Jean-François Lisée a fait une déclaration à la presse canadienne qui a eu son effet dans le ROC. Répondant à une question, à savoir si la Charte de la laïcité passerait le test de la Charte des droits de la Constitution canadienne en Cour Suprême, il a eu cette réplique :"..., le PQ contestera tout jugement de cour allant à l'encontre de sa charte de la laïcité limitant le port de symboles religieux dans les services publics.
Le PQ n'hésiterait pas à invoquer la clause nonobstant de la Constitution canadienne pour déroger aux arguments juridiques de la Charte canadienne des droits et libertés. (...)
Pour Jean-François Lisée, le patron ne sera pas la Cour suprême du Canada, mais le peuple du Québec. En entrevue avec La Presse Canadienne, M. Lisée a déclaré que s'il est élu, un gouvernement péquiste ne compte pas légiférer selon l'avis des juges canadiens, mais selon l'intérêt des Québécois. (...)
Cette déclaration a été reprise par le National Post ; le ROC découvre ainsi ce que signifie la gouvernance souverainiste. D'où les réactions délirantes qui donnent dans le racisme coutumier envers le Québec (*).
Ce conflit de légitimité qui se dessine entre la Charte de la laïcité du Québec et celle de Trudeau, était prévisible, dès l'adoption du Plan Larose par Pauline Marois, devenu depuis le Plan de gouvernance souverainiste. J’avais évoqué que ce rapport de force entre deux États servirait notre cause dans un texte dans Le Devoir en janvier 2008 (Pauline, l’important c'est Larose :
Et plus récemment, dans un texte publié sur Vigile en novembre 2008 (Le difficile changement de paradigme) sur la portée stratégique de la proposition de doter le Québec de sa propre Constitution, incluant une Charte de la laïcité : (...)La Constitution de l’État du Québec
Donc pour contrer la Constitution canadienne il nous faut, au nom du principe de l’équivalence (doctrine d’État), adopter en grande priorité une Constitution de l’État du Québec. Constitution d’État (et non de province), incluant une Charte des droits, une Charte de la laïcité et un Code de citoyenneté. Cette Constitution pourrait être adoptée, dans un premier temps, sous réserve des articles 41 et 45 de la Constitution canadienne ; elle contiendrait une clause de rupture à être activée en temps opportun.
Certains pensent qu’il faut plutôt attendre le lendemain du Grand Soir pour se doter d’une Constitution d’État, sinon on s’enferme soi-même dans la cage à castor canadienne. Il faut plutôt être d’avis que la vaste consultation publique menant à l’adoption de notre propre Constitution d’État (et non de province, j’insiste) serait l’occasion d’un exercice pédagogique extraordinaire, lequel permettrait au peuple de dessiner les contours plus précis d’un État souverain ; un pas concret vers la rupture.
Il est entendu que l’Assemblée nationale postulerait que notre Constitution a préséance sur la Constitution canadienne, suivant en cela la posture prise dans l’adoption de la Loi 99 qui répudiait la Loi C 20. Il est à prévoir que cela mènerait à un conflit de légitimité entre les deux Constitutions. C’est ici que la clause de rupture prend toute sa pertinence ; le peuple aurait alors à trancher entre une Constitution qui lui fut imposée, rejetée unanimement par l’Assemblée nationale, et celle qu’il se serait donnée démocratiquement. La démocratie étant l’adhésion raisonnée et volontaire à l’État, le choix n’aura jamais été aussi clair.
En s’assurant une majorité d’appui durant le parcours, on isolerait ainsi les forces du statu quo. Il y aurait là un avantage stratégique déterminant pour la suite de l’histoire, obtenu sans grand risque.
(...)
Dans un texte plus récent, publié sur Vigile en août 2011 (Une nation face à son destin), je maintenais que le Plan de gouvernance souverainiste était le bon, que le problème se situait au niveau de la direction politique du plan. Je posais la condition première pour que ce plan soit crédible :
La condition première pour rendre ce plan crédible comme stratégie d’État, c’est qu’il soit assumé avec carrure par la direction politique. Et c’est là que, de toute évidence, se pose le problème actuellement avec la Parti Québécois. Cette carrure, on l’a cherchée et il tarde qu’elle se manifeste
C'était en août 2011. Depuis l'équipe a pris du costaud. La récente déclaration de Jean-François Lisée sur la laïcité, une "posture assumée" pour défendre le programme de gouvernance souverainiste, dissipe mes dernières inquiétudes. On a donc un plan et une équipe qui a la carrure pour le porter. Il reste, pour certains, de comprendre sa portée stratégique immédiate pour la cause. Particulièrement aux idéalistes du Grand soir, prêts à remettre la souveraineté "à la semaine des 4 jeudis", alors même qu'elle se présente à nous le 4 septembre.
