Notre langue va très mal, surtout à Montréal.
Une partie du problème tient à ce que le reste du Québec ne le réalise pas. Pour lui, c’est une lointaine « patente » montréalaise.
Une autre partie du problème tient à ce qu’un segment important de nos élites travaille activement contre le fait français.
Notre patronat plaide pour des hausses absurdes de l’immigration, alors que nous peinons déjà à intégrer le volume actuel.
L’approvisionnement en main-d’œuvre bon marché est son unique préoccupation.
Un proche me disait que le problème n’est pas de faire des affaires. Le problème, c’est quand tout devient une affaire.
Courant
Encore une autre partie du problème tient à la démission de beaucoup de Québécois francophones.
C’est fatigant de se battre contre le courant de la rivière, alors on dissimulera le renoncement derrière l’« ouverture » et le « réalisme ».
Mais il se pourrait – je dis prudemment : il se pourrait – qu’une mobilisation inattendue soit en train de se produire.
Le déclencheur pourrait être la progression délirante et documentée du cégep en anglais dans un contexte où, pourtant, le nombre d’anglophones de naissance baisse depuis longtemps au Québec.
Dans Le Devoir d’hier, une longue liste d’enseignants, surtout de niveau collégial, sonne l’alarme.
Essentiellement, dès que la loi 101 cesse de s’appliquer, francophones et allophones se ruent vers les cégeps anglais, qui débordent, alors que les cégeps francophones vivent une hémorragie.
Que font alors, en désespoir de cause, les cégeps francophones ?
Ils anglicisent leur offre afin d’essayer de séduire des étudiants désormais qualifiés de « clientèles ».
Cet ubuesque campus anglophone, en plein Montréal, du cégep de Gaspé (!) et ce projet de cégep bilingue à Vaudreuil ne sont, disent les signataires, « que la pointe de l’iceberg ».
Ils écrivent :
« On sait pourtant depuis longtemps que le bilinguisme institutionnel est un cul-de-sac. L’anglais et le français ne peuvent pas cohabiter durablement à l’intérieur d’un même établissement. L’anglais est la langue la plus attractive au monde, tandis que le français est, en Amérique du Nord, une “fleur de serre”, comme disait André Laurendeau. Le rapport de force est trop inégal. La bilinguisation du réseau postsecondaire sur l’île de Montréal ne pourrait donc bien être que le prélude à son anglicisation pure et simple. »
Debout !
Il faut ici appuyer sur le bouton pause et expliquer, pour la dix millionième fois, que le bilinguisme institutionnel et le bilinguisme individuel sont deux enjeux distincts.
Il est bon, normal et même nécessaire qu’un Québécois francophone parle anglais. Trouvez-moi un seul francophone intelligent qui pense le contraire.
Et il est aberrant qu’après 11 années d’école primaire et secondaire, un francophone ressente le besoin d’aller dans un cégep anglophone pour apprendre une langue qu’il devrait déjà savoir.
Le bilinguisme institutionnel, c’est quand on prétend faire cohabiter deux langues dans une même institution.
Entre le français et l’anglais, devinez laquelle finira inexorablement par marginaliser l’autre.
Le moment est venu d’une grande et puissante remobilisation nationale en faveur de notre langue... avant qu’il ne soit trop tard.