Recontre économique 2010 à Lévis

Réactions à la lettre ouverte de Pierre Karl Péladeau

États américains - impasse budgétaire

Taïeb Moalla - La lettre ouverte publiée ce matin dans le Journal de Québec, et signée par Pierre Karl Péladeau, a été au centre de plusieurs discussions, ce jeudi matin, à Lévis.
Dans sa missive, M. Péladeau, président et chef de la direction de Quebecor, se pose notamment cette question. « Alors que les syndicats sont devenus au Québec une force économique aussi puissante qu’indéniable, tel qu’en fait foi notre taux de syndicalisation autour de 40 % qui s’avère le plus élevé en Amérique du Nord, pourquoi ces organisations devraient-elles bénéficier de privilèges aussi nombreux et de moins en moins justifiables dans un contexte où la transparence et l’imputabilité ont, à juste titre, envahi l’ensemble des sphères politiques et économiques ? », se demande-t-il.
Le premier ministre Jean Charest - dont l'entourage a laissé entendre que le gouvernement aurait préféré se passer de cette sortie publique en ce jour de rencontre économique - a fait remarquer que « les relations de travail au Québec sont bonnes. Il faut en prendre acte ».
Invité à expliquer les raisons pour lesquelles M. Péladeau n'a pas été invité à Lévis, M. Charest a dit que des choix avaient été faits autour de trois groupes de vigie et « qu'on ne pouvait pas inclure tout le monde ».
De son côté, la chef péquiste Pauline Marois a rappelé « qu'on a beaucoup civilisé les relations de travail depuis 30 ans au Québec. On a de moins en moins de grèves sauvages, voire plus du tout. On a des conflits qui se résolvent généralement. Ça emmène plus d'efficacité et de productivité ».
Gérard Deltell, chef de l'ADQ, a mentionné que « l'objectif n'est pas de voir les syndicats comme étant des adversaires, mais comme des partenaires ».
Répliques virulentes
Sans surprise, les répliques les plus virulentes sont venues d'Amir Khadir et des milieux syndicalistes. Le député de Québec solidaire a qualifié la lettre de M. Péladeau « d'aberration ». « Il devrait s'ouvrir un peu au monde », a-t-il ajouté.
Réjean Parent, président de la Centrale des syndicats du Québec, a clamé que « C'est (M. Péladeau) un anti syndicaliste notoire. Il devrait se poser la question à lui-même : Suis-je le problème ? (....). Il voudrait étendre son conflit (du Journal de Montréal) à l'ensemble des travailleurs du Québec (...). C'est rendu le Roi Soleil (...). C'est l'Empereur. Je salue l'Empereur, mais je ne m'incline pas ».
Claudette Carbonneau, présidente de la CSN, croit que Pierre Karl Péladeau « n'a pas beaucoup de leçons à donner sur la façon de gérer les relations de travail ».
taieb.moalla@journaldequebec.com
----
Et si nous nous posions d’autres questions pour l’avenir du Québec?
Par Pierre Karl Péladeau
Aujourd’hui se tiendront des discussions sur l’avenir du Québec dans le cadre de la « Rencontre économique 2010 » sous la présidence du premier ministre du Québec, où doit être abordé le sujet des meilleures conditions pour que le Québec puisse profiter pleinement de la reprise économique.
Nul ne doute que l’heure est venue où la société québécoise doit faire des choix déterminants pour les générations futures.
Il nous semble toutefois que pour prendre des décisions éclairées à cet égard, il nous faille aborder une problématique d’importance qui ne manquera pas d’intéresser l’une des parties au débat, soit les organisations syndicales.
Sans vouloir remettre en cause ni leur existence ni même encore l’apport plus que positif de ces organisations au cours du XXe siècle, nous nous devons de poser la véritable question du déséquilibre des forces que toutes les législations des dernières décennies ont créé entre employeurs et syndicats, lequel a eu et a plus que jamais comme conséquence de défavoriser les entreprises québécoises dans le contexte économique mondialisé dorénavant largement répandu, de rendre plus difficile l’émergence de jeunes entrepreneurs, ainsi que de pénaliser notre désir collectif, voire notre obligation d’accroître notre productivité afin d’être en mesure de faire face aux nombreux défis auxquels nous ont sensibilisés les commentateurs économiques et sociaux.
Au XXIe siècle, alors que la liberté est tout autant une valeur qu’une vertu cardinales, n’est-il pas légitime de nous permettre, comme citoyens bénéficiant d’une maturité politique et démocratique, de décider si nous voulons ou non faire partie d’une organisation syndicale et d’en payer les cotisations? Ne devrions-nous pas nous inspirer de pays comme la France à cet égard où la liberté d’adhésion syndicale est consacrée? Ne devrions-nous pas aussi nous interroger sur ce privilège qui permet aux employés en conflit de travail de ne pas payer d’impôt sur les prestations monétaires qu’ils reçoivent de leurs syndicats, mesure exceptionnelle parce qu’elle fait financer les positions des organisations syndicales par l’ensemble des contribuables déjà assujettis à un fardeau fiscal que tous reconnaissent parmi les plus lourds du continent?
Que dire aussi de la création d’une unité d’accréditation par la simple signature de cartes d’adhésion, système que l’administration Obama et les démocrates aux États-Unis sont en train d’abandonner malgré un soutien financier considérable des syndicats américains?
Il se trouvera certainement plusieurs membres de l’intelligentsia pour justifier l’action positive des syndicats au Québec. Je le répète, nous reconnaissons le rôle nécessaire d’organisations structurées de militants ouvriers qui ont permis aux Québécois de se libérer de l’assujettissement à un capitalisme sauvage et de bénéficier de conditions de travail décentes. Mais n’est-il pas temps de se demander si les remèdes d’hier sont ceux qu’il nous faut pour les maux d’aujourd’hui et de demain?
Tous ces beaux penseurs ont-ils déjà été confrontés à la réalité de dirigeants d’entreprises et d’entrepreneurs comme celle à laquelle mes collègues et moi faisons face de façon quotidienne, tant au Canada qu’à l’étranger, dans un contexte de concurrence mondiale? Au Québec, les dirigeants d’entreprises doivent dédier trop de temps, d’énergie et d’argent à gérer leurs « relations de travail » alors qu’ailleurs, les divers intervenants au sein des entreprises participent ensemble à assurer la poursuite du développement de leurs activités et l’accroissement de leur productivité afin de gagner sur les marchés mondiaux, tant dans les secteurs manufacturiers que dans les secteurs de l’économie du savoir et des technologies.
Alors que les syndicats sont devenus au Québec une force économique aussi puissante qu’indéniable, tel qu’en fait foi notre taux de syndicalisation autour de 40 % qui s’avère le plus élevé en Amérique du Nord, pourquoi ces organisations devraient-elles bénéficier de privilèges aussi nombreux et de moins en moins justifiables dans un contexte où la transparence et l’imputabilité ont, à juste titre, envahi l’ensemble des sphères politiques et économiques? Les défis mondiaux auxquels nous faisons face nous obligent à ne plus avoir de craintes à soulever les questions incontournables auxquelles il faudra répondre adéquatement pour assurer l’avenir du Québec.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé