L'élite au pouvoir, même dans l'opposition

Chronique de Pierre Gouin

Au début des années soixante, l’élite québécoise s’est désintégrée comme groupe social sous la force des changements qui transformaient la société. La révolution tranquille a pu s’amorcer alors que le Québec était libéré des contraintes d’une élite qui vise à se perpétuer. De nouveaux leaders, plus ouverts aux idées scientifiques et plus proches des milieux d’affaires se sont manifestés et le gouvernement du Québec a fonctionné dès lors comme un gouvernement du peuple. Des réformes sociales majeures ont été réalisées et dans le même temps le peuple du Québec s’est donné des instruments d’autonomie avec la nationalisation de l’électricité et la création de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Les leaders les plus idéalistes ont rêvé d’un pays souverain et ont créé le Parti québécois. Une fois au pouvoir ils se sont révélé aussi des plus compétents et pendant quelques décennies le projet d’indépendance a attiré en politique des Québécois de grand talent. L’affirmation de la souveraineté du Québec s’est manifestée puissamment dans la loi sur la protection de la langue française.
Cette analyse très sommaire de l’histoire récente du Québec a pour objectif de soulever une simple question: une nouvelle élite cohérente ne s’est-elle pas reformée au Québec, ayant comme objectif premier de se perpétuer avec ses privilèges? Cela empêcherait désormais un gouvernement du Parti québécois, dont les dirigeants seraient intégrés à l’élite, de se comporter comme un gouvernement du peuple.
En effet, on peut se demander où sont les porte-paroles du Parti québécois pendant que le gouvernement de l’élite fédéraliste s’acharne à diminuer le Québec?
Pourquoi le parti a-t-il abandonné si facilement la bataille pour obtenir une enquête sur les pertes et le camouflage à la Caisse de dépôt et placement, où l’argent et les privilèges mal acquis sont potentiellement aussi importants que dans l’industrie de la construction?
En outre, l’absence d’un bilan sérieux laisse un doute effrayant quant à la capacité de la nouvelle direction de redresser la situation et nuit grandement à la crédibilité de la Caisse. Est-ce que les dirigeants du parti ont trop d’affinité avec les personnes qui risqueraient d’être embarrassées?
Pourquoi le parti est-il silencieux alors que les représentants du Québec Inc. tentent d’extorquer aux détenteurs de fonds de retraite du financement à rabais sous le fallacieux prétexte de création d’emplois et de développement économique? Le Parti québécois est proche du Québec Inc. mais les payeurs de taxes québécois ont déjà donné.
Pourquoi le Parti québécois est-il silencieux lorsque le premier ministre signe des ententes majeures concernant Hydro-Québec sans consulter le parlement, des ententes qui présentent des rendements minimes compte tenu des risques financiers, et qui fragilisent dangereusement le contrôle québécois sur l’entreprise? Trop d’amis aussi dans les hautes sphères de l’ingénierie québécoise?
Pourquoi le Parti québécois est-il silencieux pendant que le gouvernement libéral laisse se développer en douce le secteur privé de la santé, dont les ressources humaines sont nécessairement volées au secteur public québécois qui les a formées? Trop d’amis dans la profession médicale?
Pourquoi le Parti québécois est-il silencieux quant au parti pris actuel en faveur des hausses de tarifs pour la réduction du déficit, alors que l’avantage économique de la tarification sur la taxation est de réduire la demande de services publics, en excluant ceux qui n’ont pas les moyens de payer? L’opposition péquiste devrait dénoncer cette approche idéologique, proposer une démarche pragmatique et rassembleuse et attaquer agressivement le premier ministre qui profite de la crise des finances dont il est en bonne partie responsable pour tenter de désunir les Québécois.
Pourquoi le gouvernement du Parti québécois a-t-il laissé tomber le thème du déficit fiscal quand nous payons des dizaines de milliards en impôts et taxes à Ottawa sans avoir un mot à dire sur l’utilisation de ces fonds? Est-ce que toutes les dépenses fédérales sont plus essentielles que les dépenses en santé et en éducation que nous devons restreindre?
Pour plusieurs militants il semble que la promesse de promouvoir la souveraineté et de tenir un référendum rapidement soit le premier critère pour choisir les leaders du Parti québécois. Cela donne peut-être beau jeu aux leaders élitistes qui aimeraient passer sans turbulence de dirigeants d’un gouvernement provincial à dirigeants d’un pays. Cependant, les Québécois ne donneront pas un vote de confiance aveugle sur un enjeu aussi sérieux que l’indépendance sans que les leaders n’aient démontré qu’ils sont prêts à gouverner dans l’intérêt du peuple.


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7 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    25 janvier 2010

    Les sans pays, colonisés, employés de Raymond Chrétien (neveu de Jean Chrétien et membre du Bilderberg), discuttent des stratégies de reconstruction d'Haiti. Faut-il reconstruire ou construire ? Hummmm.... :
    http://www2.lactualite.com/jean-francois-lisee/reconstruire-ou-construire-haiti/1646/

  • André Taillon Répondre

    24 janvier 2010

    Notre séisme à nous Québécois. Ce sont ces sempiternels intellectuels soi-disant lucides qui ont monopolisée le terrain politico-économique depuis 40 ans et utilisé le pouvoir pour leurs profit. Le citoyen lui, s'est fait déposséder de son pouvoir de définir la société dans laquelle il veut vivre.
    À bien y penser, si nous sommes prisonnier de nos propres décombres et enseveli dans nos mentalités corrompu c’est bien à cause de ces lucides.
    Ce sont eux qui ont été instigateurs de nos déboires actuels. Ce n’est pas avec ce genre d’élites que l’on peu s’attendre à devenir quelque chose comme un grand peuple.
    Ils me font penser à ces gens assis à la gare attendent un train qui ne viendra jamais.
    S’il y a quelque chose qu’ils ont réussi c’est certainement d’avoir menti au peuple et assurer leurs propres avenirs vers une retraites dorées!
    Je vais vous le dire moi par ou commencer! Il faut d’abord se débarrasser de ces acteurs à deux ou trois lettres PQ PLQ. Ils ont tous errer, divaguer et jouer avec notre avenir comme on joue au casino.
    Soyons sérieux pour une fois, mettons les tous dehors!

  • Sylvie Tremblay Répondre

    24 janvier 2010

    Effectivement !
    Je suis d'accord avec vous là-dessus, monsieur Gouin.
    Jeanne du Lys
    Ça devrait vous intéresser.
    http://www.voir.ca/blogs/jeannedulys/archive/2010/01/21/le-levier-201-conomique.aspx

  • Pierre Schneider Répondre

    24 janvier 2010

    " Les bourgeois, c'est comme des cochons.
    Plus ça devient vieux, plus ça devient bête.
    Les bourgeois, c'est comme des cochons.
    Plus ça devient vieux, plus ça devient con"

    - Jacques Brel.

  • Archives de Vigile Répondre

    23 janvier 2010

    Monsieur Gouin,
    J'ai bien apprécié votre article qui reflète assez bien la situation politique et économique que nous vivons présentement au Québec. Je ne vois aucune différence entre le PQ et le PLQ; ces 2 partis sont vendus à l'establishment économique et se situent à droite; donc, ils feront toujours passer les intérêts de la bourgeoisie avant ceux du peuple québécois avec des politiques les favorisant. Ils sont tous les deux pour la mondialisation et le multiculturalisme en plus, pas de quoi à diminuer le cynisme dans la population. Le silence actuel du PQ sur la souveraineté est assez révélateur à cet égard. Les dirigeants de ce parti sont coincés avec leur projet et seul un nouveau parti politique axé plus vers la gauche peut nous mener vers l'indépendance et des réformes sociales pour le bien-être de la population. Dans le système actuel, le PQ est "out" pour nous mener à 'indépendance à moins d'un changement radical de cap ce que je doute fortement.
    André Gignac le 23 janvier 2010

  • Archives de Vigile Répondre

    23 janvier 2010

    Petite correction. Le démembrement de la Caisse c'est ici:
    http://www.vigile.net/Le-demembrement-en-trois-temps
    JCPomerleau

  • Archives de Vigile Répondre

    23 janvier 2010

    Pendant que les puissants réseaux d'intérêts libéraux squattent notre État de toutes parts, à leurs profits au détriments du bien publiques, le PQ .........
    Suite à une sous performance de 17 milliards en 2 ans, comparée aux autres fonds semblables, on démembre la Caisse pour en faire un fond indiciel géré de Toronto:
    http://www.vigile.net/Le-Quebec-floue-de-plus-10
    Et la Vandal-isation de l'Hydro Québec se poursuit:
    http://mcn21.org/actualites/article/mcn21-exige-le-congediement
    Et les PPP, Fiers etc Alouette je te plumerai.
    Pendant que l'on saccage systématiquement notre État , le PQ amorphe , poursuit son éternel impromptu à Outremont.
    JCPomerleau