Les défenseurs de WikiLeaks mènent une cyberguerre contre ceux qui s'en prennent au site spécialisé dans la divulgation de documents secrets. Les attaques ne font que commencer, a averti hier le chef d'un groupe de pirates informatiques.
Le site Internet fondé par l'Australien Julian Assange est dans le collimateur du gouvernement américain depuis qu'il a commencé à divulguer, il y a dix jours, 250 000 télégrammes diplomatiques confidentiels du département d'État.
Des cyberpirates ont notamment lancé les hostilités contre les entreprises qui privent WikiLeaks d'accès à des moyens financiers. Parmi elles: Visa, MasterCard et PayPal.
Le site Web du gouvernement suédois a aussi été mis hors service plusieurs heures, ont rapporté hier les médias suédois.
«C'est une guerre informatique, nous voulons qu'Internet reste libre et ouvert à tous, comme il l'a toujours été», a déclaré un supposé membre du groupe de pirates informatiques «Anonymous» à la British Broadcasting Corporation (BBC).
L'«opération Riposte» aurait mis knock-out pendant plusieurs heures le site de l'émetteur de cartes de crédit Visa et aurait perturbé les activités de son concurrent MasterCard.
Anonymous avait annoncé une attaque similaire contre le site d'Amazon, qui avait cessé la semaine dernière d'héberger le site de WikiLeaks, lui reprochant d'avoir violé son règlement. Mais, plus d'une heure après le moment prévu de l'attaque, le site fonctionnait toujours normalement.
Le site de l'ex-candidate à la vice-présidence des États-Unis Sarah Palin a également été dans la mire des pirates. La figure des ultraconservateurs américains avait déclaré que M. Assange avait du «sang sur les mains».
Les belligérants utilisent une version modifiée d'un logiciel normalement utilisé pour tester des sites Web, a expliqué l'analyste Paul Mutton. Cette technique permet aux internautes les plus néophytes de participer à ces attaques dans le cyberespace.
Quelque 2000 ordinateurs ont pris part aux attaques mercredi — un nombre modeste, a dit M. Mutton, mais suffisant pour paralyser le site principal de MasterCard pendant plusieurs heures. «J'ai été surpris par l'efficacité [de l'attaque]. On n'a pas besoin d'un nombre énorme de gens pour lancer une attaque de ce genre», a-t-il souligné.
WikiLeaks a nié hier tout lien avec Anonymous. «Nous ne condamnons ni n'applaudissons ces attaques. Nous pensons qu'elles ne sont que le reflet de l'opinion publique» en ce qui concerne les attaques dont WikiLeaks et son fondateur sont victimes, a fait savoir son porte-parole Kristinn Hrafnsson.
Recherché en Suède pour une affaire de viol et d'agression sexuelle, son fondateur, Julian Assange, est actuellement sous les verrous au Royaume-Uni. En dépit de la détention de son fondateur, WikiLeaks a continué à publier hier les télégrammes diplomatiques américains.
La haute-commissaire aux droits de l'homme de l'ONU, Navi Pillay, s'est dite inquiète hier des pressions exercées sur les compagnies offrant des services au site WikiLeaks. «Je suis préoccupée par des informations faisant état de pressions exercées sur des compagnies privées, dont des banques, des sociétés émettrices de cartes bancaires ainsi que des fournisseurs de sites Internet, pour qu'elles ferment leurs lignes de crédit pour des dons destinés à WikiLeaks», a-t-elle affirmé.
De son côté, le premier ministre de la Russie, Vladimir Poutine, a fait valoir hier que les pays occidentaux ne sont pas en position de donner des leçons de démocratie. «S'il s'agit de démocratie au sein plein du terme, pourquoi cachent-ils M. Assange en prison? Qu'est-ce que c'est, la démocratie?», a-t-il affirmé. «Alors, vous savez, comme on dit à la campagne, certaines vaches peuvent meugler, mais il vaut mieux que la vôtre se taise. Je renvoie donc la balle à nos collègues américains. Il faut commencer par balayer devant sa porte», a-t-il ajouté.
Interrogé sur les messages diplomatiques confidentiels qui le dépeignaient comme un gouvernant de type «mâle dominant» à la tête d'une bureaucratie corrompue, Vladimir Poutine a rétorqué: «Pensez-vous que le service diplomatique américain soit une source d'informations très fiable? Le pensez-vous?»
Le président sortant du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva, a aussi protesté contre la détention du fondateur de WikiLeaks, Julian Assange. Pour lui, «le coupable n'est pas celui qui divulgue [les télégrammes] mais celui qui les écrit. Il faut accuser ceux qui ont écrit ces bêtises».
La semaine dernière, il avait minimisé l'affaire, soutenant que les documents concernant le Brésil étaient «de si peu d'importance qu'ils ne méritaient pas d'être pris au sérieux» et avait ironisé sur «les bêtises» commises par la diplomatie américaine.
En Australie, quelque 250 manifestants sont descendus dans les rues de la troisième ville du pays, Brisbane. «Depuis quelques semaines, nous assistons à une campagne mondiale contre WikiLeaks et son projet de rendre les gouvernements plus transparents, a affirmé l'organisatrice de la manifestation, Jessica Payne. Nous sommes ici aujourd'hui pour défendre WikiLeaks et notre droit à la liberté d'information.»
Au Mexique, une plaque commémorative a été inaugurée, hier soir, au Club des journalistes de Mexico, en l'honneur de Julian Assange, «pour sa contribution à la conscience de l'humanité en donnant les preuves de ce que beaucoup de nous savaient déjà».
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D'après Reuters, l'AFP et l'AP
La première cyberguerre mondiale
Armés de 2000 ordinateurs, les défenseurs de WikiLeaks attaquent ceux qui s'en prennent au site spécialisé dans la divulgation de documents secrets
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