Sondage CROP/La Presse: quand décembre revient...

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Traitement très discret du dernier sondage CROP dans La Presse, et pour cause !

Quand décembre revient... les gouvernements sont bien souvent impopulaires. Avec sa longue liste de réformes, des décisions qui, à y regarder de près, deviennent bien vite des coupes de services et de dépenses, le gouvernement Couillard s'est inscrit dans cette sombre tradition du décembre noir.

La dernière photo de l'année de la maison CROP va dans ce sens. Un coup d'oeil rapide laisse croire que le gouvernement a traversé sans trop de difficulté un automne particulièrement difficile. La satisfaction à l'endroit du gouvernement reste à 38% en décembre, le même taux que le mois précédent, même si Québec a empilé les décisions difficiles.
Le contingent des mécontents reste costaud: ils étaient 58% quand, entre le 10 et le 15 décembre, la photo des 1000 internautes a été prise. Déjà, le projet de Québec de geler les salaires et de réduire les conditions de travail de ses employés était connu.
Mais quand on y regarde de plus près, on constate qu'à force de fédérer les groupes contre lui, le gouvernement libéral se prépare des jours difficiles. La proportion des gens qui se dépeignent comme «très insatisfaits» grimpe singulièrement. Encore ce mois-ci, on est passé de 23 à 30%. Ils étaient 18% en octobre. «Les gens sont choqués», résume Youri Rivest, le spécialiste de CROP. Les dommages collatéraux sont importants: ces «très insatisfaits», ce sont les fonctionnaires, qui n'hésiteront pas à descendre dans la rue pour se joindre aux cohortes des mécontents déjà bien pourvues. Le «très insatisfait», c'est aussi ce beau-frère qui, autour de la dinde la semaine prochaine, servira une volée de bois vert au gouvernement, orientant l'opinion de toute la tablée, moins politisée.
Un ciel qui s'obscurcit en fin d'année pour le gouvernement du Québec; la situation a des airs de déjà-vu, à première vue justement. À l'automne 2003, le gouvernement Charest avait encaissé une chute «spectaculaire» en décembre, disait-on alors, les insatisfaits passant subitement en un mois de 49 à 60% des répondants. Élu au printemps, Jean Charest avait terminé l'année parlementaire avec une dizaine de bâillons pour faire adopter des lois impopulaires, dont un amendement controversé au Code du travail, l'article 45, visant à favoriser la sous-traitance. Les syndicats étaient sur les dents, et les clôtures destinées à endiguer les manifestants avaient été installées en permanence devant l'Assemblée nationale. Le projet de «réingénierie» du gouvernement était encore bien théorique, et l'opération s'est finalement soldée en queue de poisson, la saveur du mois étant les PPP, une autre source d'angoisse pour les partisans d'une présence soutenue de l'État.
Mais on peut décrire les acteurs montés sur la scène et les ingrédients de la grogne, le contexte était bien différent. Le gouvernement n'avait pas à jongler pour juguler le déficit qui était à zéro depuis cinq ans déjà. La dette restait immense, mais elle était moins importante qu'actuellement par rapport à l'ensemble de l'économie - on atteindra 55% l'an prochain, un sommet historique.
Cette année, le mécontentement est plus profondément enraciné. Les Québécois ont eu cette semaine la confirmation de ce qu'ils sentent depuis longtemps sans pouvoir l'identifier clairement; l'Institut de la statistique a confirmé que leur pouvoir d'achat a diminué en 2013. La hausse des prix a été supérieure à celle des revenus. Le Québec est dans le peloton de queue parmi les provinces au Canada. La situation était bien moins difficile en 2003, l'économie américaine n'ayant pas encore subi le coup de frein de la crise du secteur financier.
Autre gouvernement, autre décembre noir. En 1997, le gouvernement Bouchard avait connu une fin d'année difficile. Même la cote personnelle du chef péquiste avait piqué du nez alors qu'on ne retrouvait que 40% de citoyens satisfaits de leur gouvernement et que 53% étaient d'avis contraire. Le gouvernement avait dû prendre des décisions difficiles pour casser la spirale des déficits. On avait même fermé symboliquement des délégations du Québec et imposé une compression de 6% à la masse salariale de la fonction publique. Mais à l'époque, les syndicats avaient emboîté le pas au gouvernement péquiste - seul Gérald Larose de la CSN avait eu des états d'âme après s'être engagé à appuyer Québec.
Bien sûr, les sondeurs diront que Philippe Couillard n'est pas menacé. Mais bien que sa cote personnelle ait augmenté en décembre alors que de 21 à 24% de la population le perçoivent comme le meilleur chef pour occuper la fonction de premier ministre, on constate une lente descente depuis son élection, en avril dernier. Les libéraux peuvent toujours compter sur leur «fonds de commerce», soit 35% des électeurs qui voteront libéral, mais des élections cette semaine auraient fait glisser le Québec vers un gouvernement minoritaire, une première depuis le retour au pouvoir du PLQ.
Intentions de vote
Le sondage CROP réalisé du 10 au 15 décembre derniers constate que le PLQ aurait obtenu 35% des suffrages si des élections avaient eu lieu cette semaine, un recul d'un point sur le mois précédent. Même sans chef, le PQ récolte 5 points de plus, passant de 23 à 28%, son plus haut score depuis les dernières élections. La course à la direction du parti aura contribué à maintenir l'attention sur le parti, explique Youri Rivest, vice-président de CROP. La CAQ prend 3 points de novembre à décembre, à 27%, un recul depuis son sommet de septembre, qui était de 30%. Québec solidaire n'a pas fait bonne figure au cours des dernières semaines, passant de 14 à 10% des intentions de vote, son niveau habituel au printemps dernier.
Satisfaction
La satisfaction à l'endroit du gouvernement Couillard n'a pas bronché; elle se maintient à 38% en décembre. Les «insatisfaits» atteignent désormais 58%, une hausse minime de 1 point sur le mois précédent, mais on rejoint les niveaux de mécontentement qu'encaissait le gouvernement Marois juste avant les dernières élections générales.
Couillard talonné par Legault
Des trois chefs de partis principaux, Philippe Couillard reste celui qui est perçu comme le meilleur premier ministre, une lecture rendue un peu floue par l'absence de chef au PQ. M. Couillard est vu comme le meilleur par 24% des électeurs, une augmentation de 3 points sur novembre. On constate une lente descente toutefois depuis son record de 35% au lendemain des dernières élections, observe M. Rivest. François Legault, 2 points derrière Philippe Couillard à 22%, connaît une hausse de 3 points par rapport au mois de novembre. Mais il retrouve son niveau de popularité des semaines qui ont suivi les dernières élections - sa cote personnelle avait connu un sommet en juin avec un taux de 27%.


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