Déjà, sur une simple de déclaration de Jean-François Lisée, le ROC découvre ce que pourrait signifier la gouvernance souverainiste si le Parti Québécois forme le gouvernement. Et encore, il n'a rien vu de ce qui viendrait : Constitution de l'État du Québec et indépendance énergétique. Deux volets d'une stratégie d'État d'envergure qui ne feront qu'exacerber les divergences d'intérêts entre le Québec et le ROC. La réaction de profondes frustrations provenant du ROC, témoignent d'un sentiment d'impuissance (rapport de force) face à une stratégie dont il commence à peine à comprendre les tenants et aboutissants. Et à laquelle ils devront chercher une parade. Tel est leur défi.
Le nôtre c'est de ramener notre projet dans le champ du réel. De comprendre que notre État est le déterminant de la politique, le véhicule de notre projet, qu'il suffit d'en prendre le contrôle et d'agir immédiatement et avec détermination. C'est au bout de cette dynamique qu'on peut entrevoir la rupture. À condition de prendre le pouvoir, ce que certains se refusent.
On me reproche d'utiliser l’expression « idéalistes du Grand soir ». J'en faisais moi-même partie à l'arrivé de Pauline Marois à la direction du Parti Québécois, moment où j'ai joint le Parti Indépendantiste. Le Plan Larose qu'elle a adopté m'a forcé à une réflexion exigeante. J'en ai fait une lecture à partir des statuts et principes de la géopolitique pour en arriver à la conclusion qu'il s'agit du seul plan qui mène à la souveraineté (Merci M. Sauvé).
À l'occasion de cette élection historique, je vous demande de consentir vous aussi cet effort de rigueur pour examiner, aux mérites et dans le contexte, la crédibilité du Plan de gouvernance souverainiste, auquel monsieur Jean-François Lisée fait une contribution essentielle.
La crédibilité de la gouvernance souverainiste
La contribution de Jean François Lisée....
(*) Réactions délirantes du ROC
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13 commentaires
Archives de Vigile Répondre
25 août 2012- Les commentaires lus sur le Glob & Mail, et surtout sur le National Post, sont hallucinants de haine et d'ignorance (car les deux vont de pair vous le savez).
- Certains d'entre eux clament que dans ce divorce le Québec ne garderait rien, sauf sa part de la dette fédérale. Et bien sûr que Montréal et Gatineau seraient séparés en deux.
- Ils hurlent aux 8 milliards$ que le Canada envoie (par générosité!) au Québec, mais ils ne mentionnent JAMAIS les 55 milliards$ que le Québec envoie à Ottawa chaque année.
Sont-ils ignorants ou de mauvaise foi?
- Ils menacent qu'il n'y aurait plus de business entre le Canada et le Québec, ce délire montre qu'ils ne sont pas des businessmen. Les compagnies ne cesseront pas de vendre leurs choses au Québec parce que le Québec est devenu indépendant.
= Ce qu'il faut comprendre, c'est que ces gens (pas tous les Canadiens quand même) nous haissent parce que nous sommes "ceux qui ne pensent qu'à briser le Canada", et ils sont effrayés, d'où leur réaction de haine.
Il ne leur vient pas encore à l'idée que le but de la souveraineté du Québec n'est PAS de briser le Canada, il est de rendre le Québec souverain et d'obtenir les avantages qui viendraient avec.
- En même temps ces commentaires ont une chose intéressante: plusieurs de ces gens souhaitent que le Québec "parte", et même qu'il y ait un référendum canadien sur la question. Serions-nous en voie de triompher, un peu par défaut, par usure?
Quant à la gouvernance souverainiste, je m'en méfie (je préférerais plus expéditif) mais j'ai tendance à appuyer l'idée de M. Pomerleau.
Il est permis de croire que cette stratégie (à condition qu'un PQ au pouvoir la mette vraiment en oeuvre), de même que l'adoption de la Constitution du Québec, pourraient éventuellement déboucher, de façon presque "naturelle", comme devant un fait accompli, à la souveraineté.
Certains appelleront ça une "astuce"...
P.s.: Selon le Statut de Westminster, ordonné par Londres en 1931, les provinces, qui sont en réalité des ÉTATS FÉDÉRÉS, sont "LIBRES, INDÉPENDANTES ET SOUVERAINES".
C'est écrit noir sur blanc.
Ça pourrait - devrait être une arme de plus pour la souveraineté... puisque le Statut dit que nous le sommes déjà.
La chose qui est illégitime, c'est le GOUVERNEMENT FÉDÉRAL.
