Commission Bastarache

Pas rassurant !

Commission Bastarache



La fin de la première phase des travaux de la commission Bastarache n'aura pas levé le scepticisme quant à sa crédibilité. Ne vient-on pas d'apprendre que même l'avocate chargée de nous représenter cotise à la caisse libérale? Et pourtant, nous a-t-on encore répété hier, notre système judiciaire est le meilleur au monde!
Il vous faut rassurer le public, insistait l'avocate de la Conférence des juges auprès de Michel Bastarache, président de la commission qui porte son nom, en livrant la dernière plaidoirie qui concluait, hier, des audiences suivies à la loupe par tout le Québec.
Tant de paternalisme laissait pantois. Il ne veut pas être rassuré, le public! Ne l'a-t-il pas assez dit que ce qu'il veut, c'est la vérité! Mais la magistrature et le Barreau étaient bien plus soucieux ces derniers jours de protéger leur pouvoir que de vouloir aller au fond des choses. La plus petite remise en question du système en place n'était même pas permise.
C'était déjà troublant. Mais la plus grande inquiétude pour notre démocratie est venue d'ailleurs: de la confusion des genres affichée et assumée par l'avocate du gouvernement, Me Suzanne Côté, donatrice pendant des années au PLQ. On croyait qu'au nom du gouvernement, elle nous représentait un peu, nous les citoyens. Mais elle était bel et bien la troisième avocate de Jean Charest, pourtant déjà représenté à titre personnel et par l'avocat du Parti libéral du Québec. Comment se fait-il que la Commission ait accepté une telle situation? Faut-il croire qu'il n'y a aucun avocat indépendant des partis politiques au Québec?
S'il faut accepter que le gouvernement, ce ne soit pas nous, mais le premier ministre, cela signifie que celui-ci jouit véritablement d'un pouvoir absolu, qu'on ne peut ébranler, lui qui déjà décide ou non de la tenue d'une commission, en choisit le président, en dicte le mandat. La population, qui n'a pas un mot à dire dans le processus, ne peut de surcroît même pas compter sur un procureur qui fera écho aux questions qu'elle se pose. On avait déjà compris que ce n'était pas là le souci de Me Côté. Mais la charge avec laquelle elle s'en est pris lundi à Marc Bellemare plutôt que de considérer l'ensemble des témoignages, tout comme la révélation de ses dons au PLQ, déconsidèrent les fondements mêmes de cette commission.
Au moins, nous aurons attrapé quelques morceaux de vraie vie depuis un mois et demi: oui, Jean Charest a modifié la façon de choisir les juges; oui, l'influence des collecteurs de fonds sur le bureau du premier ministre existe; oui, les liens politiques comptent pour être nommé juge: même un aspirant juge en chef y aura recours!
Oui, les listes confidentielles des candidats aptes à la magistrature circulent plus qu'on ne le croit. Mieux encore, elles pourraient circuler davantage, auprès de tous les ministres et de leur personnel, et cela serait parfaitement légal, a plaidé, sans rire, «notre» avocate Me Côté. Une manière de voir qui, loin d'avoir fait sourciller le commissaire Bastarache, lui apparaît appartenir à une philosophie d'imputabilité qu'on peut opposer à la philosophie de la confidentialité qui avait cours jusque-là.
On nous permettra d'être moins philosophes et plus pragmatiques. Les dénonciations de départ de Marc Bellemare portaient sur les liens entre l'argent, le monde de la construction et le PLQ, qui s'illustrent notamment par des nominations de juges. À cet égard, son discours s'avère. C'est pourquoi, même si ce n'est pas là le mandat de sa commission, il serait bien qu'au-delà des chicanes d'agenda, d'encre et de post-it, M. Bastarache tienne compte de cette réalité quand il aura à trancher entre les querelles d'écoles.


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