La paix est possible

je crois qu'une entente est possible, mais seulement si certaines conditions improbables sont au rendez-vous

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Le cercle vicieux : colonisation, résistance, répression

Le Saban Forum, qui s'est déroulé à Jérusalem il y a 10 jours, a réuni notamment l'homme d'affair (sic) israélien Haim Saban, la secrétaire d'État américaine Condoleezza Rice, l'ex-premier ministre britannique Tony Blair et le premier ministre israélien Ehoud Olmer. (Photo AP)

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Annapolis n'est pas encore sur l'écran radar des Canadiens, mais ce sera bientôt le cas. Au cours des prochains mois (les Américains n'ont pas spécifié quand), les négociateurs palestiniens et israéliens se rencontreront à Annapolis, au Maryland, à l'invitation de l'administration Bush. Ils tenteront alors de renverser les échecs des négociations de paix de Camp David et de Taba.



Le succès est-il possible? Après avoir passé une semaine en Israël, où j'ai écouté Condoleezza Rice, Tony Blair et des responsables de sécurité américains et israéliens au Saban Forum à Jérusalem, et où j'ai visité le nord d'Israël avec le Comité Canada-Israël, je crois qu'une entente est possible, mais seulement si certaines conditions improbables sont au rendez-vous.
Annapolis mettra à l'épreuve la thèse selon laquelle des ennemis sont plus enclins à faire la paix quand ils sont faibles plutôt que forts. Le premier ministre israélien, Ehoud Olmert, est affaibli par un scandale et la colère des Israéliens au sujet de l'opération militaire au Liban de l'année passée.
Quant à son vis-à-vis palestinien, Mahmoud Abbas, il est affaibli par la prise de contrôle par le Hamas de la bande de Gaza et la recrudescence de la violence des derniers jours. Plusieurs maires du Hamas contrôlent également des villes importantes comme Nablus, Tulkarm et Qalqilya.
Si Abbas revenait d'Annapolis les mains vides, son avenir personnel et politique serait brutal et court. Si Olmert échouait, il pourrait subir une défaite électorale et serait relégué aux oubliettes.
Les États-Unis sont également affaiblis: dans la dernière année de son mandat, le président est embourbé en Irak. Face un échec à Annapolis, Bush ne pourrait pas simplement être crédité d'avoir essayé. Ce serait la fin de tout espoir pour un héritage positif.
Ennemi commun
Les Israéliens, Palestiniens et Américains partagent un ennemi commun, l'Iran. Ses alliés meurtriers, le Hezbollah et le Hamas, affrontent maintenant Israël au nord et au sud. Si Abbas échouait à Annapolis, les alliés iraniens contrôleraient bientôt la Cisjordanie, menaçant Jérusalem et Tel-Aviv. Israël, l'Égypte, l'Arabie Saoudite et les États du Golfe craignent tous la puissance nucléaire qu'est l'Iran, et doivent travailler ensemble afin de contrer le régime de Téhéran.
Le roi Abdallah, de Jordanie, l'allié le plus important d'Israël dans la région, s'inquiète de l'influence grandissante de l'Iran, une menace à son trône. Le succès à Annapolis est donc essentiel pour que les Américains puissent créer une alliance d'États modérés et contrer le régime révolutionnaire iranien.
Face à ces faiblesses stratégiques et menaces communes, les Palestiniens, Israéliens et Américains reconnaissent qu'un échec à Annapolis doit être évité.
La question centrale devient donc la mesure de la réussite à Annapolis. Quel est le minimum que chaque partie doit ramener de la table de négociations? Les deux parties visent le même objectif: vivre en paix sans peur de violence. Elles reconnaissent qu'elles ont besoin de l'autre pour atteindre ce but.
Même si la clôture de sécurité dressée par Israël a essentiellement empêché les attaques suicides, elle demeure une importante source de discorde. Une force de sécurité palestinienne crédible est la meilleure solution pour Israël, puisqu'aucune clôture de sécurité ne peut empêcher les attaques aux rockets Katyusha et au mortier. De l'autre côté, l'Autorité palestinienne, autant qu'Israël, a besoin d'une force sécuritaire efficace. Un retrait complet d'Israël de la Cisjordanie sera une réussite seulement s'il en résulte un avenir stable pour les deux parties, au lieu de la guerre meurtrière entre factions que le Hamas pourrait éventuellement gagner.
Puisque les chemins vers un avenir plus prometteur doivent se croiser, tant pour les Israéliens que les Palestiniens, la communauté internationale doit tout faire afin que cette occasion en or ne soit pas ratée. Le Canada a un rôle à jouer. Notre voix est écoutée par les autres pays, et nous devons nous en servir.
Une des devises de notre système constitutionnel est "paix, ordre et bon gouvernement". Plusieurs de nos institutions comme la GRC, la Cour suprême, Élections Canada et la Vérificatrice générale sont admirées internationalement. Si le renforcement du système judiciaire palestinien est essentiel pour une paix durable, le Canada doit envoyer des avocats, policiers et juges, et financer la restauration de la loi et l'ordre. (…)
La paix sera au rendez-vous à Annapolis, non pas parce que les Israéliens et Palestiniens tenteront un rapprochement, mais plutôt parce qu'ils sont exténués et unis par la peur. Il est de l'intérêt du Canada que les deux parties s'entendent.
Il est donc important d'être attentif à ce qui se passera à Annapolis, et d'être présent et généreux quand viendra le temps d'exercer notre leadership. (…)
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Michael Ignatieff
L'auteur est le député d'Etobicoke-Lakeshore à la Chambre des communes et chef adjoint du Parti libéral du Canada.
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