Six Fours - Commémoration du 18 juin

Souvenirs du général de Gaulle avec son aide de camp l'amiral Flohic

De Gaulle - « Vive le Québec libre ! » - l'Appel du 18 juin 1940


Le 18 juin 1940, le jeune François Flohic, à bord d'un bateau pilote partait vers l'Angleterre. Le lendemain, il découvrait l'appel du général de Gaulle. Loin de lui alors la pensée d'être un jour aussi près du futur Président de la République.
Pour cet anniversaire de l'Appel du 18 juin, l'amiral Flohic sera à Londres. En attendant le départ, entouré de ses tableaux, il nous a reçu dans sa maison du Brusc.
Pour cet anniversaire de l'Appel du 18 juin, l'amiral Flohic sera à Londres. En attendant le départ, entouré de ses tableaux, il nous a reçu dans sa maison du Brusc.
Dans sa maison d'un cossu lotissement du Brusc, l'amiral François Flohic, portant remarquablement ses 90 ans, passe son temps à lire, écrire et peindre. Pendant des années cet homme à la stature impressionnante a été aide de camp du général de Gaulle, Président de la République. Il a été de tous les voyages, même lors du départ à Baden-Baden, puis durant le long séjour en Irlande.
Le 18 juin, pour le soixante-dixième anniversaire de l'Appel du général de Gaulle, il prendra le train spécial au départ de Paris, en compagnie du secrétaire d'État Hubert Falco, pour se rendre à Londres et assister à la cérémonie à laquelle participera le Président de la République. Pour lui ce sera « un moment de grande émotion ».
Le rêve de la marine marchande
En 1940, il avait 19 ans et se souvient : « Je n'ai pas entendu l'Appel car j'ai quitté Paimpol le 18 juin au soir pour Falmouth, et c'est en arrivant que j'ai appris par la presse qu'un général français avait appelé à la résistance. Le 17 juin, lorsque Pétain a déclaré « c'est le cœur serré qu'il faut cesser le combat », avec l'accord de mes parents, j'ai décidé de partir en Angleterre. Le 18, les allemands étaient à 30 kilomètres de chez nous ».
François Flohic en 39-40 était élève à l'école de navigation maritime de Paimpol et il précise bien : « on n'était pas des fayots dans ma famille. Mon idéal était de commander le Normandie. Je voulais vraiment être capitaine au long cours. » Cette école a joué un grand rôle car plusieurs de ses élèves sont devenus aspirants de marine dans la France libre.
Il avait voulu s'engager, mais un capitaine de vaisseau en retraite lui avait dit : « Vas donc à l'école, on a mobilisé une quantité de gens, c'est une guerre industrielle et on va devoir les renvoyer dans leurs foyers. Attends qu'on t'appelle ».
Le jeune François n'attendra pas d'être appelé officiellement. Il va se retrouver à bord de l'Albert Faroult, bateau pilote de la basse-Seine. « On aurait pu évacuer toute l'école - c'était le souhait de l'amiral Lecoq - mais l'inspecteur des affaires maritimes s'y est opposé. On aurait dû le foutre dans le bassin. On était trop respectueux de la hiérarchie militaire et on ne dira pas assez de mal de lui. Des camarades sont partis le 19 à bord d'une goélette et les autres ont attendu deux ans avant de rejoindre l'Angleterre. »
La première rencontre avec de Gaulle
Il attendra le 4 juillet pour rencontrer le général de Gaulle et il rectifie : « Je ne l'ai pas rencontré, mais je l'ai vu lorsqu'il est venu inspecter à l'Olympia-hall de Londres le rassemblement de tous les français volontaires ; les marins ont été envoyés à un cours d'officiers à bord du Courbet qui avait été pris par les anglais et était dans un état lamentable. Après une formation, je me suis retrouvé sur l'aviso La Moqueuse qui était parti sans moteur de Lorient et à été achevé en Angleterre.
Un passage du général au Brusc
Après la guerre et une carrière dans la marine, les rêves de capitaine au long cours sont bien loin... En 59, François Flohic se retrouve subitement promu pour deux ans aide de camp du général de Gaulle.
« Le Général m'a engagé après une brève rencontre à Matignon. C'était la troisième fois que je le voyais. La première à mon arrivée à Londres, puis à Plymouth en septembre 1940 et une troisième fois en écosse en 1943. » François Flohic, alors devenu amiral allait finalement se consacrer à cette tâche jusqu'en 1963.
En 1960, le général De Gaulle a fait un passage au Brusc. Il avait perdu son frère Pierre, et il s'était rendu à l'abbaye de La Celle pour se recueillir. A la question, « Avez vous une photo de son passage au Brusc ? » où il avait tenu à venir pour saluer Colette, l'épouse de François Flohic, la réponse est nette : « Vous pensez bien que je ne prenais pas de photos ».
Puis, de 1965 à 1969, c'était un nouveau contrat avec le Général. Et l'aide de camp se souvient : « Je savais qu'il avait une mauvaise montre et lorsque je voulais introduire un visiteur dans son bureau, invariablement il me lançait « ce n'est pas l'heure. Je vous sonnerai ». Un jour, je me suis planté au garde-à-vous devant lui et je lui ai dit « Mon général, il est exactement l'heure et je viens de la prendre à l'horloge parlante. Ses lunettes lui sont tombées du nez! Il m'a regardé, a réfléchi un instant et il m'a dit: "faites le entrer". En fait, j'ai été prisonnier de mon personnage pendant toutes mes fonction d'aide de camp. Il se confiait à moi pour son emploi du temps et ses voyages. L'avantage que j'avais, c'est que j'étais Français libre, il y avait un certain rapport psychologique entre nous. »
