Justin Trudeau et les pipelines : le mauvais pari

Tribune libre

En approuvant deux nouveaux projets de pipeline, Justin Trudeau va à l’encontre des recommandations des scientifiques, experts des changements climatiques et de la transition énergétique qui répètent à satiété que si l’humanité veut éviter un emballement incontrôlable de la température terrestre, avec tous les impacts associés sur la biodiversité et l’économie, les réserves connues d’hydrocarbures doivent rester dans le sol. Cela inclut les réserves de charbon, de gaz et de pétrole du Canada et des États Unis. En bref, aucune nouvelle infrastructure de transport ou d’exploitation d’hydrocarbures ne devrait voir le jour, alors que les pays industrialisés disposent de 10 à 15 ans pour éliminer leurs émissions de gaz à effet de serre (GES).

En approuvant deux nouveaux projets de pipeline, Justin Trudeau fait le pari que l’argent du pétrole servira à financer la transition énergétique. C’est en tout cas ce qu’il veut donner à croire aux citoyens. Cet argument ne tient pas la route lorsqu’on considère que les effets des GES sont cumulatifs. Au point où nous en sommes, la seule façon de faire la transition énergétique est de freiner radicalement les émissions. Faut-il rappeler qu’au-delà d’un certain seuil de saturation de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, la Terre se réchauffera toute seule par la perte du couvert de glace et le dégazage du méthane provenant de la fonte du pergélisol. Ce phénomène est déjà bien amorcé dans l’Arctique et plusieurs scientifiques pensent que la bataille est déjà perdue pour l’humanité.

En approuvant deux nouveaux projets de pipeline, Justin Trudeau fait peut-être le pari que les citoyens formeront un mur sur le terrain pour empêcher les travaux de se réaliser. Comme on le voit présentement avec le pipeline Dakota Access aux États-Unis. Plus de 5000 personnes occupent le terrain pour empêcher les bulldozers d’avancer. Les opposants font face à une petite armée privée qui tente de les déloger. Après avoir satisfait les riches contributeurs de son parti, Trudeau pourrait toujours se rabattre sur le manque d’acceptabilité sociale pour finalement laisser les tribunaux donner gain de cause à ceux et celles qui veulent protéger leur eau, leurs terres agricoles, et les conditions pour la survie de leurs enfants et petits-enfants.

Une chose est certaine : celui qui s’est fait élire comme chef du gouvernement canadien en promettant que l’analyse des projets de pipelines tiendrait compte de la science ne peut pas ignorer l’urgence de la transition énergétique. En refusant d’imposer un moratoire sur tout nouveau projet de développement des sables bitumineux, Trudeau fait preuve d’un manque total de leadership. Il laisse aux seuls citoyens le fardeau de la lutte contre les énergies fossiles. Comme l’empereur Néron jouant du violon pendant que Rome brûle.

Comité vigilance hydrocarbures de l’Assomption


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9 commentaires

  • Pierre Grandchamp Répondre

    5 décembre 2016

    A lire cette superbe chronique de Stéphane Laporte:
    "Quand la santé de l'économie passe avant la santé des citoyens, c'est que la société est malade.
    Justin Trudeau représentait un vent frais dans le paysage politique. Un vent frais ne sent pas le gaz. Comment le Canada parviendra-t-il à respecter ses engagements énergétiques s'il ne cesse d'augmenter sa production de pétrole ?
    L'accord de Paris, ce n'est pas juste une photo Instagram. C'est un document. C'est un serment.
    Au moins, Trump ne se positionne pas en défenseur de l'environnement. Il s'en torche. Comme les torches des puits de pétrole. Pour lui, tout ce qui compte, c'est le cash. En produisant plus de pétrole que les Canadiens en consomment, le Canada pense comme Trump. Sans l'assumer.
    Aujourd'hui, les bons pères de famille n'emmènent pas leur famille mettre du gaz. Ils l'emmène marcher, courir, bouger. À vélo. Ou en canot.
    Non à Trans Mountain. Non à Énergie Est.
    Il faut vivre avec son temps avant de ne plus avoir le temps de vivre. "
    http://www.lapresse.ca/debats/chroniques/stephane-laporte/201612/02/01-5047663-aller-mettre-du-gaz.php

  • Pierre Grandchamp Répondre

    5 décembre 2016

    @ M. Gignac
    Denis Coderre parle au nom des 82 villes ou municipalités de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM).

