Le faux-fuyant de Québec solidaire sur la question identitaire

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QS = Québec suicidaire

Avec sa résolution de la fin de semaine dernière (29 novembre), Québec Solidaire est parvenu à épuiser la dernière once de sympathie que les laïques progressistes pouvaient encore avoir à son endroit. Jusque là, tous les espoirs de voir QS adopter une position laïque plus progressiste étaient encore permis. En refusant de revenir sur le sujet, le conseil national a enfoncé le dernier clou dans le cercueil. Et c’est le collectif islamiste d’Adil Charkaoui qui a été le premier à l’en féliciter sur sa page Facebook.


Le désir de « se tenir loin des débats identitaires » cache mal l’orientation communautarienne et multiculturaliste de QS. L’identité étant une composante essentielle de la conscience de soi, on ne peut pas échapper à la question identitaire au niveau collectif. Un tel discours n’est qu’un faux-fuyant suicidaire alimenté par l’ignorance ou l’aveuglement idéologique. Sur cette question, QS mérite bien le sobriquet de Québec suicidaire qui lui est accolé sur les réseaux sociaux.


Sa position complaisante face au port de signes religieux dans la fonction publique, les écoles et les hôpitaux est d’ailleurs motivée par l’acception sans limite de l’expression identitaire forte des « communautés » dont la société d’accueil ne ferait pas partie. Québec Solidaire accepte ainsi que ces communautés aient une identité bien affirmée et refuse en même temps de voir l’importance pour la société d’accueil de définir un projet identitaire citoyen et collectif.


Françoise David n’est pas même capable d’affirmer que le niqab devrait être banni des cérémonies de citoyenneté. Elle est «en réflexion personnelle » sur le sujet déclarait-elle au Devoir. Sa réflexion la conduira-t-elle à dire, de concert avec Philippe Couillard, que l’intégrisme est un choix personnel et que le djihad n’a rien à voir avec l’islamisme ou avec le coran?


Sur cette question des foulards islamiques, QS n’a pas encore pris note qu’il existe, chez les musulmans, deux courants : l’un progressiste et démocrate qui rejette cette forme d’expression propre à un intégrisme vecteur de repli identitaire et de radicalisation, et un second qui cherche à l’imposer coûte que coûte. Québec solidaire a choisi de se solidariser avec le second courant.


Un parti incapable de condamner un tel sexisme aliénant et répressif pour les femmes n’a pas grand-chose de féministe.


Pouvoir voir l’autre comme un allié

Françoise Davis entend également « intensifier le combat contre la xénophobie et le racisme ». Qu’est-ce à dire? Elle nous en a donné la recette dans sa motion moraliste du 1er octobre dernier lamentablement votée par tous les partis de l’Assemblée nationale. Sa recette est de recourir au concept mystificateur et fallacieux de l’islamophobie qui cible ceux qui mettent en garde contre la montée de l’extrême droite religieuse fasciste.


Si on va au-delà des mièvreries énoncées par les sociologues postmodernistes à l’œuvre dans les centres d’étude ethnique de nos universités et dont la scientificité ne dépasse pas celle d’un texte d’opinion, on découvre que les études de laboratoire sur le racisme n’en attribuent pas la cause au rejet de la différence mais à l’absence de signes permettant de percevoir l’autre comme un allié.


Tout comportement ou attitude démontrant un refus de partager des valeurs communes ou un projet de société commun engendrera du rejet et ultimement du racisme. Ce sont ces barrières communautariennes qu’il faut faire tomber. Au premier rang les tenues d’apparat qui visent à mettre un voile de séparation entre les personnes au nom d’un identitaire religieux propre à chacun.


Le parti a par ailleurs réaffirmé son engagement envers le projet souverainiste. Pourtant, Françoise David affirme que son parti est « le seul à pouvoir proposer une alternative au projet indépendantiste ». Que faut-il comprendre? C’est aussi mot à mot ce que François Legault a déjà dit. Et pourquoi un ensemble de communautés sans identité commune pourrait faire cause commune pour réaliser un projet souverainiste nécessitant une identité commune?


Comment une formation politique digne de ce nom peut-elle en même tenir un discours marxisant sur l’économie comme le fait Amir Kadir et un discours aussi éculé et sans vision que celui de Françoise David sur la laïcité? En quoi un parti qui n’a pas plus de cohérence peut-il paraître crédible et affirmer être une alternative valable pour un avenir plutôt sombre?


Cette gauche qui n’en a plus que le nom a abandonné l’analyse marxiste des rapports sociaux au profit d’une vision ethnicisée de ces rapports : l’égalité n’est plus à rechercher entre les classes sociales mais entre les « communautés », peu importe si la culture de ces sous-groupes sociaux est porteuse d’aliénation et d’oppression. Cette façon de voir les choses, qui abandonne les minorités à leur sort, est éminemment raciste. Cette nouvelle gauche communautarienne et multiculturaliste me désespère.


Tout compte fait, la position de Québec solidaire sur les enjeux identitaires montre que la formation n’est ni laïque, ni progressiste, ni féministe, ni souverainiste, ni solidaire de la nation. Il est devenu une nuisance non pas en raison de la force politique qu’il n’a pas mais en raison de la confusion qu’il sème et alimente dans l’esprit d’une jeunesse en mal d’idéal.


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Daniel Baril46 articles

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Anthropologue de formation, ex-rédacteur à l’hebdomadaire Forum de l’Université de Montréal, administrateur au Mouvement laïque québécois et à l’Association humaniste du Québec.

Auteur de Aux sources de l’anthropomorphisme et de l’idée de Dieu et codirecteur des ouvrages collectifs Heureux sans Dieu et Pour une reconnaissance de la laïcité au Québec.





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