Le doublage québécois : l’arnaque du siècle

Netflix préfère le doublage européen

Tribune libre

     Le doublage de Dune, le film de Denis Villeneuve sorti sur grand écran en 2021, a été réalisé au Québec 1. Mais si vous le visionnez via la plateforme Netflix, c’est la version doublée en France que vous entendrez (supérieure bien entendu à la nôtre, avec, en prime, une Charlotte Rampling se doublant elle-même 2).


     Pareil pour Le Batman (2022) 3, La Matrice : Résurrections (2021) 4, Mission : Impossible – Répercussions (2018) 5, Fabriqué en Amérique (2017) 6, Insaisissable 2 (2016) 7, Mission : Impossible – La Nation Rogue (2015) 8, pour ne donner que quelques titres (ceux d’ici sont conservés) 9. Netflix avait le choix entre deux doublages, elle a choisi celui d’outre-Atlantique. Qui s’en est plaint ici ? Seules l’Union des artistes (UDA) et l’Association nationale des doubleurs professionnels y ont trouvé à redire 10.


     Vous ne trouverez pas en Netflix une ardente défenseuse du doublage québécois. Rappelons que l’entreprise a fait doubler les deux premières saisons de House of Cards 11 au Québec, puis a décidé de ne faire affaire qu’avec les doubleurs européens pour les saisons subséquentes. Les Québécois n’ont pas protesté.


     L’UDA et notre industrie du doublage nous font accroire depuis 30 ans que nous méritons un doublage maison du fait de notre langue particulière. C’est l’arnaque du siècle, car le français employé généralement dans les doublages québécois n’a rien à voir avec celui que nous parlons (maints chercheurs l’ont démontré 12). Quant aux films doublés en joual, ils sont rares et la plupart du temps bébêtes, ce qui ne nous fait pas honneur.


     Il y a les films, mais aussi les téléséries. Nos industriels du doublage n’ont jamais répondu à cette simplissime question : pourquoi faut-il doubler les films ici quand la quasi-totalité des téléséries sont doublées en Europe et qu’elles satisfont les Québécois ?


     Avant, on disait aussi qu’il fallait doubler au Québec pour la raison que les films doublés en Europe sortaient bien après les nôtres. Or, ce n’est plus le cas aujourd’hui.


     Suis-je le seul à croire que notre gouvernement dilapide l’argent des Québécois en subventionnant, via de généreux crédits d’impôt, notre industrie du doublage ? Pendant que nos artistes authentiques en arrachent, nous aidons une industrie qui ne concourt en rien à notre épanouissement culturel. Contentons-nous du doublage européen et soutenons plutôt nos artistes qui enrichissent vraiment la culture québécoise.


 


Sylvio Le Blanc     https://voxophile.neocities.org/















Total Recall : Mémoires programmées (2012)


https://fr.wikipedia.org/wiki/Total_Recall_:_M%C3%A9moires_programm%C3%A9es#Distribution


https://www.doublage.qc.ca/p.php?i=162&idmovie=3709


Cartographie des nuages (2012)


https://fr.wikipedia.org/wiki/Cloud_Atlas#Distribution


https://www.doublage.qc.ca/p.php?i=162&idmovie=3793


Le Réseau social (2010)


https://fr.wikipedia.org/wiki/The_Social_Network#Distribution


https://www.doublage.qc.ca/p.php?i=162&idmovie=3092


Deux Sœurs pour un roi (2008)


https://fr.wikipedia.org/wiki/Deux_S%C5%93urs_pour_un_roi#Distribution


https://www.doublage.qc.ca/p.php?i=162&idmovie=2089


Gangster américain (2007)


https://fr.wikipedia.org/wiki/American_Gangster#Distribution


https://www.doublage.qc.ca/p.php?i=162&idmovie=1983


Marie-Antoinette (2006) : l’action se passe en France !!!


https://fr.wikipedia.org/wiki/Marie-Antoinette_(film,_2006)#Distribution


https://www.doublage.qc.ca/p.php?i=162&idmovie=1806


Sept Ans au Tibet (1997)


https://fr.wikipedia.org/wiki/Sept_Ans_au_Tibet#Distribution


https://www.doublage.qc.ca/p.php?i=162&idmovie=1515


[10] « Dans ce contexte, la comédienne déplore également que les doublages québécois se retrouvent rarement sur Netflix, alors qu’environ 85 % des films qui sortent au cinéma ici sont doublés au Québec. Ils reprennent le doublage qui s’est fait ailleurs. Ils ont deux versions de doublage français, le québécois et, disons, le belge, et quand ils mettent ça sur Netflix [...], ils reprennent le doublage [de l’international]. C’est assez incompréhensible, soutient-elle. »


https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1349548/netflix-doublage-contenus-originaux-canadiens-quebec-uda




[11] Le Château de cartes au Québec : https://www.doublage.qc.ca/p.php?i=162&idmovie=3826




[12] Luc Ostiguy et Kristin Reinke, notamment : « Nos études préliminaires (Reinke et Ostiguy, 2012 ; Ostiguy et Reinke, 2015 ; Reinke et al., 2017) suggèrent cependant que la langue des versions québécoises (désormais VQ) se trouve passablement éloignée des usages lexicaux, morphosyntaxiques et phonétiques réels des Québécois. Ce décalage est attribuable au fait que les artisans de l’industrie du doublage, réunis autour de l’UDA, ainsi que les dirigeants des maisons de production de films demandent que les doublages soient produits dans un « français apparenté au français international » (désormais FI), une langue française qui serait délocalisée, donc la plus neutre possible. »


http://glottopol.univ-rouen.fr/telecharger/numero_31/gpl31_04reinke_et_al.pdf





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