Qui a peur de l’Arabie saoudite?

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Les amis de Philippe Couillard au pilori





Les États n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts. La règle est tristement universelle. Le véritable courage est d’oser y déroger. Il en va ainsi aujourd’hui du «cas» notoire de l’Arabie saoudite.


Ce grand allié richissime de l’Occident est en fait un des régimes les plus répres­sifs et misogynes de la planète. Son obscurantisme idéologique et religieux est aussi une des sources les plus influentes de l’islamisme violent.


Le 2 janvier, l’exécution de 47 personnes par décapitation ou fusillade, dont un leader religieux chiite, a crûment rappelé le vrai visage du régime saoudien. Idem pour le sort non résolu de Raïf Badawi, le blogueur condamné à 10 ans de prison et 1000 coups de fouet.




Bref, courber l’échine devant l’Arabie saoudite par «intérêt» national n’est plus une option viable. Alors que la plupart des États occidentaux le nient, l’an dernier, la Suède a pourtant cessé toute coopération militaire avec, pour reprendre ses propres termes, le régime «moyenâgeux» de Riyad. Depuis les exécutions du 2 janvier, l’Allemagne évalue à son tour la «pertinence» d’une position «plus ferme» face à l’Arabie saoudite.


Un geste phare


Au Canada, le premier ministre Justin Trudeau a promis une politique étrangère progressiste et audacieuse. L’occasion lui en est maintenant offerte.


S’il annulait le contrat de 15 milliards de dollars garantissant à l’Arabie saoudite la livraison de centaines de véhicules militaires fabriqués en Ontario, il poserait un geste phare sur la scène mondiale.


Jusqu’ici, il s’y est refusé. Des fonctionnaires fédéraux lui ont même conseillé de renforcer les relations du Canada avec la pétromonarchie. Les appels à mettre fin au contrat se multiplient néanmoins au pays.


La pression monte


Ministre libéral des Affaires étrangères sous Jean Chrétien, Lloyd Axworthy appelle lui-même à une révision majeure de nos relations avec Riyad.


«Le niveau de répression des femmes et des dissidents en Arabie saoudite devient presque épidémique, lançait-il la semaine dernière. Nous disons vouloir combattre le terrorisme et l’extrémisme et vous avez là un pays dont une grande part de la richesse sert à les propager. (...) Pour moi, toute cette histoire est une anomalie.»


Au moment où les nébuleuses islamistes Daesh et Al-Quaïda frappent dure­ment, l’ex-ministre dénonce en fait l’hypocrisie qui régit nos rapports avec l’Arabie saoudite.


Plusieurs États condamnent certes avec raison la barbarie des terroris­tes. Après l’attentat de Ouagadougou, où six Québécois ont péri, Philippe Couillard déclarait ceci: «Ces gestes odieux nous rappellent qu’il ne faut jamais faire de compromis sur nos valeurs de liberté, de démocratie et de tolérance.»


Or, le Canada fait partie d’une longue liste d’États qui, pour leurs propres intérêts, refusent de voir l’absence de liberté chez leur «allié» saoudien. Et ce, comme le rappelle Lloyd Axworthy, même si, en plus, il nourrit la bête islamiste.


Au nom d’une plus grande cohérence pour les droits de la personne et contre le terrorisme, l’heure n’est-elle pas venue de dire «non» à l’Arabie saoudite?




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