La défaite apparente des promoteurs d'un nouvel ordre mondial

Tribune libre

Ce texte se veut une réaction à l’article de M. Richard Le Hir portant sur le refus du Parlement britannique d’appuyer la volonté de son Premier Ministre, David Cameron, d’entrer en guerre contre la Syrie dont l’intitulé est Une défaite majeure pour les promoteurs du Nouvel ordre mondial.
Voici quelques commentaires et réflexions que je me permets de partager avec vous.
D'abord, M. Le Hir laisse entendre qu’il y a comme une erreur de la part des États-Unis dans la contradiction apparente entre leur soutien des islamistes intégristes en Syrie, à l’œuvre pour renverser le Président Assad, et leur présumée traque ailleurs dans le monde par ces mêmes USA.
À mon avis, il n'y a aucune erreur à ce qu’en Syrie et ailleurs dans cette région du monde, la mouvance islamiste intégriste (Al Quaïda, Al Nosra et bien d'autres groupes encore) soit soutenue par les États-Unis de manière directe ou indirecte. Le caractère indirect se réfère ici à des alliés de l’Empire américain comme le Quatar ou l'Arabie Saoudite qui financent les mercenaires à l'œuvre en Syrie ou à d’autres alliés comme la Jordanie et la Turquie qui collaborent à la formation de ces mercenaires présentés comme des "rebelles" syriens.
Bref, il ne s'agit aucunement d'une erreur mais d'un soutien qui est apporté de manière à ce que ces groupes prennent l'expérience indispensable pour devenir d’importantes et véritables nuisances à l'intérieur des États chinois et russes puisque ces États ont d'importantes minorités musulmanes et qu'il faut préparer l'affrontement qui se dessine.
On ne peut limiter les multiples phénomènes qui sous-tendent la mondialisation aux aspects commerciaux, industriels et financiers et surtout ignorer le fait que les avantages et les bénéfices de celle-ci ont jusqu’à ce jour, généralement été accaparés par les dirigeants de l’Empire et leurs alliés en laissant des miettes pour leurs propres citoyens.
Il faut constamment garder à l’esprit que les bénéfices sociaux et les avantages que les citoyens de l’Empire se voient offrir par l’intermédiaire de leur État-providence (assurance-santé, assurance-revenu, retraites, etc.) sont d’abord et avant tout fonction d’un endettement dont eux-mêmes et leurs enfants sont et seront responsables.
Les véritables dirigeants, c’est-à-dire ceux qui contrôlent la monnaie fiduciaire, n’ont que rarement payés dans l’Histoire même s’il arrive que leurs mandataires, souvent des représentants politiques qui deviennent les boucs émissaires tout désignés, payent soit de la perte de leur pouvoir, soit de la perte de leur vie : le Français Louis XVI, le Russe Nicolas II de Russie, le Roumain Nicolae Ceaușescu et tellement d’autres à titre d’exemple.
Je pense ici à tous ces autres qui ont eu la vanité de penser qu’ils pouvaient véritablement dicter un agenda qui rentrait en contradiction avec celui des véritables maîtres du monde (les financiers de l’Empire qui contrôlent l’émission de monnaie) : John F. Kennedy des USA, Saddam Hussein d’Irak, Mossadegh d’Iran, Allende du Chili, ou Sadate d’Égypte, etc.
De surcroît, en période de disette et a fortiori de pénurie, l’Histoire nous apprend que la guerre est malheureusement inévitable. Et les ressources sont non seulement rares mais en raréfaction croissante et les besoins sont non seulement grands mais grandissants. Bref, malgré que je sois optimiste et ardent croyant en l'inventivité et l'ingéniosité humaines, je ne vois aucune solution à court terme au règlement de ce dilemme antérieur relatif au couple ressources-besoins.
En environ 150 ans, la population a septuplé et la quantité de ressources est restée inchangée. D'autant que les solutions, si elles existent, doivent être à très court terme puisque le temps presse. Au-delà de l’inventivité et de l’ingéniosité des hommes, il reste bien sûr les océans aux ressources présumées ou connues mais si difficiles (lire coûteuses), voire impossibles à exploiter dans l’état actuel et le futur prévisible de la technique.
Dois-je rappeler qu'environ 20 % du globe (OCDE + élites dirigeantes des pays alliés hors-OCDE) consomme environ 80% de ce que l'écosystème de la planète Terre génère, que cet écosystème est fragile et en danger et qu'il faudrait bien davantage que cette double capacité d'inventivité et d'ingéniosité pour résoudre l’enjeu de l'écart grandissant entre les ressources et les besoins et pas seulement sur le plan énergétique.
Aussi, si vous voyez la défaite du Premier Ministre David Cameron devant le Parlement britannique et le recours prochain de la part du Président américain Barack Obama aux représentants du peuple américain, les députés et les sénateurs, comme des victoires servant à combler un déficit démocratique croissant, je pense sincèrement que vous n'avez pas perçu le fait que la tentative d'établissement d'un Nouvel ordre mondial est impossible à arrêter, et surtout pas par nos illusoires démocraties de pacotille et d'apparence.