Archives de Vigile Répondre
22 août 2012M. Pomerleau,
Intéressante analyse, mais qui ne change pas grand chose à la situation. Car, le point principal est, et vous l'avez indiqué dans votre texte:
d’agir immédiatement et avec détermination.
Or, malgré tous les Lisée et Drainville du monde, le Pq (c-a-d le gouvernement de Pauline Marois, seule maître à bord pendant cinq ans) AGIRA-T-IL avec DÉTERMINATION?
Vous croyez que oui. Moi, je pense que non. J'espère sincèrement me tromper, mais rien dans ce que je connais de Pauline Marois n'indique une volonté forte D'AGIR.
Si le PQ voulait vraiment AGIR avec détermination, il me semble qu'il baliserait clairement dans son programme et dans sa campagne publicitaire ce qui en est.
La confiance: toute votre analyse repose là-dessus.
Je voterais Pq à tour de bras avec Aussant, Ferretti, Parizeau ou le Bourgault de 1980 comme chef, même avec un programme minimal...j'Aurais foi en une ACTION DÉTERMINANTE après la prise de pouvoir avec un de ces chefs.
Je soupçonne que vous auriez pu appuyer un Pierre-Marc Johnson avec un programme radical (moi, je l'aurais fait...) et je me serais drôlement gourré!!!
Tenir des entrevues aux journaux n'est pas encore agir et combien de politiques ont fait des déclarations pour ne plus les tenir ensuite? Espérer un référendum au plus vite et du même souffle s'engager et ne pas s'engager à en tenir un ou pas selon le moment opportun sont des éléments dont il faut aussi tenir compte.
J. Binette
Montréal
Archives de Vigile Répondre
20 août 2012Certains semblent oublier que cette déclaration fut faite par M. Lisée, qui actuellement se situe en tant que penseur de la souveraineté. Depuis longtemps , lui qui fut conseiller de Lucien Bouchard, en a reconnu la duperie et je ne crois pas que cet homme que je respecte, soit allé en politique pour nous mentir et qu'il connaît les intentions de Mme Marois. Et je suis heureux de l'apprendre.
Archives de Vigile Répondre
19 août 2012Encore le zigonage péquiste, resservi par le fidèle monsieur Pomerleau. Tous ces trucs se font à l'intérieur du Canada. Constitution provinciale, renouvellement de la loi 101 pour protéger notre langue, référendums, etc. La gouvernance souverainiste est une démarche autonomiste et étapiste, menant ultimement à l'isolation et à la défaite. Encore des tactiques de naufrageurs, servies pour nous détourner de notre objectif, c'est-à-dire, de se donner un pays à nous. L'indépendance du Québec ne passe pas par le réaménagement du Canada.
Stefan Allinger Répondre
19 août 2012J'ai lu les commentaires des lecteurs du National Post et je ne comprends pas que le modérateur tolère ce racisme et cette intolérance envers les québécois.
Example souvent repris: «il faudrait emprisonner et déporter les séparatistes».
Archives de Vigile Répondre
19 août 2012@ Jean-Claude Pomerleau et Marcel Haché
Merci pour cette analyse éclairante et pour le commentaire qui lui donne force.
Archives de Vigile Répondre
18 août 2012Merci pour ce texte Jean-Claude. C'est clair,et comme d'habitude d'applomb.
La seule chose que je crains c'est comme vous le soulignez l'encadrement ou la volonté politique.
En 1976 on pouvait accepter une part d'angélisme et de bonne foi dans les décisions politiques. Plus maintenant. Plus depuis la sinistre charte de Trudeau qui est un assaut direct contre le peuple québécois. J'aime l'idée d'envoyer paître la Supreme Court of Canada. Mais il faut que le gouvernement soit majoritaire.
J'espère que les pisse-vinaigre qui se sont répandus ici tout l'hiver et le printemps dernier vont finr par comprendre que ce n'est pas en votant QS ou ON qu'on va faire avancer les choses...
Archives de Vigile Répondre
18 août 2012Excellent texte à faire circuler; même si je ne suis pas friand du concept de gouvernance souverainiste.
Je crois comprendre que l'idée de cette gouvernance est de sortir le Canada du Québec en attendant d'officialiser le contraire.
Le concept a son charme.
Il faudra surveiller de près le PQ et lui mettre de la pression, s'il se fait élire.
Archives de Vigile Répondre
18 août 2012Je vais dire mon opinion franchement. Les accommodements raisonnables constituent à mon avis une immense diversion par rapport aux vrais problèmes du Québec, diversion encouragée par l’establishment.
La véritable priorité est que tous les citoyens du Québec sans exception puissent avoir accès à un revenu suffisant afin de vivre décemment et être heureux.
Au Québec, il y a des centaines de milliers de citoyens qui vivent l’insécurité alimentaire. Pas en Afrique, au Québec.
