L’administration Trump vient de répudier la position juridique américaine adoptée en 1978 selon laquelle les colonies de peuplement israéliennes en Cisjordanie occupée violent le droit international. Aussi récemment qu'en 2016, l'administration Obama a autorisé l'adoption d'une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies condamnant les colonies de peuplement juives en territoires palestiniens occupés.
Pratiquement toute la planète s'oppose à l'occupation de la Palestine par Israël. La quatrième Convention de Genève interdit en effet à une puissance militaire de transférer sa propre population en territoire conquis. Depuis la guerre des Six Jours de 1967, Israël a établi 650 000 colons juifs en Cisjordanie, à Jérusalem-Est et dans le Golan syrien.
La nouvelle et incroyable position américaine est que le droit international ne fait pas avancer la cause de la paix et doit donc être ignoré dans les cas des territoires occupés par Israël. Les États-Unis considèrent que la Cisjordanie n’est ni un territoire souverain ni un territoire occupé, en disant simplement qu'elle est sous la juridiction des tribunaux israéliens.
En se rangeant du côté de l'extrême droite israélienne, l’administration Trump fait un nouveau bras d’honneur à la communauté internationale. Ça s’ajoute au déplacement de l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem reconnue par Washington comme la capitale d’Israël et à la reconnaissance de l’annexion par Israël des hauteurs du Golan, conquis à la Syrie en 1967.
Le professeur de droit canadien Michael Lynk, rapporteur spécial sur les questions palestiniennes du Conseil des droits de l'homme des Nations unies affirme qu'en agissant ainsi les États-Unis ont mis le dernier clou dans le cercueil de la solution des deux États indépendants, israélien et palestinien, vivant côte à côte.
Le Pr Lynk affirme : «cela donne effectivement la permission au gouvernement israélien d'annexer officiellement de grandes parties de la Cisjordanie occupée. Cela ne fera que confirmer la réalité d'un État caractérisé par un système rigide à deux niveaux de droits juridiques et politiques, fondé sur l'appartenance ethnique et la religion». Lynk ajoute : «cela correspondrait à la définition internationale de l'apartheid».
Ce que Nethanyahu semble envisager ressemble à une série de bantoustans comme ceux que les colons blancs avaient créés pour parquer les Noirs d’Afrique du Sud à l’époque de l’apartheid. En 2006, l’ancien président et prix Nobel de la paix, Jimmy Carter, a été accusé d’antisémitisme pour avoir publié un livre dans lequel il comparait la politique israélienne dans les territoires occupés avec celle de l’Afrique du Sud au temps de l’apartheid.
Pourquoi Trump a-t-il maintenant décidé de prendre cette initiative réclamée par l’extrême-droite israélienne? Il se pourrait que Nethanyahu ou un des principaux donateurs pro-israéliens de Trump comme Sheldon Adelson l’ait convaincu de donner au premier ministre israélien quelque chose dont il pourrait se vanter lors de la nouvelle campagne électorale qui s’annonce.
Le fait incontournable est que les projections démographiques indiquent que d’ici quelques décennies, les musulmans vont être plus nombreux que les juifs entre la Méditerranée et le Jourdain, territoire qui englobe Israël, la Cisjordanie et Gaza. Ils sont déjà presque à parité.
Deux populations hostiles peuvent-elles coexister pacifiquement dans un enchevêtrement d’enclaves, de colonies et de juridictions? Cela m’apparaît impossible.
Mais la création de deux États indépendants viables est également difficile à concevoir. Elle impliquerait d’importants transferts de population, irréalisables compte tenu des animosités interethniques. Et jamais les colons juifs de Cisjordanie ne vont accepter de rentrer en Israël sans y être contraints par la force.
Loin de s’atténuer, ces problèmes vont s’accentuer avec l’explosion démographique des Palestiniens.
Le soutien massif et inconditionnel des États-Unis à Israël, qu’ils défendent comme s’il s’agissait du 51e État de l’Union, va rendre de plus en plus difficile à leurs alliés musulmans de maintenir des relations étroites avec eux : les opinions publiques des 57 pays musulmans sont un tsunami refoulé de haine et de ressentiment envers les Américains qui ne pourra pas toujours être contenus. Ils sont déjà à l’origine de l’État islamique et d’Al-Qaïda.