Bref, cette défaite de Cameron et ce recul provisoire de sa part (assez prévisible pour un Premier Ministre en situation minoritaire dans son propre parlement) ainsi que ce recours d'Obama (aussi en situation minoritaire dans la Chambre des représentants dominée par le Républicains) ne serviront, à mon avis, qu'à mieux identifier les opposants afin de les neutraliser, voire de carrément les éliminer politiquement (un scandale est si vite arrivé) ou physiquement (un accident est aussi si vite arrivé)...
Le Nouvel ordre mondial est affaire de militaristes et de financiers.
Bref, ceci étant dit, en ce qui a trait au Québec et à son avenir, je suis plutôt d'avis que seule l'éventuelle et probable guerre civile américaine qui résultera de l'échec de l’Empire à instaurer un Nouvel ordre mondial qui maintiendrait son privilège exorbitant d’émetteur de la monnaie de réserve de la planète entière (élégante façon de parler du caractère hégémonique de l'empire) générera les ÉDA (États-Désunis d'Amérique).
Cette guerre civile pourrait permettre au Québec de s'affranchir et de prendre la juste mesure de ce que sont devenus les dirigeants de l'alliance anglo-canado-australo-néo-zélando-israélo-américaine et de leurs alliés circonstanciels, les vaincus de l’Europe de l’Ouest (Allemagne, Italie et France) et de l’Asie (Japon et Corée du Sud): de pauvres types dont la pauvreté, qui est d'abord et avant tout, toujours intellectuelle, ne leur aura pas permis de comprendre que les conditions économiques, financières, politiques, militaires et écologiques ne leur permettent plus de parasiter le reste de la planète à leurs seules fins comme ils le font depuis environ trois cents ans.
Sur le plan économique, les capacités productives sont très faibles tant sur le plan énergétique que sur le plan manufacturier à l'échelle de tout l'Empire et de ses principaux alliés. Ce n’est ni le mirage de l’imprimerie 3D ou celui du gaz et du pétrole de schiste qui permettront de relancer une croissance de la productivité qui n'aura été qu'une virgule (les derniers 150 ans) dans le très grand livre de l'Histoire et qui aura d'abord été permise par l'abondance du pétrole traditionnel aujourd’hui sur la voie rapide du tarissement.
Sur le dernier siècle, à l’échelle planétaire, le ratio de l’énergie extraite sur l’énergie consommée pour l’extraire serait passé de 100 barils extraits pour 1 baril consommé à 1,5 baril extrait pour 1,0 baril consommé avec les sables bitumineux et à un ratio, selon toutes probabilités, semblable à ce dernier pour le pétrole et le gaz de schiste. Quand le ratio sera de 1,0 pour 1,0, on restera chez soi dans son village ou comme l'Empire, on partira en guerre pour s’approprier les ressources des autres.
Cet esclave qu’est le pétrole traditionnel et qui a remplacé l’esclavage humain, est en fin de vie, mais est indispensable pour permettre à l’Empire de respecter ses engagements financiers et se relever d'un endettement pharaonique. Sur le plan financier, les capacités sont nulles eu égard à la montagne de dettes que l'Empire et ses alliés ne pourront jamais rembourser.
Sans compter que l’abondance relative d’énergie dans le passé (du pétrole traditionnel à 1$ le baril ou moins encore) a entraîné des choix d’urbanisation et de production des principaux biens et services (l’éducation, la santé, l’alimentation, etc.) aujourd’hui complètement impertinents, inappropriés et inopportuns au point de rendre nos sociétés insoutenables sur presque tous les plans.
On commence à peine à voir les signes annonciateurs de cet immense bond en arrière qui s’en vient : faillite de grandes institutions bancaires (Lehman Brothers, etc.), faillite de grandes sociétés de distribution d’énergie (Enron, etc.), faillite de grandes sociétés de production automobile (GM, etc.), faillite de grandes sociétés d’aviation (American Airlines, etc.), faillite de grandes métropoles (Détroit, etc.), faillite de grandes institutions culturelles (New-York City Opera, Orchestre symphonique de Philadelphie), etc.
Sur le plan politique, les capacités sont nulles avec une classe politique corrompue et complètement indigne à presque tous les niveaux, municipal, étatique, fédéral, et avec des électeurs et électrices qui ne veulent que des changements qui leur soient, encore et toujours, seulement et exclusivement positifs. Bref, les électeurs et les électrices représentent eux-mêmes d’importants obstacles aux changements structurels qu’il est impératif de faire mais qui ne se feront pas avant que la crise mette le monde à genoux.
Sur le plan militaire, les capacités technologiques sont grandes mais la première ressource indispensable pour gagner une guerre, ce sont les hommes qui peuvent occuper le sol et les promesses crédibles d’un avenir meilleur qui occupent l'esprit des vainqueurs et des vaincus.
