Comment on manipule les statistiques pour grossir la minorité anglophone

La construction politique d'une nouvelle minorité anglophone au Québec

Le fédéral à la rescousse de la communauté anglophone du Québec.

Tribune libre

Ce commentaire pose une question fondamentale qui n'est pas souvent abordée dans les médias. Qui est anglophone au Québec ? J'ai pris connaissance du Rapport (L'épanouissement des communautés anglophones du Québec: du mythe à la réalité, publié en mars 2011) du Comité sénatorial permanent sur les langues officielles qui s'est penché sur la situation des communautés anglophones au Québec en 2010-2011.
Ce Rapport, que je vous recommande de lire, manipule les chiffres pour gonfler la minorité anglophone du Québec (994 723 personnes) et en faire l'équivalent de toutes les minorités francophones et acadiennes du Roc ( 997 100 personnes). Les chiffres, que ce Rapport produit, sont basés sur le recensement de 2006.
Il semble bien que nous assistions à un glissement sur cette question.
Le Rapport du Comité sénatorial permanent des langues officielles, signé par de nombreux francophones dont Andrée Champagne et Pierre de Bané, construit une nouvelle minorité anglophone. On définit la communauté anglophone non plus à partir de la langue maternelle mais d'un autre critère pris dans les recensements du Canada: première Langue Officielle Parlée (PLOP).
Ce critère sert à construire politiquement une nouvelle minorité anglophone, car en plus des personnes dont la première langue officielle parlée est l'anglais, on ajoute arbitrairement à ce nombre, la moitié des personnes qui se disent bilingues au Québec. Nous le nommerons le PLOP modifié.
Ce changement est crucial et n'est sûrement pas innocent car il a comme résultat d'augmenter significativement la proportion de cette communauté au Québec.
Selon les données du recensement de 2006 (le Rapport a été publié en 2011 et s'appuie donc sur le recensement de 2006), la communauté anglophone représenterait au Québec, selon la critère de la langue maternelle, un taux de 8,2 % alors que selon celui du PLOP modifié, ce taux atteint 13,4%.
Il soutient ainsi que la minorité anglaise au Québec est presque aussi importante que les communautés françaises hors du Québec ( 997 100 personnes). Cette énormité justifie les sommes ( plus de 145 millions de $)que les divers ministères fédéraux donnent à la communauté anglaise, à hauteur du 13,4 %.
En utilisant cette méthodologie statistique arbitraire, le Rapport reprend toujours les données du PLOP modifié pour justifier sa politique d'aide. À la page 86, du dit Rapport, on peut lire: " : (...) Si l'on tient compte des données du recensement 2006 sur le PLOP, l'effectif de la minorité anglophone est à peu près semblable à la minorité francophone à l'échelle canadienne".
En appliquant ce critère (PLOP modifié) sur les données de 2011, nous arrivons au nombre de 1 058 250 personnes anglophones, soit 13,5 % de la population. Dans cette même logique, nous obtenons 6 684 130 francophones, soit un taux de 85,5 % et 73 580 allophones, soit un risible 1%.
Dans ce Rapport, on ne mentionne jamais les taux des francophones (85,5 % en 2006) et des allophones (0.9% en 2006 ) que cette méthode statistique produit; l'important, c'est de grossir le nombre d'anglophones au Québec et justifier les sommes données.
Cette manipulation passe sous silence la presque disparition des allophones au profit d'un mythique nombre (994 723 personnes) que les organismes de défense des anglophones reprendront comme une vérité absolue.
Le Quebec Communauty Groups Network (QCGN) a participé et collaboré étroitement aux travaux du Comité sénatorial. C'est un détournement des chiffres fait par ce Comité permanent qui s'est promené à travers le Québec pour entendre les problèmes de ces communautés anglophones du Québec.
Ce Comité a refusé ainsi les critères de la langue maternelle ou de la langue le plus souvent parlée à la maison pour privilégier le critère PLOP modifié qui va ainsi grossir le plus la communauté anglophone.
Plus important encore, si nous reprenons les deux critères: la langue maternelle et le PLOP modifié pour déterminer la proportion des personnes anglophones dans la ville de Montréal, nous obtenons 12,7 % selon la langue maternelle et 28 % selon le PLOP modifié, soit plus du le double.
Quand les associations de défense des communautés anglophones monteront au front pour dénoncer la réforme de la loi 101, dites-vous que ces associations nous opposerons ce chiffre mythique: 1 058 250 anglophones au Québec
Il faut dénoncer cette falsification car personne ne se rappellera que ce chiffre mythique de plus 1 000 000 d'anglophones vient d'une construction statistique et politique arbitraire frisant la malhonnêteté intellectuelle.


