L'émoi qu'a suscité la possibilité d'un retour de la Charte des valeurs au congrès du Comité national des jeunes du Parti québécois ainsi que le rejet par les membres présents d'une proposition visant à renforcer la Loi 101 est symptomatique d'un certain nombre de reculs et de renoncements qui ont eu cours depuis la défaite d'avril 2014.
Il est, en effet, désolant et désemparant de constater qu'en si peu de temps, la position portée par le gouvernement Marois sur les signes religieux soit devenue marginale, du moins auprès des jeunes du parti dont je suis. L'ensemble des partis politiques québécois peuvent bien délaisser le projet porté par Bernard Drainville, j'attends encore qu'on m'explique en quoi demander aux employés de l'État d'afficher une neutralité religieuse avait quoi que ce soit de radical. J'attends encore qu'on m'explique pourquoi une proposition appuyée par près de la moitié des Québécois à l'automne 2013 est considérée comme étant source de divisions. J'attends encore qu'on m'explique pourquoi nous devrions nous laisser accoler des étiquettes diffamatoires par la gauche «inclusive» et la droite affairiste au point de se réapproprier leur discours culpabilisateur et repentant. Réaffirmer fortement les principes de la laïcité est un geste incontournable pour contrer les effets néfastes du multiculturalisme sur la cohérence et l'unité nationale, sans lesquelles il ne peut y avoir de projet collectif et sans lesquelles l'indépendance devient impossible.
Suivant la même logique, le Parti québécois ne doit reculer devant aucune occasion qui se présente à lui de défendre le statut du français comme langue commune. Ça passe évidemment par les propositions formulées par le nouveau chef et leur bonification, mais aussi par l'exemplarité. Ça implique que le grand parti historique qu'est le PQ ne s'adresse pas à ses concitoyens dans une autre langue que celle censée être partagée par tous. D'ailleurs, il est franchement lassant de voir l'ensemble de la classe politique québécoise se précipiter dans le ravin du clientélisme en interpellant les uns et les autres selon leurs particularités culturelles. Pour des souverainistes, ce clientélisme devrait nous être d'autant plus irritant que notre projet politique ne consiste pas à additionner ou à soustraire des clientèles électorales, mais bien à faire marcher vers la liberté une nation qui n'est ni un ramassis de communautés, ni un regroupement d'identités particulières.
Derrière ces tergiversations sur des sujets pourtant cruciaux règne le spectre de Québec solidaire. L'effort de convergence semble être l'une des causes de ces différents renoncements tranquilles, puisque rapprochement politique rime inévitablement avec rapprochement idéologique et que le PQ semble bien décidé à tout faire pour conclure une alliance quelconque avec ce parti.
Toutefois, à un certain point sur son «chemin des victoires», le PQ devra se demander s'il n'a pas de vocation plus grande que celle de s'acoquiner avec un parti radicalement campé à gauche dans l'objectif de faire des gains électoraux pour le moins incertains, alors que le PQ doit rassembler les Québécois de divers horizons en vue de réaliser l'objectif national. Il doit urgemment accepter de porter sans complexe les nouveaux combats du nationalisme québécois, sans quoi il ne pourra plus prétendre être le foyer de ceux qui les portent. Chose certaine, les prochains mois seront déterminants. Comme l'a déjà si bien dit cet homme politique exemplaire que fut Paul-Émile Lamarche: «Secouons nos ailes et élevons-nous. Nous sommes déjà en retard.»
Jeremy Normand
18 ans
Trois-Rivières
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