Le retour du «Canada central» ?

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L'économie ontarienne ne peut pas récupérer en six mois ce qu'elle a perdu en 20 ans, ni en particulier l'influence politique qui allait de pair

Le glissement marqué du pouvoir politique et économique vers les provinces de l’Ouest serait-il déjà en voie de disparition? Si oui, le Québec en sortirait-il gagnant? La réponse est loin d’être évidente.

Forte de son pétrole et de l’appui indéfectible des conservateurs de Stephen Harper depuis leur arrivée au pouvoir en 2006, l’Alberta est devenue une force incontournable au pays.

Or, en 2014, c’est le coup de théâtre. Chute du prix du pétrole. Multiplication d’obstacles contre la construction de pipelines visant à ouvrir de nouveaux marchés à l’or noir des sables bitumineux. L’Alberta en prend pour son rhume.

La nature abhorre le vide

La nature abhorrant le vide, la première ministre de l’Ontario y flaire du bon. En entrevue au Globe and Mail, Kathleen Wynne note que la chute du prix du pétrole, la faiblesse du dollar et une remontée des exportations vers les États-Unis favorisent le secteur manufacturier. Ce qui pourrait placer sa province en tête de la croissance économique canadienne.

Si cela s’avère, ce serait un retour spectaculaire du balancier économique et peut-être même politique vers l’Ontario. Les résultats de l’élection fédérale s’y joueront d’ailleurs.

Le retour du Canada central... ou de l’Ontario ?

M. Couillard n’est pas en reste. Il dit souhaiter carrément la renaissance de l’influence du «Canada central», comme on l’appelait jadis. Soit de l’axe Québec-Ontario.

Cet été, aux côtés de Mme Wynne, il soulignait son désir de «revitaliser la relation stratégique» des deux provinces voisines. Un rapprochement facilité par le fédéralisme affiché de M. Couillard. Mais aussi, par la filiation libérale des deux premiers ministres.

En novembre, à la sortie d’un conseil des ministres conjoint tenu à Toronto, M. Couillard allait plus loin encore. Les deux provinces, lança-t-il, devraient «parler d’une même voix» sur les «enjeux communs». Y compris sur le pétrole albertain.

Le tout, au moment même où des voix nombreuses s’élèvent ici pour réclamer une voix québécoise distincte dans ce dossier controversé.

La locomotive ontarienne

L’économie et le poids politique du Québec au sein du Canada étant faiblards, la volonté de Philippe Couillard de rattacher le Québec à la locomotive ontarienne potentielle n’a rien d’étonnant.

La question est de savoir si politiquement et économiquement, cette alliance profiterait au Québec et non pas seulement à l’Ontario.

Côté politique, à moins que les Québécois ne votent massivement pour le prochain gouvernement fédéral – ce qui semble peu probable -, rien n’est moins sûr.

Côté économique, force est aussi de constater que les deux premiers ministres libéraux prennent deux chemins opposés. M. Couillard choisit l’austérité. Mme Wynne, la stimulation de l’économie par des investissements publics majeurs.

Malgré un déficit de 12,5 milliards de dollars – cinq fois plus élevé qu’ici -, Mme Wynne reporte l’équilibre budgétaire dans trois ans pour protéger la relance et les services publics. M. Couillard vise au contraire le déficit zéro dès cette année. Deux planètes politiques distinctes.

Dans un tel contexte, le Québec risque de se retrouver perdant. Et ce, ironiquement, malgré le retour possible du mythique «Canada central»...


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