QS «neutre» au fédéral? Évidemment!

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QS incapable de prendre position en faveur du Bloc : normal, c'est un parti qui défend le multiculturalisme canadien


Québec solidaire a décidé de rester «neutre» comme parti lors de la prochaine élection fédérale. Le contraire aurait été surprenant.


Cette neutralité de QS nous ramène à des éléments de discorde bien présents au sein de ce parti. Des questions qui divisent les militants de la formation de gauche : laïcité, identité, indépendance. 


Au cours des prochains mois, Québec solidaire devra d’ailleurs naviguer dans les eaux agitées de ces divisions; et tout faire pour donner l’impression que «tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes» et que tout le monde il est content dans le parti de gauche.  


En insistant déjà sur la neutralité sur la scène fédérale, les QSistes espèrent libérer les différents courants qui cohabitent dans ce parti afin que chacun puisse appuyer le parti fédéral de son choix sans que cela ne cause trop de division. En réalité, bien des militants de QS se trouveront à militer les uns contre les autres lors des élections fédérales. 



Zunera Ishaq

Photo d'archives

Zunera Ishaq




Campagne fédérale de 2015 : le niqab


Petit souvenir de la campagne fédérale de 2015. Au plus fort des débats entourant la question du niqab, au cours d’une discussion sur un réseau social de micromessages, un chroniqueur connu, Jean Barbe, pète les plombs contre tous les militants ou sympathisants du Bloc québécois. Deux tweets laconiques. 


«Les bloquistes, maintenant, je les jette.»


«Je ne veux plus de bloquistes parmi mes amis. Fini.»


Dans les faits, Jean Barbe exprimait déjection envers ceux qui s’étaient positionnés «du mauvais bord» d’un débat planté en pleine campagne électorale comme wedge issue (dossier hyper polarisant) par le chef conservateur Stephen Harper. 


On se souviendra que lors de la campagne de 2015, un dossier avait beaucoup fait jaser... celui d’une femme, musulmane, qui avait fait la manchette par son refus d’enlever son niqab lors de la cérémonie de citoyenneté à laquelle participent les nouveaux arrivants au Canada. 


«Zunera Ishaq est devenue un personnage central de la campagne électorale quand la Cour d’appel fédérale lui a permis d’être assermentée avec son niqab, après deux ans de combat.» 


Stephen Harper avait alors promis d’en appeler devant la Cour suprême du Canada s’il était réélu en 2015 afin que ce soit interdit de prêter serment visage couvert lors d’une cérémonie de citoyenneté au Canada. 


Dès lors, le débat était lancé. Furieusement. Au Québec, bien entendu, la question a aussi polarisé les gens. Lors d’un débat en français, Stephen Harper et Thomas Mulcair avaient échangé rondement là-dessus. Le chef du NPD défendant le droit des femmes musulmanes de ne pas être forcées de se découvrir.  


Nous apprendrons plus tard que Zunera Ishaq, «œuvr[ait] au sein d’un organisme lié au Jamaat-e-Islami, un parti islamiste pakistanais que plusieurs pays occidentaux considèrent comme une organisation terroriste.» 



Cette publicité du Bloc québécois n’est pas passée inaperçue.

Photo Twitter

Cette publicité du Bloc québécois n’est pas passée inaperçue.




Schisme prévisible


Revenons-en aux tweets de M. Barbe. Pourquoi? Car nous sommes, là, au cœur d’un schisme qui perdure au Québec. Une certaine «gauche» qui se passionne, surtout, pour le combat et la militance des droits des minorités opprimées. Cette gauche qui, en 2015, s’est rangée derrière le principe défendu par la militante Ishaq sur cette question hyper polarisante. 


Les camps se sont formés à peu près selon le même alignement idéologique que lors du débat sur la laïcité post élection du PQ en 2012. Et les débats qui ont eu cours sur les réseaux sociaux ont dégénéré assez vite en 2015 sur ces questions.  


Le Bloc québécois avait, en 2015, publié une publicité sur les réseaux sociaux qui avait beaucoup fait jaser. La députée NPD montréalaise Hélène Laverdière et le ministre libéral John MacCallum pointant vers le racisme, tout en rappelant le débat sur la charte des valeurs.  


Le Bloc québécois défendant plutôt le principe du vote (et du serment à la citoyenneté) à visage découvert, une position très largement appuyée au Québec.  


On se souviendra que beaucoup de militants de Québec solidaire avaient alors pris position pour le NPD en 2015. La conjointe du député Amir Khadir ayant milité activement à la réélection de la députée Laverdière contre le chef du Bloc Gilles Duceppe. 


Ce sera encore le cas en 2019.  


Plusieurs militants de QS issus des rangs d’Option nationale sont proches de quelques ex-collègues d’ON qui travaillent au Bloc québécois. Ne doutons pas qu’il y aura des QSistes pour appuyer le Bloc en 2019.  


Mais il y a aussi beaucoup de militants de QS qui sont moins intéressés par la question nationale et pour qui tout appui au Bloc passerait bien mal. Souvenirs de 2015 biens en tête. Dans certains cas, l’inimitié envers le Bloc n’a d’égal que celle que l’on cultive envers le PQ... C’est pas gagné.  


Il y aussi d’authentiques fédéralistes de gauche chez QS (bon an, mal an, les sondages pointent vers 40 à 45% de fédéralistes au sein de ceux qui s’affichent QS) qui appuient, systématiquement, le NPD au fédéral. J’en connais d’ailleurs plusieurs en Outaouais, et dans mon propre comté.  


Parmi les noms qui circulent en vue de l’élection fédérale à venir dans mon comté, il se pourrait bien que le candidat du Bloc soit un ex d’Option nationale et au NPD un membre de Québec solidaire!