NEW YORK | De Moscou à Washington, les autorités ont tenté de rassurer les marchés lundi en affirmant que les attaques contre des installations pétrolières saoudiennes n’allaient pas conduire à une pénurie d’or noir dans le monde, mais elles n’ont pu empêcher une flambée des cours.
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Le baril de référence sur le marché mondial, le Brent de la mer du Nord coté à Londres, a bondi de 14,6 % pour finir à 69,02 dollars. Il s’agit de sa plus forte progression depuis que ce contrat a été formalisé en 1988.
Il s’était temporairement envolé de près de 20 % à l’ouverture.
Le baril de WTI, la référence du brut à New York, a grimpé de 14,7 % pour finir à 62,90 dollars, enregistrant au passage sa plus forte hausse depuis décembre 2008.
Cette montée abrupte est la conséquence directe de deux attaques d’envergure menées contre l’usine d’Abqaiq, la plus grande pour le traitement de pétrole au monde, et sur le champ pétrolier de Khurais. Elles ont entraîné une chute de moitié de la production saoudienne, à hauteur de 5,7 millions de barils par jour, soit environ 6 % de l’approvisionnement mondial.
Outre la brutale réduction de l’offre d’or noir, ces attaques ont réveillé la crainte d’une escalade militaire entre Washington et Téhéran.
Bourse
Dans ce contexte tendu, les autorités saoudiennes étudient d’ailleurs la possibilité de reporter l’entrée en Bourse très attendue du géant pétrolier Aramco, ont indiqué lundi à l’AFP des sources proches du dossier. L’entreprise, dont la valeur boursière doit dépasser les 1.000 milliards de dollars, prévoyait jusqu’ici de s’introduire en novembre sur son marché local et en 2020 sur une Bourse internationale.
Le ministre américain de l’Énergie, Rick Perry, a bien tenté de freiner la flambée des prix du pétrole en mettant en avant la «quantité substantielle de pétrole disponible».
«Oui, il va y avoir des perturbations pendant un certain temps. Oui, il va y avoir une flambée (des prix), mais pas de l’ampleur dévastatrice que cela aurait eu il y a encore cinq ans», a assuré le responsable américain interrogé depuis Vienne par la chaîne CNBC.
Il y a «plein de pétrole!», avait déjà tweeté la veille le président américain, Donald Trump, qui a autorisé l’autorisation des réserves stratégiques américaines de pétrole.
«Pour le moment, les marchés sont bien approvisionnés avec de nombreuses réserves commerciales», a aussi affirmé lundi matin l’Agence internationale de l’énergie (AIE).
Amortir le choc
Grâce aux réserves mondiales, «il n’y a pas besoin de prendre en urgence des mesures supplémentaires», a également déclaré le ministre de l’Énergie russe, Alexandre Novak, qui devait s’entretenir avec son homologue saoudien dans la journée.
Le royaume saoudien a déjà promis de mobiliser ses vastes réserves pour amortir le choc.
«Selon les données du cabinet JODI, l’Arabie saoudite a environ 188 millions de barils de pétrole en réserve, ce qui au rythme de 5,7 millions de barils par jour couvre environ 33 jours», calculent dans une note les analystes de Morgan Stanley.
«De plus, Aramco avait la capacité d’augmenter sa production pétrolière d’environ 2 millions de barils par jour avant les attaques, et une partie pourrait très bien encore être intacte», ajoutent-ils.
Toutefois, nuancent les analystes de TD Securities, «s’il y a suffisamment de capacités pour compenser (les perturbations) à court terme, ce sont des infrastructures clés qui ont été touchées, suggérant qu’au moins une partie d’entre elles pourraient rester hors service pendant plus d’un mois».
L’évolution des cours du pétrole dans les prochaines semaines dépendra de l’étendue des dégâts à l’usine d’Abqaiq, estiment plusieurs analystes.
Les marchés manifestaient aussi lundi par leur coup de sang la crainte d’une escalade des tensions dans la région.
Les rebelles yéménites Houthis, soutenus par Téhéran et qui font face depuis cinq ans à une coalition militaire menée par Ryad, ont revendiqué les attaques.
Mais l’Arabie saoudite a affirmé lundi que les armes utilisées ont été fabriquées en Iran et le ministre américain de la Défense, Mark Esper, a assuré lundi que les États-Unis allaient «défendre l’ordre international» qui est «sapé par l’Iran» après l'attaque sans précédent» contre les installations saoudiennes.
Téhéran a jugé ces accusations «insensées» et «incompréhensibles», par la voix du porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Abbas Moussavi, qui a laissé entendre qu’elles avaient pour but de justifier «des actions futures» contre l’Iran.