Rencontre de Lévis - Une certaine sagesse

Jean Charest a finalement opté pour une consultation large sur les défis qui attendent le Québec à plus long terme.

Grand visionnaire, ce Charest qui tient théâtre d'amateurs. Grand prix de prestidigitation!!!

Avant la rencontre économique de Lévis convoquée par le premier ministre Jean Charest, plusieurs observateurs appelaient à une séance de thérapie collective de laquelle tous ressortiraient convaincus de la nécessité d'un virage à 180 degrés en matière de gestion des finances publiques au Québec. Une sorte de sommet à la Lucien Bouchard. Or, compte tenu de la conjoncture et des négociations en cours avec ses employés, M. Charest en a décidé autrement... et c'est tant mieux!
Alors qu'il avait annoncé une rencontre pour discuter de la reprise économique et que son ministre des Finances, Raymond Bachand, souhaitait plutôt aborder la question des finances publiques, Jean Charest a finalement opté pour une consultation large sur les défis qui attendent le Québec à plus long terme. Certains en ont conclu qu'il avait manqué de courage. Pourtant, c'est M. Charest qui a eu raison d'élever le débat d'un cran pour éviter un affrontement stérile et forcer les acteurs à regarder loin devant. Il aurait même pu faire un pas de plus en leur demandant ce que chacun d'eux pouvait faire de plus pour le Québec au lieu de se placer en mode de revendication.
Au cours de la dernière décennie, le Québec a commencé à rattraper son retard en matière économique et présente aujourd'hui un taux de chômage inférieur à celui des provinces voisines. Malheureusement, le taux de diplomation de ses jeunes reste inférieur, sa population vieillit plus vite, ses régions se vident au rythme des fermetures d'usines des secteurs traditionnels et son économie risque d'en subir les contrecoups.
Voilà les problèmes auxquels un gouvernement responsable doit s'attaquer en priorité. Et c'est à cela que le premier ministre a convié ses ministres pour les prochains mois. Est-il sérieux ou s'agit-il d'un jeu de relations publiques? Souhaitons que la première option soit la bonne parce que, si le problème des finances publiques est important, il ne pourra jamais constituer un motif de mobilisation d'un peuple!
Rappelons-nous l'après-sommet de 1996: sans la création des garderies à 5 $ et le démarrage de la nouvelle économie du multimédia attirée par d'ingénieux programmes d'encouragement, quels souvenirs positifs aurions-nous du gouvernement Bouchard? Celui de la crise du verglas? La lutte contre le déficit a aussi constitué un moment fort de ce gouvernement, mais ce qu'on en retient, c'est surtout le dérapage dans les moyens utilisés pour atteindre l'objectif. L'approche Bouchard menée dans un climat de crise perpétuelle a causé un tort irréparable au réseau de la santé, annulant les bienfaits attendus des réformes en santé, démobilisant une majorité de salariés de l'État et concentrant toute l'attention des forces vives du Québec sur une seule cible. À tel point qu'une fois l'équilibre atteint, personne ne savait quel autre objectif viser...
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Jean Charest a raison de rejeter l'approche quasi hystérique des années 1990 en lui substituant des moyens moins ponctuels qui ne démobiliseront pas le Québec pour une deuxième fois en 15 ans. La question est maintenant de savoir lesquels? Pour le moment, on ne connaît rien de son plan — si plan il y a! — si ce n'est que l'échéance de quatre ans est trop courte. Pas de doute qu'il faudra accroître les revenus au-delà du rythme naturel de croissance de l'économie, mais lesquels? De même, il faudra restreindre la croissance des dépenses sans pour autant mettre en péril les progrès fragiles réalisés depuis dix ans. Ce n'est pas la quadrature du cercle, mais presque...
Depuis le retour du déficit budgétaire causé par la récession, les chantres d'un virage radical en matière de finances publiques ont repris leur croisade. Malheureusement, les remèdes proposés conduiraient à une catastrophe pire que le mal décelé. Pensons seulement à la proposition d'augmenter tous les tarifs d'électricité de 50 %: l'idée ne tient pas la route pour des raisons évidentes de compétitivité, sans oublier les contrats à long terme signés avec les plus gros consommateurs. En matière de prix comme en matière de fiscalité, on sous-estime toujours très largement les effets pervers des virages à 180 degrés!
Voilà donc l'autre défi auquel le gouvernement Charest doit maintenant s'attaquer: proposer aux Québécois un plan économique, fiscal et tarifaire raisonnable, équitable, efficace et acceptable à long terme, y compris pour le demi-million de salariés du secteur public dont le Québec aura aussi bien besoin au cours des prochaines années.


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