L'Élysée d'alors...
Continuant d'écrire, l'amiral Flohic vient d'envoyer les épreuves de « De Gaulle intime » et la vie à l'Élysée y est naturellement évoquée.
« Nous étions peu nombreux , il y avait notamment un attaché de presse à l'Élysée et il avait pour tâche de renseigner les journalistes. Le général n'était pas un homme à réunir du monde tous les matins pour parler. Il était un militaire qui travaillait sur dossiers et rapports. Et je dois dire que les conseillers techniques n'étaient qu'une dizaine et de grande qualité. Ils voyaient rarement le général. Il envoyaient des notes et ne voyaient que la mention « vu ». Quelquefois, ils étaient convoqués pour apporter des éléments complémentaires. C'était un fonctionnement d'état-major militaire. Aujourd'hui, je trouve qu'il y a une certaine inflation et un certain désordre dans le fonctionnement de la République même si ça c'est un peu arrangé ces temps-ci. »
Chaque matin, l'amiral Flohic écrit « Les chroniques de la fin » : « Je note mes idées sur ce qui se passe actuellement. Mais ce ne sera pas publié. » L'homme qui a dû être détenteur de bien des secrets continue à avoir un droit de réserve, mais on sent qu'il ne semble pas trop apprécier la gestion actuelle de l'État.
L'attentat manqué du Mont Faron
Au cours de cet entretien, on ne pouvait pas ne pas parler de la haine suscitée par le Président de la République au point de vouloir attenter à sa vie à plusieurs reprises. La première fois, c'est le 8 septembre 1961 à Pont-sur-Seine (département de l'Aube). Des explosifs ont été placés dans un tas de sable. L'homme du 18 juin dira : « Ce n'est pas un attentat. C'est tout juste une mauvaise plaisanterie ». Le 22 août 1962, c'est l'attentat du Petit-Clamart. La DS est mitraillée et c'est miracle que personne ne soit blessé. Son commentaire : « Cette fois c’était tangent… Ces gens-là tirent comme des cochons. » Les auteurs sont arrêtés rapidement, Le 11 mars, à 6 h 39, une salve retentit au Fort d'Ivry. L'instigateur de l'attentat, le lieutenant-colonel Bastien-Thiry vient d'être fusillé.
Le 15 juin 1964, on fête le vingtième anniversaire du débarquement en Provence. Pour cette cérémonie et l'inauguration du Mémorial, le général était présent au Mont Faron. Huit pains de TNT avait été déposées dans une jarre mais le système de mise à feu à distance n'a pas fonctionné.
L'amiral n'était plus aide de camp. Il avait repris le commandement d'une unité : Le Labourdonnais. Pour lui, cette attentat « aurait fait au moins deux cents morts ». Ce soir là, c'est la seule fois où le général a dormi à Brégançon car Il n'aimait pas profiter des résidences présidentielles.
En janvier 1968, le général reviendra à Toulon pour assister à l'hommage aux 54 sous-mariniers disparus le 27 janvier à bord de La Minerve. Toute la ville était bouleversée par ce drame et pour la cérémonie prévue sur la place d'Armes – c'était un immense parking inorganisé - il fut mis en place un service d'ordre impressionnant: 2.000 gendarmes, C.R.S., gardiens, inspecteurs avaient investi la ville. Ils contrôlaient et surveillaient fenêtres, toits et recoins : l'attentat manqué du Mont Faron était resté dans les mémoires...
Les conséquences de l'Appel
Enfin, en cette date anniversaire, on peut se demander quelles ont été les conséquences de l'Appel du 18 juin. Il y a eu les conséquences directes qui ont chamboulé les suites de la guerre. Mais, pour l'amiral Flohic, « c'est d'abord ce message d'espoir aux Français prostrés et abattus par cette défaite; un élément considérable de notre histoire car il a eu des conséquences immédiates très importantes puisque nous avons été à la table des vainqueurs ; d'autre part nous avons été acteurs de l'occupation en Allemagne et nous avons été parmi les cinq pays membres permanents du Conseil de sécurité. Enfin, s'il n'y avait pas eu de Gaulle et son prestige, on n'aurait jamais changé la constitution. On serait encore en IVème République. »
« Ce 18 juin va être célébré en grande pompe. Je m'interroge sur la ferveur populaire du 18 juin qui est célébré dans presque toutes les communes. Est-ce que ça ne traduit pas le sentiment diffus des Français qui en célébrant cet appel, veulent témoigner pour conserver leur spécificité dans ce monde en transformation. C'est un peu ce que je vois. » Sur ces paroles l'amiral reste pensif et préfère se mettre à parler de sa passion pour la peinture et de son rêve d'exposer à la Maison du Patrimoine.
Paul Chambras, le 17 juin 2010
Autres photos:

A partir d'aujourd'hui jeudi 17 juin et jusqu'à mardi, à la salle Scrantino le Club varois du 18 juin présente avec le Club des bibliophiles,une exposition sur la vie et l'œuvre de Charles de Gaulle.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé