Le temps des girouettes

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Une vie politique québécoise vidée de sa substance

Je vais vous dire ce que je trouve le plus décourageant dans l’actuelle campagne électorale.


Ce n’est pas le déclin du projet souverainiste, bien qu’il me fasse très mal. C’est le déclin d’une certaine conception de l’engagement politique.


Je m’explique.


Éclatement


Pendant longtemps, notre débat politique fut axé autour d’un affrontement entre fédéralistes et souverainistes.


Ce n’est plus le cas.


Le PQ croupit au 3e rang, talonné par un parti pseudo-souverainiste, QS, dont un sympathisant sur deux se dit fédéraliste.


On aurait pu penser que cet effacement du clivage autour de la question nationale ferait apparaître un affrontement entre la gauche et la droite.


Même pas. Si vous additionnez les intentions de vote pour le PLQ et la CAQ, les deux tiers des Québécois vont voter à droite.


Voilà qui devrait liquider cette vieille idée selon laquelle le Québec serait un endroit plus « progressiste » que l’Ontario ou le Maine.


Un optimiste pourrait penser que l’engouement pour QS, s’il se confirme, témoigne d’un désir de se projeter dans un avenir différent.


Pas du tout. Le programme de QS est un ramassis d’idées d’inspiration marxiste qui nous ramènent aux années 1970 et qui, partout où elles ont été implantées, ont amené misère et recul des libertés.


Une bonne partie de l’appui à QS n’est qu’un pied de nez, un doigt d’honneur aux autres partis.


On vote QS justement parce qu’on sait qu’il ne prendra pas le pouvoir.


Pendant longtemps, j’ai aussi pensé qu’avoir un programme solide, bien pensé, était important.


C’est le PQ qui a le meilleur programme, mais cela ne semble guère l’aider sur le plan des intentions de vote.


Bref, les points de référence classiques – gauche, droite, fédéralisme, souverainisme, un programme solide – s’effacent, mais sans être remplacés par de nouveaux points de repère clairs.


On vote selon la personnalité du chef, selon le goût ou non du changement, ou en fonction d’un enjeu précis important pour nous : l’environnement, l’immigration, la famille, etc.


Dans cette scène politique complètement éclatée, il est beaucoup moins important que jadis d’arriver avec une vision globale réfléchie, mûrie, cohérente, réaliste.


Opportunistes


Cela entraîne que les carriéristes, les opportunistes, ceux pour qui les convictions ne sont guère importantes, ceux qui rigolent quand ils entendent des expressions comme « projet de société », seront tout à fait à leur aise.


Dans une arène politique ouverte à tous les courants d’air, ceux qui virevoltent le plus seront dans leur élément.


Pourquoi se soucier d’être cohérent si les électeurs n’exigent pas de la cohérence ?


Voyez Gaétan Barrette et Dominique Anglade, passés de la CAQ au PLQ tout simplement pour être nommés ministres, ou Gertrude Bourdon, qui a justifié son ahurissant comportement en disant qu’elle aimait « magasiner ».


Ce genre de politicien a toujours existé, mais il risque d’être de plus en plus répandu.


C’est ça le plus décourageant.