L'esprit plus ouvert, vous dites?!

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Commission BT - le rapport «Fonder l’avenir - Le temps de la conciliation»



Selon The Gazette, le rapport de la commission Bouchard-Taylor va recommander aux Québécois francophones d'avoir l'esprit plus ouvert. De qu'esse? L'esprit plus ouvert!? Les Québécois de souche? C'est comme dire aux Suisses qu'ils devraient être plus propres. Ou aux Japonais, qu'ils devraient être plus travaillants.


S'il y a une chose dont on peut être fier, c'est ben d'avoir l'esprit ouvert. C'est tout ce qu'on a, l'esprit ouvert. Si notre esprit s'ouvre encore plus, j'ai peur qu'on le perde. Qu'il casse en deux. On est tellement ouverts que les deux fois où l'on nous a offert de devenir un pays, d'avoir nos frontières, nos lois, nos pouvoirs, nos impôts, notre clé, notre serrure, on a dit NON! On veut rester ouverts. Jusqu'aux Rocheuses!
Entrez! Entrez! Nos bars sont ouverts jusqu'à 3h! Nos dépanneurs sont ouverts 24 heures. Nos forêts sont ouvertes à toutes les compagnies qui veulent les exploiter.


Gérard Bouchard aurait pu nous dire, comme son frère, d'être plus productifs, on aurait compris. On pourrait aussi nous dire d'être plus solidaires, plus entrepreneurs, plus ambitieux. Avoir l'esprit plus communautaire. Se tenir un peu plus entre nous, au lieu de se ternir les uns, les autres. On aurait fait notre mea-culpa. Mais plus ouverts! La contorsionniste du Cirque du Soleil a l'air raide et ankylosée à côté de notre ouverture.
C'est sûr que parmi tous les gens qui ont pris la parole à la commission Bouchard-Taylor, il y a eu quelques tapons. Qui nous ont fait mal paraître. Mais on ne juge pas un peuple à ses tapons. Les anglophones du Canada avec leur Don Cherry sont-ils plus ouverts que nous? Nous, on les aime les Kovalev, Plekanec, Kostitsyn. On a même échangé un Français pour faire de la place à Price. On est tellement ouverts que notre club de hockey, notre plus grande fierté, appartient à un Américain. Les fans de Liverpool sont-ils plus ouverts que nous?


Tous les grands gueulards radiophoniques qui tenaient des propos offensants pour une race, un regroupement ou une Miss Météo ont perdu leurs jobs. Tandis que les Howard Stern sévissent encore aux States. Mario Dumont, notre politicien le plus barré, est Gandhi à côté de Jean-Marie Le Pen.
C'est sûr que dans les années 50, les immigrants joignaient les rangs de la communauté anglophone parce que les francophones étaient plus catholiques que le pape. Mais aujourd'hui, nos églises sont aussi ouvertes que vides. On ne croit plus en rien. Même pas en nous. On est tellement ouverts qu'on a pogné un courant d'air. On est si peu nationalistes qu'on ne veut ni d'une nation, ni d'un référendum, ni d'une conversation. Protectionnistes, mon oeil!
Cela dit, on ne peut pas être contre la vertu. Et l'on n'est jamais assez ouvert. Bien sûr, on pourrait l'être plus. Mais si on se compare à bien des pays, l'intégration des immigrants au Québec se fait dans l'harmonie. Ici, nos émeutes, c'est quand le Canadien gagne. Heureusement, il ne gagne que la première ronde des séries. Pas d'émeute, lorsque le YWCA décide de givrer ses vitres. Pas d'émeute, quand on ne respecte pas la loi 101. Là, on dénonce, on se moque, on dit: wow, minute! C'est tout. Personne n'en vient aux coups!

Hérouxville et la place Tiananmen, c'est pas le même combat.
Personne ici n'est mort pour défendre sa communauté. À part les nôtres. Les Patriotes de 1837, que l'on célèbre demain, furent les victimes d'esprits fermés. Qui ne reconnaissaient pas les droits d'une minorité majoritaire. Ce fut notre destin. Et nous avons eu la sagesse ou la faiblesse de ne pas nous venger.
Au Québec, les grands débats sociaux entourant l'avortement, les droits des femmes, des homosexuels, les moeurs sexuelles, la tolérance des différences, se sont toujours déroulés dans le plus grand des respects. Le Canada de Harper et les USA de Bush peuvent prendre exemple sur nous.
La preuve qu'on est ouverts, c'est qu'on a compris les recommandations même si elles étaient écrites en anglais dans The Gazette. C'est d'ailleurs un de leurs conseils aux commissaires: les francophones devraient avoir une meilleure connaissance de l'anglais. Ne plus voir l'anglais comme la langue du conquérant qui nous menace, mais comme la langue qui donne accès au pouvoir. Entre vous et moi, c'est assez semblable.


Bref, le jour où les Québécois vont être aussi ouverts que ce que souhaitent Bouchard-Taylor, j'ai bien peur que l'on soit open. Et que la culture française soit fermée. Ou vendue.
Peut-être que The Gazette a tout faux. Probablement que les commissaires nous envoient aussi des fleurs et qu'ils n'ont retenu que le pot. Peut-être que leur jugement est plus nuancé. Qu'il n'y a pas que les Francos qui ont des responsabilités dans toutes ces histoires accommodantes. Après tout, The Gazette préfère toujours souligner les erreurs de Brisebois plutôt que celles de Ryder.
La parution du rapport Bouchard-Taylor, cette semaine, sera une belle preuve de notre ouverture. Ça va chialer un peu. Mario Dumont va essayer de ressusciter son parti en profitant de la polémique. Certains éditorialistes écriront que les commissaires n'ont peut-être pas tout à fait tort. On va dire: OK d'abord! Et la vie va continuer.
Au Québec, la vie continue toujours. Parce que la porte est ouverte.


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