La réforme financière - Déficit de courage

Crise mondiale — crise financière



Président du Cercle des économistes à Paris, Jean-Hervé Lorenzi a résumé comme suit la réforme de l'industrie financière dans le monde: «Les États-Unis ont 20 sur 20, l'Europe a 0.» C'était avant, juste avant, que les députés européens adoptent des mesures balisant la chronologie de la distribution des salaires et primes des dirigeants et des courtiers. Pour faire court, il a été décidé que l'employé ayant droit à une prime recevrait 60 % aujourd'hui et 40 % dans trois ans. L'objectif souhaité? Réduire la prise de risque excessive.
Autrement dit, si Les États-Unis ont toujours 20 sur 20, l'Europe a 1. Car sur le reste, tout le reste, les 27 membres de l'Union européenne traînent des pieds comme des mains. Prenons les fonds spéculatifs ou hedge funds. À Bruxelles comme à Strasbourg, on voudrait que des passeports européens soient accordés à des gestionnaires. Le hic, c'est que la France ne veut pas que ceux parmi ces derniers qui travaillent pour des fonds implantés dans des pays tiers en possèdent. Conséquemment, le vote a été reporté à septembre, soit deux ans exactement après le début de la crise qui a ébranlé tous les piliers de la finance.
Attardons maintenant aux produits dérivés dont les plus toxiques d'entre eux ont été à l'origine du chaos dont les répercussions se font toujours sentir. Le débat sur la question a été engagé il a plusieurs mois déjà. Y a-t-il eu des progrès? Pratiquement aucun. Au Royaume-Uni, intérêt de la City bien compris, on poursuit un bras de fer avec le duo Paris-Berlin qui voudrait que la vente à découvert de certains véhicules financiers soit interdite.
Après les produits dérivés, passons à la réforme, essentielle, de la supervision financière. Les députés européens militent pour un renforcement des pouvoirs dont disposent les diverses agences de surveillance. Dans ce combat, ils ont pour adversaires des gouvernements qui entendent protéger leurs intérêts nationaux, qui jonglent encore et toujours avec l'intérêt particulier au détriment de l'intérêt général. Sur ce front également, le vote a été reporté à l'automne.
Les agences de notation? Après avoir poussé des cris d'orfraie en direction de Moody's et consorts qui, rappelons-le, donnaient la meilleure des notes aux subprimes peu avant l'implosion des ces derniers, les Européens ont adopté profil bas. Pendant que les uns chipotent, les autres font silence sur la création d'une agence européenne réclamée avec force il y a un an encore.
Lorsqu'on observe l'ensemble, on constate qu'encore une fois, les membres de l'UE marchent en ordre très dispersé. Par manque de courage politique ou par réflexe nationaliste, on reste là où l'on était avant une cascade de pertes qui avait obligé ces mêmes gouvernements à voler au secours d'acteurs et d'établissements responsables de la débâcle. Résultat, les États-Unis ayant agi avec plus d'ardeur que les Européens, le pouvoir de donner le «la» en matière financière leur revient.


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