous tient encore à l'écart de ce qui se transige en notre nom et celui des étudiants comme si nous étions les idiots d'un village ou une sous classe de citoyens quelconque.

Une grave erreur de jugement selon moi. Les leaders étudiants devront dorénavant exiger de transiger et de discuter sur un terrain qui n'est pas le huis-clos ou le privé, un terrain qui, de toute évidence, n'est pas le leur.. Parce que contrairement aux vieilles habitudes de l'État Charest, les leaders étudiants ont l'obligation et le devoir moral et minimal de retransmettre ce qui a été transigé à huis-clos, tandis que nos "élus-minés" eux...

Songez maintenant à tout ce qui ce transige à huis-clos, dans notre dos, avec certains chefs d'entreprises très influents. Pensez au Plan Nord et à tout le reste et vous aurez une petite idée de ce que cette façon de faire implique. Je le dis encore une fois; Les Québécois et les étudiants ne sont pas seulement et uniquement dans la rue pour manifester contre la hausses de frais de scolarité; ils y sont surtout pour une éventuelle sortie de crise. Après tout, ce ne sont pas les étudiants qui l'ont créé et alimenté cette crise, par contre, le rituel du "huis-clos" y est pour beaucoup...

D'après moi, pour sortir de cette crise il faut faire confiance au peuple et à son intelligence. Il faut aussi que cesse une fois pour toute cette façon de faire qui transige dans le plus grand des secrets; le "huis-clos", en plus d’être antidémocratique, va à l'encontre de cette intelligence collective. Le peuple québécois n'est pas con; il n'a pas perdu le nord mais l'État Charest, lui, par contre...

Nicodème Camarda
29 mai 2012


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2 commentaires

  • Nicodème Camarda Répondre

    2 juin 2012

    Merci monsieur Rolland c'est très apprécié. Nous nous rejoignons dans nos idées et j'ai confiance qu'un jour le changement arrivera, il est inévitable selon-moi. Cette crise n'est que la pointe de l'iceberg de la prise de conscience. Le reste viendra aussi surement que le soleil se couche et se lève... Merci encore!
    P.-S.
    Je vous retourne le compliment
    Vous êtes agréable à lire !
    Amitiés!

  • Archives de Vigile Répondre

    2 juin 2012

    Bonjour Nicodème,
    Très beau texte. Agréable à lire, qui suscite la réflexion. Vous parlez le langage de la raison, du bon sens, celui qui pourrait être tenu à des citoyens encore capables de penser. Vous dites :
    « …..ce qui est exigé en premier, c’est un changement radical dans la manière de nous gouverner et surtout de nous tenir informé….. »
    D'abord, parlons d’information. Tous les médias du Québec, incluant Le Devoir, sont au service de la bourgeoisie-capitaliste ou de ses gouvernements larbins. Ce sont ces médias qui contrôlent la pensée des gens. D’un autre côté, aucun changement radical ne se fera tant que nous vivrons sous la dictature du capital.
    « …..C’est simple, ce que les gens demandent, c’est juste une démocratie saine de coeur, saine d’âme et d’esprit. ….. »
    Vous avez raison. Le problème est que le capital, celui qui détient le contrôle des gouvernements, du parti au pouvoir aux plus importants partis d’opposition, pense le contraire.
    « …..Et ce n’est pas cette petite tentative de négociation - si belle ou profitable ou louable soit-elle - qui va sortir le Québec d’une quelconque crise. Ni la déconfiture de l’État Charest aux prochaines élections d’ailleurs !….. »
    Tout à fait d’accord avec vous !
    « …..Quand on pense que quelques caméras et quelques micros auraient suffit à nous tenir informer de la nature des transactions et des propos et à apaiser les doutes et les soupçons ….. »
    Ne comptez surtout pas sur ces larbins. Pensez-vous qu’un « commentateur » ou un « journaliste » aurait un emploi pour ces médias de propagande, s’il n’était pas ou insignifiant ou à tout le moins, corruptible ? Ils ne sont que des carriéristes qui gagnent leur pain à faire de la propagande.
    « …..Après tout, le boss c’est la démocratie et vu que la démocratie c’est le peuple et que le peuple est dans la rue, le boss en ce moment c’est la rue.….. »
    Oui ! la rue peut exercer un impact lorsqu’on vit en démocratie. Le problème est que nous sommes en dictature et que de pseudo élections nous donnent, comme dirait, je pense, Étienne Chouard, la possibilité de choisir nos dictateurs. Allez-vous être étonné de voir un des trois partis néolibéraux, PQ, PLQ ou CAQ prendre le pouvoir et l’opposition officielle aux prochaines pseudo élections, pendant que les larbins de la médiasserie, lors de leurs bulletins de nouvelles ou leurs brillantes analyses prétendront voir des différences majeures entre ces trois Dupond et Dupont…
    « …..pour sortir de cette crise il faut faire confiance au peuple et à son intelligence….. »
    Bien sûr, mais si on regardait un peu de quoi est fait le processus de la pensée… tout commence avec la collecte des données. Or, ceux qui ne sont plus des citoyens s’abreuvent de données pipées par la médiasserie. À partir de ce moment, la pensée est annihilée parce que les deux phases qui suivent, soient l’analyse et l’interprétation des données partent de prémisses fausses.
    Comme vous le dites vous-même, si je vous comprends bien, nous n’arriverons à rien par la voie électorale. Aucun des partis politiques existants ne nous conduira au véritable changement que vous appelez.
    La bourgeoisie-capitaliste est si puissante que, j’en ai bien peur, ce printemps québécois devenu international, n’aboutisse à rien d’autre qu’à des changements cosmétiques et permette à certains individus de se faire connaître afin de pouvoir faire carrière en pseudo politique.
    Cela dit, votre texte me fait du bien. Il me dit ce que nous pourrions être après avoir renversé par la force la dictature capitaliste et sa dictature médiatique.
    Michel Rolland