COUR SUPRÊME

Le gouvernement Trudeau nomme le neuvième juge

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Un Libéral fédéraliste centralisateur «teindu»

Pour la première fois dans l’histoire du pays, un Terre-Neuvien deviendra juge à la Cour suprême du Canada.

Malcolm Rowe, âgé de 63 ans, qui était juge à la Cour d’appel de Terre-Neuve-et-Labrador depuis 2001, doit ainsi devenir le neuvième juge du plus haut tribunal du pays, à la suite du départ de Thomas Cromwell, qui a pris sa retraite le 1er septembre.

Le gouvernement de Justin Trudeau avait indiqué que le nouveau juge devait être « effectivement bilingue », mais il ne s’était pas engagé formellement à ce que le remplaçant du juge Cromwell, qui était de Nouvelle-Écosse, soit lui aussi d’une province de l’Atlantique. La Loi sur la Cour suprême prévoit que trois juges doivent provenir du Québec (notamment à cause de son Code civil distinct), mais elle demeure muette sur toute autre représentation régionale.

M. Trudeau a reconnu en août dernier que la perspective du Canada atlantique et la représentation régionale étaient importantes, mais que l’accent devait être mis sur le recrutement « des meilleurs juges » et la diversité. Il avait ainsi ouvert la porte aux candidatures provenant de partout au pays.

Cet « accroc à la tradition » avait provoqué les hauts cris dans les provinces de l’Atlantique, mais la nomination du juge terre-neuvien vient apaiser le débat dans cette région.

Dans le questionnaire remis au Comité consultatif indépendant, publié lundi par le Commissariat à la magistrature fédérale, le juge Rowe se déclare bilingue : il soutient qu’il peut déjà, sans formation supplémentaire, lire et comprendre des documents de la cour, discuter d’affaires juridiques avec des collègues, converser avec un avocat à la cour et comprendre une argumentation orale à la cour en français et en anglais.

« Depuis sa nomination à la magistrature, il a contribué de façon remarquée au droit criminel, en particulier en matière de détermination de la peine, peut-on lire dans le communiqué publié par le cabinet du premier ministre Trudeau. Les connaissances étendues de M. Rowe en matière de droit criminel, constitutionnel et public font de lui le candidat idéal pour un siège au plus haut tribunal du pays. »

« Tout au long de sa remarquable carrière au sein du gouvernement fédéral, du gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador et en cabinet d’avocats, il a été appelé à traiter de questions touchant le droit constitutionnel, les relations internationales, la délimitation des frontières maritimes par voie d’arbitrage, et la négociation de conventions internationales sous l’égide des Nations unies », lit-on aussi.

Le premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador, Dwight Ball, s’est réjoui de cette « nomination historique », qui constitue un « moment de grande fierté » pour la province.

Le porte-parole conservateur en matière de justice à Ottawa, Rob Nicholson, lui-même ex-ministre fédéral de la Justice, a qualifié « d’excellent choix » la nomination du juge Rowe, et il s’est attribué le mérite d’avoir insisté auprès des libéraux pour une candidature de l’Atlantique.

Une nouvelle nomination à la Cour suprême devra être annoncée d’ici septembre 2018, lorsque la juge en chef Beverley McLachlin atteindra l’âge obligatoire de la retraite — 75 ans.

« Entrevues d’embauche »


M. Rowe sera le premier à se soumettre au nouveau processus de sélection des juges à la Cour suprême mis sur pied par le gouvernement libéral en août dernier, afin de rendre le mécanisme « plus transparent ». Le juge terre-neuvien a été choisi à partir d’une liste « non contraignante » de quelques noms dressée par le Comité consultatif indépendant, mis sur pied cet été, qui a reçu 54 candidatures.

Dans une semaine, la ministre de la Justice, Jody Wilson-Raybould, et la présidente du Comité consultatif indépendant, Kim Campbell, devront comparaître devant un comité parlementaire afin d’expliquer pourquoi la candidature du juge Rowe a été retenue. Le juge Rowe, de son côté, devra se soumettre à une séance de questions des membres du comité parlementaire et du comité sénatorial ainsi que des représentants du Parti vert et du Bloc québécois qui ne siègent pas à ces comités. Cet exercice se tiendra le 25 octobre.

Appelé dans son questionnaire à décrire le rôle que doit jouer un juge dans une démocratie constitutionnelle, le juge Rowe répond : « La Cour suprême du Canada ne constitue pas principalement une cour de correction. Le rôle de la Cour consiste plutôt à formuler des énoncés définitifs du droit, qui sont ensuite appliqués par les juges de première instance et les tribunaux d’appel. Grâce à la procédure d’autorisation d’interjeter un appel, la Cour choisit les domaines de droit dans lesquels elle souhaite se prononcer de façon définitive. Ainsi, les juges de la Cour suprême établissent le droit au lieu de simplement l’appliquer. »

Howard Anglin, ancien conseiller juridique du premier ministre Stephen Harper, a d’ailleurs noté sur Twitter que la nomination de M. Rowe « semble ancrer davantage encore la notion post-1982 [la Charte des droits et libertés] voulant que les tribunaux deviennent des institutions “supra-parlementaires” en matière d’enjeux sociaux et politiques ».

Politique et pratique privée


Né à Saint-Jean, Terre-Neuve-et-Labrador, en 1953, M. Rowe a étudié d’abord à l’Université Memorial puis à la faculté de droit de l’Université York, à Toronto, de 1975 à 1978 ; il a été admis au Barreau de sa province natale en 1978. M. Rowe a ensuite été greffier adjoint à l’Assemblée législative avant d’entrer en 1980 au ministère fédéral des Affaires étrangères, où il a été agent du service extérieur.

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