Projet Rabaska

L'incontournable facteur de l'acceptation sociale

Tribune libre


Depuis déjà plusieurs mois, un groupe industriel s'affaire activement à la promotion d'un projet de terminal de gaz naturel liquéfié à Lévis sur la rive sud de Québec. Devant la vive opposition d'un regroupement de citoyens et du conseil municipal de la ville de Beaumont, le groupe industriel a déplacé son projet quelques dizaines de mètres plus loin. Cette façon de faire visait évidemment à contourner les opposants en relocalisant ainsi le site de construction sur le territoire de la ville de Lévis où le conseil de ville lui semble moins réfractaire.
Mais comme on le sait, déplacer le problème est rarement une solution. C'est ainsi que le groupe de citoyen opposant qui s'est donner le nom de Rabat-joie continue de contester le projet avec la dernière énergie.
Évidemment, les arguments invoqués par les opposants sont futiles aux yeux du groupe industriel Rabaska qui tient mordicus à voir son projet aboutir et ce, quoi que les citoyens environnants en pensent. Et c'est ainsi que ce groupe a entrepris de jouer une véritable partie de chat et de souris avec les opposants. De discrédits en appuis patentés, de déménagements factices en politiciens endormis par des promesses de taxes (loin d'être payés) et de soi-disant retombés économiques, de bataille de chiffres en bataille d'experts, à voir finalement les arguments et le site internet de Rabaska, on croirait aujourd'hui avoir à faire à un projet qui va nous apporter du bonheur liquéfié dans les cuves des supertankers.
Dernièrement, c'est le port de Québec, sous la gouverne de son délirant directeur Ross Gaudreault, qui est intervenue. Le port qui, on le comprendra, y trouve grandement son intérêt, a saisi la cour supérieur d'une requête en injonction aussi inusitée que farfelue et qui vise à faire taire tous les opposants au projet. Des menaces de poursuites pèsent aussi sur certains de ces derniers. Il s'agit là d'une technique connu et appelé « SLAPP », pour « Strategic lawsuit against public participation », Elle vise essentiellement à épuiser financièrement, intimider et décourager les opposants à un projet industriel en multipliant les recours juridiques et les poursuites. Une façon de faire révoltante et dégoutante qui foule au pied le droit à la liberté d'expression et n'attire aucune sympathie envers le projet. En tout les cas, cela donne un bon aperçu des forces qui s'affronte et témoigne aussi de l'atmosphère de mesquinerie qui règne dans la capitale nationale à l'aube des festivités de 2008.
Quoi qu'il en soit, tout cela est bien beau mais il semble évident qu'à travers ces démarches inélégantes, le promoteur ai omis le fait que, traditionnellement et culturellement, la région ne se prête pas d'emblée à ce type d'activité industrielle. Et toutes les finasseries du monde ne changeront rien au fait que ce projet est enfoncé dans le gorge d'un nombre important de gens qui vivent dans un environnement dénué de toute tradition industrielle lourde et qui perçoivent la démarche du groupe Rabaska comme une agression. D'ailleurs, la région toute entière de Québec tend d'avantage à structurer son économie autour des services, des hautes technologies et du tourisme. Rabaska ne cadre pas du tout dans cette démarche.
Quant à la sécurité du projet, il est connu que le fleuve St-Laurent est l'une des voies navigables les plus complexes du monde et qu'incidemment, les risques associés à de telles opérations maritimes sont élevés. À ceux qui argumentent que ce genre d'opérations existe déjà, disons ici que ce n'est pas parce que l'on a fait l'erreur de laisser les supertankers se rendre au terminal de la firme Ultramar, qu'il faut retomber dans le panneau une deuxième fois.
Pour ce qui est de l'historique des opérations maritimes tant à l'échelle mondiale que sur le plan local, elle démontre que les erreurs de pilotage sont monnaie courantes et que les accidents maritimes impliquant des pétroliers ont souvent des conséquences désastreuses. La même histoire démontre aussi que les armateurs sont assez fréquemment des gens peu scrupuleux et pas très fiables, voir même intouchables. Ils ont l'habitude de multiplier les dédales d'entités juridiques et les filiales afin de se soustraire aux responsabilités légales qui découlent de leurs actions. Conséquemment, pouvons-nous avoir confiance croyez-vous ?

En conclusion
Rabaska est tout de même obnubilé par la finalité de son affaire. Le groupe continue de cultiver une vision sectaire de son projet en excluant l'idée de considérer le point de vue d'un nombre non négligeable de citoyens qui s'y oppose. Il réplique au coup pour coup et croit ainsi pouvoir reprogrammer une opinion publique qui ne croit généralement plus en ce type d'entreprise. En effet, bon nombre de nos concitoyens voient une menace dans la perspective d'activités industrielles lourdes à proximité de chez eux.
Pour ces gens, la qualité de vie, le patrimoine et l'esprit de conservation des beautés et des paysages naturelles valent bien les retombés économiques d'un projet comme Rabaska, Ce sont là les valeurs structurantes qu'ils ont choisi de défendre. Les promoteurs du projet Rabaska pourront-ils comprendre cela et accorder à ces citoyens le respect qu'ils méritent ?

Daniel Lévesque

arrondissement Beauport


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