L’extrême droite gagne du terrain en Europe

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La gauche libérale paniquée : c'est la fin de son hégémonie culturelle

Depuis les années 2000, l’extrême droite gagne du terrain en Europe. En 2017, plusieurs scrutins clés ont confirmé la tendance en France, en Allemagne, en Autriche et aux Pays-Bas. Le succès des partis populistes, eurosceptiques et hostiles à l’immigration, accélère la recomposition du paysage politique mais génère aussi des frictions au sein de ces formations.



Les partis d’extrême droite ont enchaîné les scores historiques, même s’ils n’ont accroché aucune victoire nationale à leur tableau de chasse. « L’extrême droite en Europe aujourd’hui est plus populaire que jamais depuis 1945 », constate le chercheur néerlandais Cas Mudde, professeur associé à l’Université de Géorgie, aux Etats-Unis.



Le Parti pour la liberté (PVV) de Geert Wilders est devenu en mars la deuxième force du Parlement néerlandais, derrière les Libéraux, avec 20 sièges sur 150 et un gain de cinq élus.



En France, la présidente du Front national Marine le Pen s’est qualifiée pour le second tour de la présidentielle du printemps en doublant quasiment le nombre de voix obtenues par Jean-Marie Le Pen quinze ans plus tôt. Choc encore aux législatives allemandes de septembre avec la percée sans précédent de l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), entrée au Bundestag avec 12,6% des voix, contre 4,7% il y a quatre ans.



Les résultats de Marine Le Pen et Geert Wilders, qui visaient la victoire finale dans leurs pays respectifs, ont pu donner le sentiment d’une contre-performance, mais «le verre est bien aux trois-quarts plein pour les forces nationalistes», estime le politologue français Patrick Moreau.



Le FPÖ autrichien, aîné de la famille nationaliste européenne, a clos ce gymkhana électoral sur un score proche de son record, lors des législatives du 15 octobre (26%), et a obtenu trois ministères régaliens (Intérieur, Défense, Affaires étrangères) au sein du gouvernement qu’il partage avec les conservateurs.



En Italie et en Suède, où des législatives sont prévues en 2018, l’extrême droite est en embuscade.



Insécurité



« Chaque pays raconte une histoire différente, mais derrière le succès des droites radicales, on retrouve toujours la notion d’insécurité, réelle ou perçue, liée aux flux migratoires, au terrorisme ou aux incertitudes économiques », note Mabel Berezin, professeure de sociologie à l’université américaine de Cornell.



Le succès de l’extrême droite dans des pays prospères comme l’Allemagne et l’Autriche conforte «les analyses qui montrent depuis des décennies que l’immigration est une préoccupation clé» de l’électorat d’extrême droite, explique Cas Mudde.


L’extrême droite en Europe aujourd’hui est plus populaire que jamais depuis 1945.


Cas Mudde, professeur associé à l’Université de Géorgie


L’AfD et le Parti de la liberté d’Autriche (FPÖ) ont enregistré leurs succès dans des pays qui ont été parmi ceux, en Europe, à avoir accueilli le plus de migrants depuis 2015, alimentant les débats sur le coût des prestations et sur la capacité d’intégration des nouveaux venus.



La présence d’immigrés ne détermine pas seule les performances des droites extrêmes, qui profitent aussi d’un ressentiment vis-à-vis des partis et des élites politiques, économiques ou culturelles.



Place aux stratégies



Ostraciser, copier, coopérer ? Les autres formations politiques, notamment le camp conservateur, sont bousculées par l’enracinement de l’extrême droite, et contraintes d’adapter leur stratégie.



Le choix du jeune conservateur autrichien Sebastian Kurz, 31 ans, de concurrencer le FPÖ sur les thèmes de l’immigration, de la place de l’islam dans la société et de la sécurité a logiquement conduit les deux partis à sceller un accord de coalition.



« Kurz est allé très loin dans son rapprochement idéologique avec le FPÖ, une stratégie qui peut marcher à condition qu’il ne brade pas complètement l’identité de son parti », avertit le politologue autrichien Thomas Hofer.



En Bulgarie, le parti de centre-droit du Premier ministre Boïko Borisov gouverne depuis mars avec une coalition de partis nationalistes.



En Hongrie, le positionnement de plus en plus xénophobe de Viktor Orban, issu du camp conservateur, permet paradoxalement aujourd’hui au parti extrémiste Jobbik, qui a modéré son discours, de se présenter comme la principale alternative au dirigeant.



En France, des alliances avec l’extrême droite restent exclues par les partis traditionnels, tout comme en Allemagne et aux Pays-Bas. Mais la droite française vient de se choisir pour leader un élu quadragénaire, Laurent Wauquiez, accusé de surfer sur les thèmes du parti de Marine le Pen.



Succès de courte durée



Cas Mudde prédit cependant que les partis traditionnels cherchant à imiter l’extrême droite n’enregistreront que « des succès de court terme » car ils sous-estiment le sentiment anti-système de cet électorat.



Les turbulences internes traversées par le Front national et l’AfD depuis leurs poussées électorales illustrent la difficulté à mettre durablement entre parenthèse des divergences internes parfois profondes, liés à des choix idéologiques ou des rivalités individuelles.



L’année 2017 a aussi vu imploser le parti populiste et europhobe des Vrais Finlandais, mis à mal par l’exercice du pouvoir depuis 2015 au sein d’une coalition avec les centristes et les conservateurs.



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