Sapir met en émoi le poulailler d’acajou

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Quand l'inacceptable devient souhaitable

Souvenons-nous de cette chanson d’Alain Souchon qui décrit le caquètement de « la volaille qui fait l’opinion » depuis son « poulailler d’acajou ». L’artiste y met en scène « les belles basses-cours à bijoux » aux idées convenues. En bon artiste qu’il est, Souchon fait mine de croire que cette volaille est conservatrice. Ce n’était déjà plus tellement vrai en 1977, l’année où il composa sa chanson, mais aujourd’hui, cette volaille est pratiquement à 100 % membre de la gauche libérale sociétale pédante qu’incarne si bien Daniel Cohn-Bendit.


Depuis une semaine, le poulailler d’acajou est en émoi. Ça caquette et ça cancane à n’en plus finir dans les salons parisiens. Pensez : l’économiste, un temps proche du Front de gauche et qui s’affirme toujours « sans ambiguïté de gauche », Jacques Sapir a proposé à moyen terme la formation d’un « Front de libération nationale anti-euro » englobant tous les partis souverainistes jusqu’au Front national, ou d’un « parti issu du FN ». La grande et la petite bourgeoisie de rédaction s’en étrangle aussi bien à gauche qu’à droite des forces de l’axe européomondialiste.


Là où Le Monde parle des « œillades de Jacques Sapir au FN », Challenges le présente comme l’économiste qui « drague le FN » et « qui se vautre dans la fange ». Pour le délicat Maurice Szafran, cela confirme ni plus ni moins « la règle qui veut que la pourriture devient prégnante dès lors que l’on s’approche de l’extrême droite ». « Extrêême drouâte, extrêême drouâte, extrêême drouâte », entend-on jacasser dans tous les recoins du poulailler, lequel fantasme même au sujet d’une prétendue rencontre secrète entre l’économiste et Marine Le Pen. Sapir, qui s’en défend, reproche au passage aux bonnes âmes de la gauche bien-pensante « leurs cris d’orfraie », ce qui est, somme toute, fort aimable. L’orfraie est, en effet, un oiseau de proie alors que nous n’avons affaire, là, qu’à de la volaille de batterie nourrie au bon grain américain ou bruxellois.


Ne soyons pas trop durs, quand même, avec « les belles basses-cours à bijoux ». L’époque est difficile pour elles. La réalité écrase une à une toutes leurs certitudes. À droite comme à gauche, les défections s’accumulent et si même l’Église catholique commence à convier des figures du FN à ses universités d’été, le bourgeois et la bourgeoise post-soixante-huitards n’ont pas fini de sentir vibrer le balai qu’ils ont dans le fondement. C’est cette vibration qui provoque le caquètement.



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