Pour un enseignement sans prosélytisme

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Un appui à l'encadrement des signes religieux chez les enseignants


Monsieur le Premier Ministre,


Nous, signataires de ce texte, sommes d’anciennes dirigeantes et d’anciens dirigeants d’organisations syndicales du secteur de l’éducation. Nous jugeons qu’il est de notre responsabilité de prendre la parole sur le projet de loi 21 qui affirme le caractère laïque des institutions québécoises et constituera si elle est adoptée l’un des fondements de notre vie démocratique.


Nous donnons un appui public et enthousiaste au projet de loi 21. Il s’agit d’une mesure essentielle dans la construction d’un État québécois laïque. Cette pièce législative constitue la dernière pierre posée à un édifice dont la construction a débuté avec la Révolution tranquille. La publication du rapport Parent et la création en 1964 du ministère de l’Éducation ont permis à la société québécoise de se doter, pour la première fois de son histoire, d’un système d’éducation public et gratuit, de la maternelle à l’université. Son caractère laïque a cependant mis plus de temps à s’affirmer. Le changement de statut des commissions scolaires confessionnelles et l’abandon de l’enseignement de la religion catholique et de la religion protestante ne se sont ajoutés qu’à partir des années 1990. Le projet de loi 21 vient compléter le processus de laïcisation de l’école publique.


Loin d’être discriminatoire, l’affirmation de la laïcité des institutions constitue un préalable à la liberté et à l’égalité des personnes dans leurs rapports au sein d’une société pluraliste. Nous constatons que la résistance principale à ce pas décisif dans la séparation de l’Église et de l’État se concentre autour de l’interdiction du port de signes religieux par des personnes ayant un rapport d’autorité dans la dispensation des services publics à certaines clientèles. C’est évidemment le cas des enseignants-es et des directions d’établissement. Les théoriciens du multiculturalisme y voient de la discrimination, de la xénophobie, voire du racisme.


Nous récusons cette vision de la laïcité et la comprenons comme une manière de se soustraire aux exigences d’une loi de l’Assemblée nationale. L’institution scolaire est indissociable de la mission assumée par son personnel au bénéfice des élèves qui la fréquentent. L’école n’existe pas sans les enseignantes, les enseignants, la direction, les professionnelles, les professionnels et le personnel de soutien. La laïcité scolaire ne peut signifier qu’une chose : le respect intégral de la liberté de conscience des élèves. Cette liberté est incompatible avec le port des signes religieux.


Les élèves sont à une étape de leur vie où ils et elles doivent acquérir les connaissances et les moyens de devenir des citoyennes et des citoyens autonomes intellectuellement. Les personnes chargées de prodiguer l’enseignement et les services doivent le faire sans signes religieux et sans prosélytisme. Notre système scolaire accueille des milliers de jeunes de toute la planète. Il importe de valoriser les valeurs communes, dont le savoir et les connaissances, éléments nécessaires au développement de la vie en société. Comme citoyennes, citoyens et anciens pédagogues, nous sommes soucieux de la qualité des relations entre les maîtres et leurs élèves. Nous cherchons à faire cohabiter dans les salles de classe de nos écoles des enfants venant de divers horizons, sans égard à l’origine ethnique, à la couleur de la peau, aux croyances religieuses et aux conditions de vie économiques et sociales des parents.


Monsieur le Premier Ministre, nous donnons notre appui au projet de loi 21 au-delà de nos allégeances idéologiques ou partisanes et quelles que soient les réserves, les appréciations ou recommandations que nous souhaiterions formuler et qui pourraient l’être à d’autres étapes de l’étude.


En terminant, nous considérons cette loi comme une pièce maîtresse dans la construction d’une société libre, démocratique et respectueuse des valeurs de chaque personne et nous souhaitons fortement son adoption dans les meilleurs délais.



*Signataires:


François Audet, ancien président de l’Alliance des professeures et professeurs de Montréal (APPM) ; Rodolphe Chartrand, ancien v.-p. de l’APPM ; Diane Fortier, ancienne présidente de l’APPM ; Lucie Jobin, ancienne présidente du Syndicat de l’enseignement de l’ouest de Montréal et présidente du Mouvement laïque québécois ; André Lavallée, ancien président de l’APPM ; Pierre Lemaire, ancien président de l’APPM ; Lorraine Pagé, ancienne présidente de l’APPM et ancienne présidente de la CSQ ; Réjean Parent, ancien président du Syndicat de Champlain et ancien président de la CSQ ; Matthias Rioux, ancien président de l’APPM, ancien député et ministre







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