Les artistes et la politique

Espérons qu'Ottawa ne piétinera pas le Québec par dépit... - un colonisé qui tente de récupérer la débâcle électorale du PLC.



Dans ma vie professionnelle, j'ai toujours eu deux amours: la politique et les arts. Ils m'ont attiré tour à tour. Ainsi, depuis mon départ de la vie politique, en 1979, j'ai exercé bénévolement deux fonctions, celle de président du Conseil des arts de la Communauté urbaine de Montréal puis celle président de l'Orchestre métropolitain du Grand Montréal. Je l'ai fait avec conviction, dévouement et sincérité. Deux expériences tout à fait différentes, l'une de donneur de subventions et l'autre de récipiendaire.
Savoir donner, si on le fait d'une façon responsable, est tout aussi difficile que refuser. Il en va ainsi pour les programmes, il faut en développer de nouveaux pour répondre aux besoins changeants et en réviser, modifier ou abandonner à l'occasion s'ils ne répondent plus aux objectifs recherchés. À l'opposé, à titre de récipiendaire donc à la recherche de subventions et de dons, il faut s'attendre à des refus ou des compressions qui causent des frustrations qui obligent à négocier, à convaincre ou à rechercher des solutions de rechange.
Plaçons donc dans ce contexte cette fameuse réduction de 45 millions de dollars dans le budget du gouvernement fédéral. En premier lieu, disons que ce budget pour la culture du gouvernement fédéral se chiffre à quelques milliards de dollars. Alors, met-elle en danger la culture au pays comme l'a prétendu le montage publicitaire du regroupement des artistes?
Diverses questions se posent. S'agit-il d'un abandon définitif du programme financé à même ces 45 millions, d'une révision ou d'une solution alternative à venir? Ce budget sert à financer la présence d'artistes ou de groupes sur la scène internationale: est-il bien utilisé, est-il utilisé à d'autres fins que culturelles?
En un mot, a-t-on vraiment recherché le dialogue? A-t-on exploré la possibilité d'un financement provincial, car on sait que le gouvernement du Québec sur la base de la population alloue moins d'argent que d'autres provinces pour la culture. Si ce programme est vital à la vie culturelle de notre collectivité, il aurait pu être financé à même le budget de madame Christine St-Pierre au lieu de la voir se montrer triomphalement à la télévision de Radio-Canada devant ses collègues des autres provinces, eux béats et bien alignés, dans une «séance» pour enfants dirigée par une «mère supérieure».
Il est vrai que la ministre fédérale de la Culture, Josée Verner, est loin d'avoir été explicite au sujet de ce programme. Il n'en reste pas moins que la lutte ouverte est non seulement exagérée, mais devenue belliqueuse, haineuse et assortie de farces grotesques, très éloignée d'un problème relatif à la culture dont la solution demeure possible et souhaitable.
Il est encore temps de reprendre nos esprits et de devenir positifs. Fort heureusement, il se trouve des artistes et des journalistes pour souligner qu'il y avait d'autres enjeux plus importants pour la population en général dans cette élection, y inclus l'avenir culturel de Montréal. Pour y travailler, nous n'avons pas besoin d'adversaires, ce sont des alliés qu'il nous faut.
L'association des artistes avec le Bloc québécois s'est faite naturellement. C'est bien connu, les artistes sont d'allégeance séparatiste donc pour le Bloc d'une façon monolithique, à quelques exceptions près. Ils ont profité également de la ferveur des journalistes à leur égard, et cet ensemble a formé une masse médiatique hors proportion à l'occasion de cette élection au sujet des 45 millions.
Mais malheureusement, au-delà d'une revendication, il faut se rendre à l'évidence: les artistes en ont profité pour faire de la politique partisane. Jouer à ce jeu peut entraîner des conséquences coûteuses pour le Québec. Espérons tout de même que des personnes valables seront en position de force au gouvernement fédéral pour prendre des décisions constructives.
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Jean-Pierre Goyer, Ancien ministre fédéral


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