La catastrophe québécoise

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Alain Dubuc ne rate pas une occasion pour diminuer et humilier le Québec

Environ 1,2 millions de Québécois ont une maîtrise si faible de la lecture, ce qu'on appelle maintenant la littératie, qu'ils ne peuvent pas fonctionner normalement. Un autre 2,2 millions n'a pas le niveau de littératie suffisant pour pleinement se développer.
C'est une catastrophe. Pour les individus eux-mêmes, dans leur vie personnelle et dans leur travail. Pour la société, qui a besoin de travailleurs qualifiés mais aussi de citoyens bien adaptés à un environnement de plus en plus complexe.
Et pourtant, un avis du Conseil supérieur de l'éducation sur la littératie, en septembre, est passé largement inaperçu. Tout comme les résultats d'une vaste étude de l'Organisation de coopération et de développement économiques en octobre.
Cette étude, le Programme pour l'évaluation internationale des compétences des adultes, réalisée par l'OCDE dans 22 pays, mesure les aptitudes des personnes de 16 à 65 ans en lecture, la littératie, dans le maniement des chiffres, la numératie, et dans la maitrise des nouvelles technologies.
Le Canada, avec un score de 273,5 sur 500 aux tests de compétence en lecture, est très légèrement au dessus de la moyenne de l'OCDE et se classe 10e sur 22. Mais au Canada, le Québec, avec 268,6, est la 8e province sur 10, ne devançant que le Nouveau-Brunswick et Terre-Neuve. Le Québec se retrouverait ainsi au 17e rang du classement international, tandis que l'Alberta serait au 7e rang. Ce sont des résultats extrêmement troublants.
Mais il ne s'agit pas d'un concours. L'étude, à travers une série de tests, a pour but d'évaluer la capacité «de comprendre, d'évaluer, d'utiliser et de s'approprier des textes écrits pour participer à la société, réaliser ses objectifs et développer ses connaissances et son potentiel».
Les résultats permettent de classer les citoyens d'un pays selon leur niveau de compétences. On découvre alors que ceux dont les aptitudes en littératie sont trop faibles pour fonctionner normalement, les niveaux 1 ou inférieur à 1 dans le jargon de l'étude, sont plus nombreux au Québec que partout ailleurs au Canada, à l'exception de Terre-Neuve.
19% des Québécois sont au bas de l'échelle, ce qui donne 1,2 millions d'adultes qui, sans être analphabètes, ne peuvent décoder que des textes extrêmement simples. Cette proportion est très élevée. Elle n'est que de 15% en Ontario, de 12,8% en Australie, de 11,9% aux Pays-Bas, ce qui place le Québec 20e sur 22 à l'échelle internationale, devant l'Italie et l'Espagne.
On retrouve aussi au Québec une proportion élevée de citoyens, 34%, qui sont au niveau 2, fonctionnels mais pas assez pour vraiment s'épanouir dans une société moderne. C'est ainsi que le Québec compte 53% de ces citoyens qui n'ont pas les compétences souhaitables, soit 3,4 millions de personnes. Encore là, en tête de queue canadienne.
Même chose pour la maîtrise des outils technologiques, où le Canada fait un peu mieux, mais où le Québec est également parmi les dernières provinces. Pour la numératie, toutefois, le Québec est dans la moyenne canadienne.
Qu'est ce qui fait que le Québec se trouve dans le camp des provinces démunies? En partie l'immigration, quoiqu'il y a encore plus d'immigrants dans les provinces qui font mieux. En partie, les lacunes passées du système scolaire, quoique l'étude porte sur les 65 ans et moins. Mais il faut surtout regarder du côté d'un bagage scolaire insuffisant, notamment à cause du décrochage. Mais aussi la déperdition progressive des aptitudes après la sortie de l'école, parce que les Québécois lisent trop peu, qu'il n'y a pas assez d'éducation permanente pour les stimuler.
Mais derrière, on retrouve un problème de valeurs d'une société qui ne valorise pas la lecture et qui, 50 ans après la Révolution tranquille, n'a toujours pas réussi à complètement effacer le poids du passé.


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