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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    17 décembre 2012

    Monsieur Archambault
    Lorsque que vous touchez à une corde sensible comme la minorité anglophone du Québec; les gens bloquent comme c'est pas possible. Avec le nombre de personnes qui ont lu votre texte, vous devriez avoir un minimum de 15 commentaires. Je n'arrête pas d'écrire dans mes commentaires sur Vigile que nos gouvernements de provinciaux (PQ, PLQ) ne gouvernent qu'en fonction de la minorité anglophone du West Island au lieu de gouverner pour la majorité québécoise. Plus colonisés que ça tu meurs! Rien ne change ici au Québec! Continuons à nous faire enc....! Dans 50 ans si nous existons encore; nous continuerons à radoter les mêmes complaintes collectives comme le phoque en Alaska.
    André Gignac 17/12/12

  • Archives de Vigile Répondre

    17 décembre 2012

    @ Pierre Tremblay
    Belle diversion, le hockey, pour faire oublier aux gens tout ce qui se trame à leur désavantage. J'aimerais que la grève dure toute la saison; ça l'aiderait peut-être un peu les gens à se politiser davantage afin qu'un jour, nous puissions enfin nous sortir de cette prison aliénante qu'est le fédéralisme "canadian' qui bloque toute notre évolution collective.
    André Gignac 17/12/12

  • Archives de Vigile Répondre

    17 décembre 2012

    très intéressant comme article. Depuis que les conservateurs ont aboli l'obligation de répondre aux sondages de statistiques canada, je me demandais toujours qu'est-ce qu'ils cherchaient à faire. Vous me donnez la réponse, il y a de l'argent en arrière de ces recensements, cela je l'ignorais. Le fédéral aide les communautés en fonction de leur nombre. Donc en jouant avec les chiffres on peut influencer le développement de groupes linguistiques même s'ils n'ont pas le nombre suffisant.
    Et nous on discute d'occupation double. Les conservateurs doivent avoir hâte que la LNH se remette à jouer afin qu'on boive encore plus.

  • Archives de Vigile Répondre

    17 décembre 2012

    Monsieur Archambault
    Andrée Champagne et Pierre Debané, deux anciens députés libéraux fédéraux derrière cette manipulation des chiffres pour grossir la minorité des anglophones du Québec; ça ne me surprend pas du tout. Le pire ennemi du Québécois: c'est un autre Québécois, résultat du colonialisme anglo-saxon que nous subissons depuis la conquête de 1759. Vous n'avez qu'à penser à Trudeau et à Chrétien.
    Pas nécessaire d'aller à Ottawa pour les reconnaître; ils fourmillent dans tous nos partis politiques à Québec. Des collabos, des valets de service, des carriéristes bien entretenus par le système politique fédéraliste qui en retour de leurs services leur offre une pension à vie après deux mandats passés sur les banquettes de l'Assemblée Nationale (filiale d'Ottawa) après avoir prêté un serment d'obéissance, de loyauté à la couronne britannique. Que de prostitution et de lâcheté! J'ai bien aimé votre texte.
    André Gignac 17 déc 12