J’aime Les salopes!

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L'hégémonie culturelle du féminisme libéral mis à mal par un nouveau film québécois

En fait, pour être plus précise, je devrais dire que j’aime... le film Les salopes ou le sucre naturel de la peau, de la réalisatrice québécoise Renée Beaulieu, qui a pris l’affiche vendredi.


Mais avouez-le, vous avez commencé à lire ma chronique à cause du titre.


Maintenant que j’ai votre attention, jasons un peu : pourquoi les femmes qui ont des amants, qui aiment la chose, qui parlent de sexe ouvertement sont-elles considérées comme des salopes ? C’est un peu la question que pose le film et c’est pour ça que je l’ai trouvé brillant, audacieux et... jouissif !


DON JEANNE OU CASANOVETTE ?


Ce film formidable raconte l’histoire de Marie-Claire (interprétée par Brigitte Poupart), une mère de famille qui s’envoie en l’air avec ses élèves (elle est chercheuse et prof à l’université), ses collègues et de parfaits inconnus.


Elle aime son mari d’amour, mais elle désire d’autres hommes. Les deux sont bien compartimentés dans sa tête et dans son corps. Cette femme m’a fait penser au personnage joué par Rémy Girard dans Le déclin de l’empire américain. Sauf que la société ne perçoit clairement pas de la même façon un homme à femmes et une femme à hommes.


Quand j’ai interviewé Renée Beaulieu à QUB Radio, elle affirmait qu’il n’y a pas de termes positifs pour décrire une femme qui aime les conquêtes, il n’y a pas d’équivalent positif féminin à Don Juan ou Casanova. Juste les mots « salope » ou « nymphomane ».


Mais avant que vous pensiez que le film de Renée Beaulieu est un emmerdant pensum féministe donneur de leçon, je vous préviens : Les salopes est au contraire un film qui va à contre-courant du sacro-saint dogme des militantes québécoises.


Imaginez donc : Renée Beaulieu ose parler des cinquante nuances de gris qui entourent les cas d’agressions sexuelles. Elle ose laisser entendre que tout n’est pas noir et blanc, le gars forcément coupable, la fille forcément victime !


Un collègue d’université de Marie-Claire est accusé par une étudiante de l’avoir agressée. Oui, mais elle s’est rendue elle-même au chalet de son prof, ce n’était sûrement pas pour ramasser des pissenlits ! Et en plus, le personnage de Marie-Claire refuse de prendre systématiquement la défense de l’étudiante juste au nom de la solidarité féminine.


Oh boy ! J’ai hâte de lire les chroniques de nos féministes-offensées-à-temps-plein qui ont hurlé quand Louis Morissette a montré une scène de cul explicite dans Le Mirage...


Ah oui, parce qu’imaginez qu’en plus, Renée Beaulieu filme les scènes de sexe de façon hyper réaliste, qu’elle montre en gros plan le visage d’une femme qui aime ça, et que la première scène de sexe a lieu deux minutes après le début du film.


Une femme réalisatrice dont le personnage féminin n’est pas une pôvre victime du patriarcat ? Quel scandale !


CHACUN SON FÉMINISME ?


Vous pensiez qu’au Québec on était full à l’aise avec le sexe et qu’on admettait qu’il y avait 50 nuances de féminisme ? Pfffft, Renée Beaulieu n’a pas reçu d’argent de la SODEC, parce que « le film portait trop flanc à la controverse ».


Au Québec, le Milieu Artistique veut la parité, « Il faut qu’il y ait plus de femmes réalisatrices »... Mais on n’encourage que les femmes qui pensent du bon bord.