L'affaire Matzneff ou le rappel que la pédophilie a toujours fait partie des moeurs des puissants​

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« Si le corps n'est qu'une matière à notre disposition, pourquoi certains corps, celui des enfants par exemple, garderaient-ils leur caractère "sacré" ? »

La pédophilie a toujours fait partie des mœurs des puissants. Sade donne sur ce plan un témoignage terrible. Dans la Philosophie dans le boudoir, il rappelle : "Néron, Tibère, Héliogabale immolaient des enfants pour se faire bander ; le maréchal de Retz, Charolois l’oncle de Condé, commirent aussi des meurtres de débauche : le premier avoua dans son interrogatoire, qu’il ne connaissait pas de volupté plus puissante que celle qu’il retirait du supplice infligé par son aumônier et lui sur de jeunes enfants des deux sexes." Sade et combien d’autres ? Toujours, le "divin marquis" donne la clé : "Il n’est point d’homme qui ne veuille être despote quand il bande." La domination sur les femmes trouve son prolongement dans la domination sur les enfants. Et la racine de toutes ces formes de domination n'est rien d'autre que la mise en esclavage de l'homme par l'homme. Lire ou relire Engels, même si on vous répète que c’est dépassé.


L'immense mérite de Freud est d'avoir montré que la civilisation repose sur l'interdit et l'ordre de la Loi qui définit la "logique des places". L'Œdipe indique que les pères ne peuvent être les partenaires sexuels des enfants et pas plus les mères, et que l’amour des enfants pour le père, la mère ou l’un de leurs substituts doit être refoulé pour être converti en désir de devenir adulte et d’aimer quelqu’un de son âge. Horrible apologie de la société patriarcale, lit-on ici et là. Et d’ailleurs, tout le monde branché sait ça : Freud est obsolète.


Le démontage systématique de Freud par le "libéralisme libertaire" et l'exaltation des "machines désirantes" accompagnent le mot d’ordre fameux, "il est interdit d’interdire", et un autre non moins fameux, "Jouir sans entraves, vivre sans temps morts". Les propagateurs de ces absurdités sont encore vivants et "du côté du manche", c'est-à-dire du pouvoir. C’est le bouillon de culture où se sont fabriquées les horreurs dont on feint de s'offusquer maintenant. Pousser des cris d'orfraie aujourd'hui contre Matzneff (qui ne l’a pas volé) et se réjouir de toutes les nouvelles transgressions qu'on nous propose là où domine l'idéologie "trans" (du transgenre au transhumanisme, toutes les frontières doivent être franchies), tout cela est assez étrange.


La domination sur les femmes trouve son prolongement dans la domination sur les enfants


"Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes", fait-on dire à Bossuet. Quand des philosophes à la mode, loués sur France-Culture, célèbrent la zoophilie (Donna Haraway), "l'avortement post-natal" (Peter Singer) et l'euthanasie des vieux dont la vie n'a plus de valeur (encore Singer), au nom de quoi peut-t-on condamner la pédophilie ? On invoquera le consentement, comme dans l’éthique minimale, mais le consentement n’est souvent que l’alibi de toutes les servitudes – voir Michela Marzano, Je consens donc je suis, qui démonte clairement cette idéologie du consentement (PUF, 2006). Si le corps n'est qu'une matière à notre disposition, pourquoi certains corps, celui des enfants par exemple, garderaient-ils leur caractère "sacré" ?


Contre l’indécence généralisée, il faudrait retrouver la décence commune, c'est-à-dire la force de la morale


Bref si on était sérieux, si on n'était pas dans un énième gadget médiatique, les affaires Matzneff, Cohn-Bendit, le rappel des déclarations de soutien à la pédophilie dont nombre d’intellectuels parmi les plus prestigieux n’ont pas été avares (par exemple les pétitions de soutien à trois pédophiles, parues dans Libération et Le Monde en 1979 et signées par tout le gratin de l’intelligentsia française), les protestations contre les "people", devraient servir à une mise en question générale des mœurs de notre époque. Retrouver des idées simples : les enfants et les adultes ne sont pas sur le même plan, ils n’ont pas le même statut ; ce qu’on autorise entre adultes ne doit pas englober les enfants ! On n’est pas obligé de sur-sexualiser l’instruction en développant des prétendus enseignements sur les "phobies" modernes.


On ne peut faire des leçons de morale tout en promouvant comme symbole de la culture des "chanteurs" (sic) qui ne parlent que de "sucer des bites" et "encule" tel ou tel. On interdit la vente d’alcool aux mineurs, pourquoi se refuse-t-on à leur interdire la pornographie ? Pourquoi peut-on vendre tranquillement, et non dans les sexshops, des magazines pour adolescentes ou des sites qui leur sont destinés et qui indiquent tous les moyens de procurer du plaisir aux garçons ? Sites où entre "connaître sa famille pour Noël" et quelques recettes de cuisine, on peut facilement apprendre comment réussir une fellation.


Contre l’indécence généralisée, il faudrait retrouver la décence commune, c'est-à-dire la force de la morale.