La grande cassure

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Le PQ se dirige vers une énième « refondation »

La souveraineté du Québec est-elle inéluctable ? Réponse courte : non. Le Parti québécois est-il éternel ? Non plus. Au bout de 20 ans de déclin, ces questions, le Parti québécois devra se les poser. Sans complaisance ni déni.


Et surtout, celle-ci : comment reprendre le bâton du pèlerin de l’indépendance, alors que les péquistes l’ont eux-mêmes laissé tomber depuis le dernier référendum ? Car s’il est vrai que les raisons du déclin du PQ sont multiples, une domine toutes les autres.


Cette raison est la mise en veilleuse répétée de son option depuis 20 ans dans l’espoir trompeur d’en récolter le pouvoir. Le « virage identitaire » de la charte des valeurs suivi de la convergence refusée par Québec solidaire lui assénant le coup de grâce.


Privé de sa raison d’être, le mouvement souverainiste, dont le PQ, le Bloc québécois et ses alliés traditionnels, s’est disloqué. Flairant la belle affaire, la CAQ et QS festoient sur ses restes.


Coup de grâce


La réalité est claire. À force d’oublier sa raison d’être, le PQ a cessé d’être utile. En taisant son option, il a aussi perdu son carburant le plus précieux : les jeunes. Elle est là, la grande cassure. Les générations précédentes ont été politisées par le grand débat souverainiste-fédéraliste.


Les plus jeunes, eux, ont grandi dans le vide. Un vide créé par le double silence du PQ sur la souveraineté et des libéraux sur un fédéralisme renouvelé devenu impossible.


Avant son décès, Jacques Parizeau, d’une lucidité brutale, disait du PQ qu’il était devenu un « champ de ruines ». Jusqu’à sa mort récente, Bernard Landry, tout au contraire, s’est fait espérant. En cela, ils ont préfiguré les deux grands pôles actuels de la famille souverainiste.


D’un côté, il y a ceux qui, comme M. Parizeau, savent la souveraineté plus nécessaire que jamais, mais dont le froid constat est que les dommages étant ce qu’ils sont, elle ne se réalisera peut-être pas.


De l’autre, il y a ceux qui, comme M. Landry, croient non seulement en la nécessité de l’indépendance, mais aussi à son inéluctabilité presque naturelle. Pendant que se jouera la survie de l’idée même d’indépendance, les porteurs de ces deux perspectives devront pourtant travailler ensemble.


Refondation ?


Leur plus grand défi, il est là. Comment marier la lucidité et l’espoir ? Comment le faire au moment même où, en plus, une CAQ nationaliste s’installe solidement au pouvoir. Durement affaibli, le PQ trouvera-t-il les moyens de ramer dorénavant à contre-courant ? Car c’est bien de cela qu’il s’agit.


Pour certains, dont l’ex-député péquiste Jean-Martin Aussant, l’heure est à la refondation du mouvement souverainiste. On y devine le souhait d’un nouveau véhicule politique, moderne, indépendantiste et ouvert aux communautés culturelles rebutées par la charte des valeurs.


En même temps, d’autres refuseront de saborder le PQ pour le faire. D’autres rentreront simplement dans leurs terres. D’autres encore, toujours souverainistes, auront néanmoins fait leur deuil de sa faisabilité dans un horizon raisonnable. Une partie d’entre eux choisit ou choisira la CAQ ou QS.


Voilà la pleine mesure de ce qui attend les leaders souverainistes, les citoyens dont ça demeure le rêve et les militants restants qui, discrètement, attendent le signal d’une possible renaissance. Pour cette idée d’un pays, les prochaines années seront décisives.