En fait, l'Empire peut aisément gagner plusieurs guerres mais il ne dispose pas de ce qu'il faut pour gagner la paix et, seule celle-ci, permet de contribuer à générer la prospérité et par voie de conséquence, la pérennité d'un Empire. Sans compter que la paix est une condition nécessaire mais non suffisante, comme disent les mathématiciens, pour la génération de la prospérité ou sa pérennité.
L'élan impérial des USA s'est stoppé net dès 1970, l'année où les USA ont arrêté d'être un exportateur net d'énergie (lire de pétrole) pour devenir un importateur net aux besoins croissants et utilisés à très mauvais escient en donnant de très mauvaises réponses aux questions fondamentales et de très mauvaises solutions aux problèmes fondamentaux eu égard aux contraintes incontournables que sont la rareté grandissante des ressources de toute nature, les besoins grandissants des hommes et l’inertie toujours plus grande. Bref, la pérennité de l’Empire consisterait plutôt à mettre la main sur les deuxièmes réserves de pétrole et de gaz traditionnels de la planète qui sont en Iran.
Cependant, à court terme, à défaut de conquérir et de spolier les Iraniens (ce qui a déjà été fait dans les années 1950 par le renversement de Mossadegh, démocratiquement élu, et son remplacement par le Shah … de New-York), la conquête de la Syrie leur permettra à tout le moins de permettre à l'allié du Quatar de sortir leur gaz par gazoduc (beaucoup plus économique que par bateau) pour faire concurrence à la Russie qui contrôle 10% du pétrole traditionnel, 20% du gaz du gaz traditionnel et 40% de l'uranium utilisable de la planète.
Toute analyse géopolitique doit impérativement tenir compte de la variable énergétique et nous rappelle que les États n'ont pas d'amis mais qu’ils n'ont que des intérêts. Dans cette perspective, le Québec est très bien placé pour affronter le troisième millénaire en pouvant disposer de l’esclave hydroélectrique que représente notre patrimoine énergétique mais il nous faudra encore choisir le bon allié pour la suite des choses : l’acteur dominant des ÉDA, la Chine ou la Russie.
J’avais déjà fait valoir dans un court texte intitulé L’éclairante ronde des ratios le fait que le Québec ne compte qu’un habitant sur mille (1 ‰) de la Terre mais dispose d’un patrimoine édifiant qui lui donne une stature planétaire et en fait un partenaire de choix :
o 1 ‰ (Un millième) de la population mondiale (Soit 8 000 000 h. / 7 000 000 000 h.)
o 1 % de la terre et de l’air de la Terre (10 fois plus que le terrien moyen)
o 2 % des forêts de la Terre (20 fois plus que le terrien moyen)
o 3 % de l’eau douce de la Terre (30 fois plus que le terrien moyen)
o 6 % de l’aluminium de la Terre (métal du développement durable puisque peu coûteux à recycler) (60 fois plus que le terrien …)
o 12 % du feu (l’énergie électrique d’origine hydraulique) de la Terre (120 fois plus que …)
Dans l'espoir que ces quelques considérations auront été appréciées et seront utiles à vos réflexions, agréez mes salutations les plus cordiales.


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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    4 octobre 2013

    Le soutien des USA aux Islamistes radicaux apparaît incompréhensible pour qui pense que ce pays, «la plus grande démocratie du monde», est tourné vers la paix et la coopération entre les peuples. Le point que vous amenez, la politique du ver dans la pomme, soit l'insécurité croissante et l'insurrection intérieure en Chine et en Russie commanditée de l'extérieur, est plus vraisemblablement la politique de l'État profond américain. Rien d'autre ne peut expliquer aussi bien la «résurrection» de l'intégrisme islamique qui était marginal et en décroissance jusque dans les années 1970. Que cette force ne cesse de croître depuis la première guerre d'Afghanistan suppose que la «Guerre au terrorisme» n'est pas crédible et qu'elle est en réalité la guerre avec le terrorisme. La première guerre d'Afghanisatn C'était le premier Jihad, en tant que nouvelle piétaille de l'Empire, elle est le produit du cerveau de Zbigniew Brzezinski, exposé dans son livre Le Grand échiquier.
    Mais il y a danger. Cette géopolitique de superpuissance n'est jamais loin du chaos global car les forces mises en mouvement risquent à tout moment de déraper dans des directions qui n'étaient pas programmées. En regardant les choses aller, j'ai effectivement l'impression que c'est ce qui se déroule sous nos yeux. La domination du monde, la victoire contre l'ennemi identifié par Brzezinski,
    soit la Chine et la Russie, pourrait bien être une victoire à la Pyrhus sur une planète transformée en champ de ruines. Souhaitons mieux.
    Opération de financement secret
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Cyclone
    Première guerre d'Afghanistan
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_d'Afghanistan_(1979-1989)
    Gilles Verrier