Une vie décente est LA priorité pour les citoyens. Une fois l’assurance d’une vie décente pour tous, le respect de la laÏcité des uns ou de la religion des autres doit aussi être assuré dans une société démocratique et libre bien évidemment.
Il faut souligner dans le cadre de cette campagne électorale que Québec Solidaire est le seul parti qui propose l’établissement d’un revenu minimum garanti permettant une vie décente pour tous et redonnant de la dignité aux citoyens les plus appauvris.
Archives de Vigile Répondre
18 août 2012Vous avez la mémoire courte, mes amis(es). N'avez-vous pas encore compris que la madame-en-question ne fait que chauffer ses troupes le temps d'une élection pour qu'ils aillent voter ? Elle les fait rêver, elle les fait saliver. La manoeuvre a été utilisée tellement souvent que s'en est devenu un réflexe conditionné. Une fois la campagne électorale passée ou la campagne de financement accomplie, allez hop ! Sous le tapis les discours "nationaleux" et on se remet tous à vaquer aux occupations quotidiennes, à gérer les "vrais affaires" comme y disent.
Cette fois-ci, si le PQ prend le pouvoir, se sera la gouvernance souverainiste. Se sera la politique des petites guéguerres fédérales/provinciales comme il nous a si bien habitué. Nous aurons droit encore une fois à la politique abjecte du quémandage pour l'obtention de broutilles mais qui finiront toujours par des RECULS. Alors là, nous serons encore face à notre impuissance, nous continuerons collectivement à jouer à ce que nous aimons le plus : jouer aux indignés et à la victime ! Et c'est alors que tous ensemble, nous nous lèverons pour scander avec ferveur mais en vain : Nous voulons un pays ! Nous voulons un pays !
Heureusement, nous sommes de plus en plus nombreux à voir clair, à ne pas se laisser berner, à être dégoûté par toute cette hypocrisie et à préparer activement la prochaine, LA VRAI !
Archives de Vigile Répondre
18 août 2012L'élection d'un parti souverainiste ferait ravaler sa salive au grand éliminateur en chef à Ottawa Stephen Harper ainsi qu'à plusieurs manipulateurs d'opinion qui tentent avec beaucoup de succès depuis le dernier référendum de faire croire au québécois qu'ils sont des canadiens à part entière atteints de la maladie d'Alzheimer. Avec la complicité de Jean Charest, le premier ministre des fédéralistes du statu-quo, les Québecois n'espèrent rien d'autre que revoir un jour le retour les Nordiques dans un nouvel amphithéatre; les contrats maritimes de plusieurs milliards, le financement des partis politiques, les nouvelles règles de l'assurance-emploi, la destruction du régistre des armes à feu, le scandale financier d'achat des F-35, ect... c'est de la petite bière dans l'océan de notre ignorance.
Marcel Haché Répondre
18 août 2012Le simple fait que le P.Q. se réserve le droit de décider de l’agenda s’il était élu, qu’il en a terminé définitivement avec le référendisme, cela est suffisant pour permettre tous les espoirs. Autrement dit, ce n’est pas le référendum, non plus qu’une élection référendaire qui est le déterminant, c’est le pouvoir lui-même, seul capable de revendiquer la légitimité. Tel est le système politique (britannique) qui est notre lot, le seul compris à Ottawa.
La fédération canadienne court un bien plus grand risque en face d’une gouvernance souverainiste du gouvernement québécois que des menaces au référendum qu’un gouvernement péquiste pourrait faire. Enfin, le fédéral est totalement insensible à une élection référendaire au Québec (les sondages seraient là pour lui mettre la puce à l’oreille advenant la montée d’une telle avenue) et il sait, d’autre part, comment contrarier un référendum. Le choix des moyens n’est pas grand mais il existe véritablement. La différence, c’est le Pouvoir. Sans lui, la gouvernance souverainiste est incapable de faire rêver. Le Pouvoir pourrait donc agir comme une étincelle…
Archives de Vigile Répondre
18 août 2012On verra, comme dit le primate culturel et déficient linguistique François Legault - l'expression est de Yves Michaud.
Dans 5-10 ans, qui sait, on sera encore là à nous rabattre les oreilles avec la gouvernance souverainiste et J.C. Pomerleau va encore écrire des articles pour nous faire avaler des couleuvres. Cela aura permis à une autre génération de petits politiciens professionnels provinciaux d'aller se constituer de bons fonds de pension avec l'argent public et on sera probablement encore dans le Canada.
On jugera aux résultats, pas aux promesses électorales et aux boules de cristal achetées chez Canadian Tire(d).
Qui vivra verra, verrat...
Pierre Cloutier