Les manuels d’histoire élagués pour satisfaire les communautés

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La destruction d'un récit commun facilite la déconstruction nationale

Les livres d’histoire ont véritablement changé d’identité et l’Histoire telle qu’elle était enseignée n’est plus. Certains manuels ont été réécrits, et certaines expressions délicates ont été mises de côté.


Un professeur d’Histoire dénonce le fait que pour accommoder certains groupes, il n’existe plus de «véritable récit national» qui fait consensus.


Mario Dumont s’est entretenu avec Gilles Laporte, professeur d’histoire au Cégep du Vieux-Montréal sur la question.


À titre d'exemple, même s’il n’était pas dévalorisant, le mot «Amérindien» est disparu des nouveaux manuels d’histoire.





Les livres d’histoire ont véritablement changé d’identité et l’Histoire telle qu’elle était enseignée n’est plus. Certains manuels ont été réécrits, et certaines expressions délicates ont été mises de côté.




«Il n’est nullement péjoratif, il renvoie aux autochtones d’Amérique. Cependant, la présence du mot ''indien'' renverrait à quelque chose qui dénigre les Premières nations ou les autochtones. Tous les manuels qui contenaient ce mot ont été pilonnés, détruits», détaille Gilles Laporte.


Certaines images, certaines références à des documents écrits pas Jacques Cartier notamment ont été retirés, comme le rapporte Le Devoir.


«On aplani [l’histoire] les gens le savent, on enlève toutes les aspérités, tout ce qui peut choquer. C’est une forme de clientélisme, on l’a déploré en politique, le voilà en histoire. Une fois qu’un manuel paraît, les groupes se manifestent et font entendre leurs voix à propos du traitement qu’on leur réserve dans les manuels», note le professeur d’histoire.


Modifier l’Histoire


Selon lui, tout le problème réside dans le fait que l’on veut voir l’histoire avec «nos yeux d’aujourd'hui».


«On y tombe à chaque époque. [...] Il ne faut pas calquer nos préoccupations du présent sur les enjeux du 18e siècle», croit-il.


Il donne à titre d’exemple la violence constatée chez les groupes autochtones à une autre époque, alors que les guerres se multipliaient.


«On change l’histoire à terme. Les éditeurs doivent gérer cela. On assiste à une forme d’en capsulage, on fait des ''insertions'', des encadrés qui permettent de satisfaire les besoins exprimés par l’une ou l’autre communauté. »


Selon le spécialiste, les demandes éthiques ou de vocabulaire deviennent de véritables listes d’épicerie.


«Ça devient des pressions politiques afin que les manuels produits pour les enfants satisfassent les groupes qui se sont exprimés.»


Selon le professeur, ces dérives font qu’il n’y a plus de «récit» commun auquel les élèves peuvent s’accrocher.


«Il y avait autrefois un seul vrai récit national, au contraire, on assiste davantage à un catalogue de groupes qui se manifestent dans le présent, mais qui veulent se voir dans le passé.»


La chose préoccupe les professeurs d’histoire qui en parlent régulièrement entre eux.


«On essaie d’intervenir le plus souvent possible. Ça reste délicat parce qu’il y a des communautés qui sont vraiment blessées dans le présent, pensons aux autochtones. Il faut se montrer délicats et sensibles. Il demeure qu’il faut que les groupes soient sensibles à l’importance de produire un récit qui fait consensus et qui traduit de manière adéquate le passé», conclut-il.