Le multiculturalisme de Québec solidaire

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« À travers ce débat, c’est l’existence même du peuple québécois qui est en question. »

Québec solidaire aime se faire passer pour un parti souverainiste, du moins lorsque vient le temps de gagner les électeurs souverainistes. Pour cela, QS fait des simagrées de classe mondiale et chante même la mémoire de René Lévesque. Mais les observateurs les plus avertis le répètent depuis longtemps, QS est d’abord et avant tout un parti associé à la gauche radicale – une gauche radicale allergique à tout ce qui touche l’identité québécoise et qui n’envisage l’indépendance du Québec qu’à condition de la soumettre à toutes ses conditions idéologiques, et elles sont très nombreuses.


Même s’il peine à le reconnaître, QS adhère fondamentalement au multiculturalisme canadien, comme on l’a vu lorsqu’il a endossé l’accusation de racisme systémique contre la société québécoise ou lorsqu’il a annoncé la révision de sa position sur la laïcité, qui le mènera probablement à s’opposer à l’interdiction des signes religieux ostentatoires chez les employés de l'État en situation d'autorité, comme s’il s’agissait d’une mesure discriminatoire. Qu’un peuple veuille faire respecter son identité ou son mode de vie aux populations nouvelles qui le rejoignent serait un scandale moral. En la matière, le PLQ et QS convergent tellement qu’on pourrait parler du PLQS. 


On le sait, QS partage aussi avec le grand patronat la conviction que l’immigration massive est une bonne chose pour le Québec. QS ajoute qu’il s’agit d’un devoir moral. À l’écouter cette semaine, Gabriel Nadeau-Dubois, ne semblait pas la distinguer l’immigration de la question des réfugiés, ce qui témoigne d’une confusion intellectuelle navrante – à moins qu’il ne s’agisse d’une forme de démagogie assez minable. C’est ce qui l’a amené, cette semaine, à se ranger du côté de Justin Trudeau contre François Legault sur la question de la réduction des seuils d’immigration. Avec de tels souverainistes, nous n’avons plus besoin de fédéralistes.


Nous sommes entrés dans une nouvelle époque politique québécoise, où le clivage traditionnel entre les souverainistes et les fédéralistes est partiellement remplacé par celui entre les nationalistes et les multiculturalistes. Certes, les deux clivages se recoupent sans s’identifier: sur le fond des choses, qui veut vraiment sortir du multiculturalisme devra tôt ou tard embrasser la souveraineté, et qui embrasse le fédéralisme devra tôt ou tard accepter le multiculturalisme. C’est qu’au Canada, le multiculturalisme n’est pas qu’une idéologie, c’est une doctrine d’État. Il est au cœur du régime canadien.


Mais nous n’y sommes pas encore. Pour l’instant, les masques tombent, et chacun prend son camp. Les nationalistes en appellent à réaffirmer le statut du Québec en tant qu’État national et cherchent pour cela à placer au cœur de l’existence collective la majorité historique francophone, qui réclame le statut de culture de convergence, alors que les multiculturalistes, minoritaires dans la population mais hégémoniques dans les médias, présentent cette affirmation nationale comme un principe discriminatoire et veulent réduire la majorité historique francophone au statut de communauté parmi d’autres, en assumant le sort que lui destine le Canada. 


À travers ce débat, c’est l’existence même du peuple québécois qui est en question. Les nationalistes devraient en prendre conscience.