Le discours de La Meute disséqué à l’université

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Sans surprise, c'est la présence grandissante de l'islam qui inquiète les Québécois


Après avoir étudié les échanges au sein du groupe La Meute pendant plus d’un an, deux chercheurs n’ont observé aucun appel à la violence ou à des gestes illégaux, mais une banalisation « inquiétante » des stéréotypes sur l’islam et du mépris envers les personnes de foi musulmane.


« La banalisation peut affecter le climat social et contribue à des actions nocives envers des groupes ou des individus telles que documentées dans les cas de crimes haineux à l’endroit des femmes et des membres de la communauté LGBTQ+ », concluent les chercheurs Samuel Tanner (Université de Montréal) et Aurélie Campana (Université Laval) dans un article qui vient d’être publié dans la revue universitaire Global Crime.


L’étude découle de l’analyse de toutes les publications (232) trouvées sur la page « privée » Facebook de La Meute entre octobre 2015 et septembre 2016, ainsi que dans les jours qui ont suivi l’attaque à la grande mosquée de Québec en 2017.


Le compte privé de La Meute se distingue de sa page « publique », puisqu’on ne peut y accéder que si on est membre et qu’on ne peut en devenir membre que si on est recommandé par quelqu’un qui en fait déjà partie.


Sur le plan idéologique, l’analyse montre clairement que les membres sont surtout unis par une peur de « l’envahisseur islamique ». Le groupe, rappellent les chercheurs, avait été créé en octobre 2015 par deux anciens membres des forces armées dans la foulée de la décision du gouvernement canadien d’accueillir des réfugiés syriens.


Le nombre de membres a déjà atteint 50 000 personnes, mais s’élèverait plutôt aujourd’hui à 40 000 adhérents. Les chercheurs ont par ailleurs constaté que « seulement un petit pourcentage d’entre eux (environ une centaine) est très actif sur la page ».


La peur de disparaître


Plusieurs publications s’en prennent au multiculturalisme. Une peur « profonde » de disparaître émane de nombreuses publications, comme celle-ci : « Les gens ont peur, j’ai peur… Je me sens seul. […] Je me sens violé, volé et rejeté par mon propre gouvernement inconscient, qui laisse une soi-disant religion dominer et s’étendre. »


La peur de voir une culture, ethnie ou histoire disparaître, notent les chercheurs, est « courante » dans les discours d’extrême droite. Or, La Meute s’inscrit plus particulièrement dans le courant « vigilantiste » de l’extrême droite, qui fait référence à leur rôle de gardiens autoproclamés de certaines valeurs, expliquent-ils.


Les professeurs Tanner et Campana soulignent toutefois qu’« à aucun moment » il n’a été question d’actions illégales sur la page Facebook du groupe.


Par contre, on y « encourage le mépris à l’endroit des membres de la communauté musulmane en réclamant leur exclusion et en démontrant de l’hostilité à leur endroit ».


De plus, « dans la plupart des publications, la différence entre l’islam et l’islam radical est floue, ce qui génère de la confusion », signalent-ils.


Il faudrait d’ailleurs, selon eux, mener d’autres recherches pour voir si la banalisation du mépris à l’endroit des musulmans peut être liée à des crimes haineux.




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