Un grand délire canadien

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« Comment ne pas voir que le multiculturalisme institutionnalise à travers le gouvernement des juges quelque chose qui s’approche de la tyrannie des minorités ? »


Même quand on croit qu’il s’est aventuré jusqu’aux extrêmes limites du délire, le multiculturalisme canadien peut toujours nous surprendre. Il vient encore d’en faire la preuve. Avant-hier, la Cour fédérale a ainsi invité le Directeur général des élections du Canada à penser modifier la date des élections d’octobre prochain.


Pour quelle raison ?


Parce qu’elle coïncide avec une fête juive, ce qui heurte apparemment les représentants d’une communauté très orthodoxe de Toronto, qui se sent pour cela discriminée. Pour la satisfaire, il faudrait donc imposer à l’ensemble des Canadiens un changement de calendrier politique.


Religion


Précisons tout de suite une chose : ceux qui demandent une telle modification ne représentent pas l’ensemble de la communauté juive. Au contraire. CIJA, l’organisation représentative officielle de la communauté juive, s’est opposée à ce qu’on modifie la date des élections.


Mais cela rend la décision de la Cour fédérale encore plus révélatrice. Il ne s’agit donc pas d’accommoder une communauté religieuse, mais bien la frange la plus radicale ou militante de celle-ci.


Ce n’est peut-être pas étonnant, néanmoins. Depuis plusieurs années, déjà, les critiques du multiculturalisme canadien ont fait remarquer qu’il s’ouvrait moins à la diversité des communautés ethniques et religieuses composant le Canada qu’il ne favorise les tendances les plus radicales de celles-ci. C’est ce qui le pousse à s’ouvrir au niqab, par exemple.


En gros, l’immense majorité des citoyens accepte les règles communes de la démocratie canadienne. Qu’ils soient catholiques, protestants, orthodoxes, juifs, musulmans, bouddhistes (et j’oublie bien des religions) ou athées, ils ne cherchent pas à imposer leurs préférences religieuses ou identitaires particulières à l’ensemble de la société.


Appelons ça le savoir-vivre démocratique.








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Mais le multiculturalisme canadien ne s’intéresse pas à eux. Il privilégie systématiquement les radicaux au sein de chaque communauté et les transforme en interlocuteurs publics, en plus d’avoir la mauvaise habitude de se soumettre à leurs caprices qu’il confond avec le respect de leurs droits fondamentaux.


C’est ainsi qu’on en arrive à une société de plus en plus éclatée où chacun s’enferme dans sa différence sans embrasser la collectivité.


Comment ne pas voir que le multiculturalisme institutionnalise à travers le gouvernement des juges quelque chose qui s’approche de la tyrannie des minorités ? Comment ne pas voir qu’il suscite aussi des tensions identitaires, dans la mesure où l’immense majorité se sent heurtée par les privilèges consentis à ces minorités radicales qui refusent de participer au monde commun et de faire des compromis avec ceux qui ne partagent pas leurs croyances ?


Multiculturalisme


Quelle que soit la décision du DGE, il n’en demeure pas moins que le simple fait qu’on ait pu envisager pendant quelques heures, voire pendant quelques jours de modifier la date des élections pour satisfaire une frange marginale d’une communauté religieuse en dit beaucoup sur la logique qui commande le Canada.


Le DGE ne reportera probablement pas les élections. Du moins, espérons-le. Mais c’était odieux de voir les tribunaux le lui demander.