  • Gaston Carmichael Répondre

    5 décembre 2016

    «Qu’attendent les Québécois pour contester le projet Énergie Est ?»
    - Une marche de 700 km entre Cacouna et Kanesatake, avec arrêt dans chaque village pour sensibiliser les conseils municipaux.
    - En Outaouais, on a répété l'expérience: Marche de 122 km d'Argenteuil (point de traverse de la rivière Outaouais) à la colline parlementaire à Ottawa.
    - Pétition à l'Assemblée Nationale du Québec
    - Pétition à la Chambre des Communes à Ottawa (parrainé par le Bloc Québécois)
    - De nombreuses autres manifestations locales un peu partout
    - D'innombrables campagne Facebook.
    Vous semblez ne pas avoir été atteint, M. Gignac, mais la mobilisation contre Énergie-Est s'est faite avec succès à travers tout le Québec. Même le maire Coderre est ébranlé. L'opinion publique est très majoritairement contre Énergie Est.
    Selon moi, Justin va sans doute mettre ce projet sur la glace pour quelques années, le temps qu'il puisse retravailler l'opinion publique. Il n'est quand même pas suicidaire. Toutefois, il n'abandonnera pas le projet. Il faudra continuer à être vigilant.

  • Archives de Vigile Répondre

    5 décembre 2016

    Erratum
    Oléoduc au lieu de éléoduc dans la manchette. Merci
    André Gignac 5/12/16

  • Archives de Vigile Répondre

    5 décembre 2016

    Nouvelle encourageante,les Amérindiens viennent de gagner leur combat contre le passage du pipeline sur leurs terres au Dakota du Nord après une rude bataille contre des forces policières armées militairement.Malgré tout çà,ils étaient prêts à passer l'hiver dehors pour continuer le combat.Conscience,courage et détermination,les Protecteurs de l'Eau nous donnent une leçon.
    https://www.washingtonpost.com/news/energy-environment/wp/2016/12/04/army-will-deny-easement-halting-work-on-dakota-access-pipeline/
    Saurons-nous sortir de notre confort douillet lorsque ce sera le temps de lutter contre le passage du pipeline d'Énergie Est sur notre territoire?

  • Archives de Vigile Répondre

    5 décembre 2016

    DERNIÈRE HEURE! DERNIÈRE HEURE!
    Voici la manchette du quotidien La Presse hier soir le 4/12/16 à 20.44 heures:
    (Agence France Presse)
    DAKOTA DU NORD: LE TRACÉ D'UN ÉLÉODUC CONTROVERSÉ EST
    REJETÉ.
    Les autorités américaines ont annoncé, dimanche, avoir rejeté le tracé d'un
    oléoduc controversé dans le Dakota du Nord, offrant une victoire aux
    Amérindiens et aux écologistes qui le contestaient. - Fin-
    Qu'attendent les Québécois pour contester le projet Énergie Est?
    André Gignac 5/12/16

  • Gaston Carmichael Répondre

    4 décembre 2016

    @ M. Gignac,
    Le PQ a quand même déposé une motion à l'Assemblée Nationale afin que celle-ci se prononce clairement contre Énergie-Est. Évidemment, cela n'a pas produit grands effets dans l'immédiat, mais a eu au moins le mérite d'exposer l'attitude accommodante du PLQ et de la CAQ sur ce dossier.
    On peut se désoler que Lisée ne se soit pas enchaîné à une station de pompage, mais il a choisi de livrer ce combat autrement.
    http://pq.org/nouvelle/le-plq-et-la-caq-ont-vote-en-faveur-denergie-est-d/

  • Archives de Vigile Répondre

    4 décembre 2016

    Denis Coderre est le seul dirigeant au Québec à avoir émis une opinion sur la construction de ces 2 oléoducs en mentionnant que le projet d'Énergie Est n'avait plus sa raison d'être avec la construction de ces 2 oléoducs dans l'ouest "canadian". Évidemment, c'est contre ce projet d'Énergie Est que le PQ pourrait faire du millage pour l'indépendance du Québec (à date, sa contestation est nulle); j'ai voulu clarifier mon premier commentaire.
    André Gignac 4/12/16

  • Archives de Vigile Répondre

    2 décembre 2016

    À l'annonce de cette nouvelle, cette semaine, aucune dénonciation ou critique venant de l'opposition à l'Assemblée nationale du Québec. Le PQ pourrait faire énormément de millage pour la cause de l'indépendance au Québec avec ce dossier mais connaissant les intérêts de l'establishment derrière ce parti idem pour le PLQ et la CAQ, rien ne se passera.
    C'est au peuple de se mobiliser comme au Dakota. Comme toujours ce seront les Amérindiens qui seront les premiers au front si ça se produit au Québec. Vive le confort et l'indifférence! Vive le Canadien de Mouréal!
    André Gignac 2/12/16